Japon: le chômage au plus bas en 25 ans

AWP

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Le recul à 2,4% en janvier surprend les économistes. Un reflet de l’expansion économique prolongée et de la pénurie de main-d’œuvre, selon Barclays.

Le taux de chômage au Japon est tombé en janvier à 2,4% de la population active, son niveau le plus bas depuis avril 1993, suscitant l’espoir que les salaires décollent enfin et viennent stimuler la reprise de la troisième économie mondiale.

Ce chiffre, qui a dépassé les attentes des économistes (2,8%, selon le consensus Bloomberg), reflète «à la fois l’expansion économique prolongée et la pénurie de main-d’oeuvre» liée au déclin démographique de l’archipel, ont commenté dans une note Yuichiro Nagai et Yukito Funakubo, analystes de Barclays.

Un tel recul est «quelque peu surprenant», a réagi le gouverneur de la Banque du Japon (BoJ) Haruhiko Kuroda à l’occasion de son audition au Parlement pour confirmer le renouvellement de son mandat, selon des propos rapportés par l’agence Bloomberg. «Je ne suis pas certain que ce niveau se maintienne».

Mais même s’il remonte, le taux de chômage affiche quoi qu’il en soit des performances historiques. Depuis début 2017, il se situe au-dessous de 3%, ce qui fait du Japon un des meilleurs élèves de l’OCDE.

Parallèlement, les conditions d’emploi sont extrêmement favorables, avec 159 offres pour 100 demandes en janvier, comme en décembre, un ratio qui n’avait pas été atteint depuis 1974.

Le Japon vit actuellement sa plus longue période d’expansion économique (huit trimestres de croissance du PIB d’affilée) depuis la bulle immobilière et financière de la fin des années 1980.

Cette série devrait se poursuivre en ce début 2018, d’après les pronostics des analystes, dans un contexte économique mondial favorable et sous l’effet de la stratégie de relance «abenomics» du Premier ministre Shinzo Abe, mise en oeuvre depuis fin 2012.

Toutefois, si les exportations et investissements des entreprises sont solides, la consommation des ménages reste morose alors que les salaires peinent à augmenter.

YEN FORT ET PROTECTIONNISME

«La forte baisse du taux de chômage en janvier est à première vue un bon signe suggérant que les employés vont gagner plus, dépenser plus et tirer la croissance», a souligné Yuki Masujima, de Bloomberg Economics.

Cependant «un examen plus en détail montre que la plupart des nouveaux emplois ont été destinés à des travailleurs précaires, âgés ou jeunes - des postes généralement pas très bien payés», a-t-il noté.

Les emplois de non-titulaires (en contrat à durée déterminée, à temps partiel et intérimaires) ont de fait fortement augmenté ces dernières années, passant de 20,3% des emplois totaux en 1994 à 37,5% en 2016, ce qui freine la croissance.

D’autres éléments incitent à la prudence, soulignant la fragilité de la reprise.

La production industrielle a trébuché de 6,6% en janvier sur un mois, selon des données préliminaires publiées mercredi par le ministère de l’Industrie. Il s’agit de la contraction la plus importante depuis mars 2011, quand le Japon avait été touché par un terrible séisme suivi d’un tsunami meurtrier.

Un probable accident de parcours, estiment les experts, tout en appelant à surveiller la récente appréciation du yen, susceptible de heurter les profits des entreprises exportatrices, et la volatilité boursière.

La tendance protectionniste des Etats-Unis, partenaire majeur du Japon, sous l’égide de Donald Trump pourrait aussi venir faire dérailler l’embellie que connait le Japon. Le président américain a annoncé jeudi de fortes taxes sur les importations d’acier et d’aluminium.

Malgré ces aléas, le gouverneur de la BoJ a redit vendredi sa détermination à vaincre durablement la déflation qui a paralysé l’économie nippone après l’éclatement de la bulle.

Les prix n’ont augmenté que de 0,9% en janvier sur un an, loin de l’objectif de l’institution qui a échoué pour l’heure à récolter les fruits de son ambitieuse politique d’assouplissement monétaire. «Si je suis renommé (une formalité étant donné que le Parlement est dominé par la coalition au pouvoir), j’apporterai la touche finale et ferai tout mon possible pour atteindre la cible de 2% et extirper l’économie de la déflation», a promis vendredi M. Kuroda, cité par les médias locaux.

L’objectif est d’y parvenir aux alentours de 2019-20, et ce n’est qu’à ce moment-là que la banque centrale réfléchira à une stratégie de sortie, a précisé le gouverneur.

 

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