Un pionnier des investissements durables

Salima Barragan

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Peter Michaelis de Liontrust souligne que la finance durable ne fonctionnera que si les Etats alignent leurs économies.

La boutique britannique n’en est pas à son premier coup. Plus de 20 ans après la création d’un premier fonds durable à l’intention de son marché domestique, Liontrust lance le 13 octobre un nouveau portefeuille multi-actifs similaire destiné aux investisseurs européens à quelques mois d’intervalle de l’obtention d’un prix Fund Manager of the Year Awards 2021 dans la catégorie des investissements durables. Peter Michaelis, avec la double casquette de gérant et responsable de l’équipe durable, répond aux questions d’Allnews à l’occasion du lancement du fonds. Entretien.

Dans la continuité de votre premier fonds durable lancé au Royaume-Uni en 2001, pouvez-vous revenir sur cette stratégie désormais disponible aux investisseurs européens?

L’objectif de notre stratégie multi-actifs est d’offrir des rendements supérieurs en investissant dans des sociétés durables. Son allocation est constituée d’environ 50% en actions mondiales et d'infrastructures et de 20% à 50% en obligations d'entreprise et d'État. Au travers de 21 thèmes d'investissement, le portefeuille cherche à identifier les tendances de croissance qui façonneront l'économie durable de demain.

Selon votre track record de performance, les investissements durables surperforment-ils réellement les placements traditionnels?

Selon nos benchmarks sur l’industrie et vis-à-vis de nos pairs, nos fonds durables surperforment ceux non durables sur un horizon de quelques années. A l’instar de toutes les stratégies, ils enregistrent également des creux lors des rallyes de marché comme ceux de 2012 et 2016, ou lors du rebond au premier trimestre de cette année. Dans cette configuration de marché, les actions de valeur reprennent le dessus tandis que notre stratégie se concentre sur les titres de croissance et de qualité.  Mais cette dernière a l’avantage d’inclure une poche de crédit qui assure un rendement stable lors des phases de marché volatil.

La base de notre processus consiste à identifier les thèmes durables et positifs qui incluent par exemple l’énergie renouvelable.
Pourquoi avoir attendu aujourd’hui pour lancer ce fonds?

C’est n’est que durant ces quatre dernières années que les actifs sous gestion de notre premier fonds durable ont marqué une nette progression. Aujourd’hui, notre équipe d’investissement durable gère plus de 17 milliards de francs à travers une gamme de fonds qui couvre toutes les classes d’actifs. Nous avions déjà une présence en Europe avec un fonds d’actions pan-européennes, un fonds d’actions globales et un fonds d’obligations d’entreprises européennes. Ce nouveau portefeuille – qui se veut moins risqué que les stratégies d’actions pures – vient s’ajouter à notre gamme pour l’Europe.

Dans un contexte de gestion multi-actifs, comment vous conformez-vous totalement à l’article 9 des Sustainable Finance Disclosure Regulation (SFDR) de l’Union Européenne?

La base de notre processus consiste à identifier les thèmes durables et positifs qui incluent par exemple l’énergie renouvelable, l’alimentation saine, la santé, la sécurité numérique, en plus de nos engagements envers des sociétés pour qu’elles accomplissent leur transition avec succès.

Prenons l’exemple des obligations gouvernementales, comment passent-elles les tests de l’article 9?

Les obligations dans lesquelles nous investissons doivent atteindre des critères minimums et actuellement, nous n’avons que de la dette européenne, américaine ou anglaise. L’on peut débattre de la façon dont ces pays dépensent leur budget, mais leurs obligations s’apparentent davantage à des instruments financiers qui complètent notre vaste exposition d’actions ou d’obligations dans des sociétés durables.

Si il est difficile d’anticiper les leaders de demain dans le segment de véhicules électriques, nous pouvons déjà identifier les entreprises qui bénéficieront de la tendance.
Pouvez-vous nous donner un aperçu de quelques expositions en actions ou obligations d’entreprises durables?

Sous l’angle de l’amélioration de la productivité, la construction traîne derrière les autres secteurs. Pour y remédier, nous avons investi dans Autodesk, la société de logicielle dominante qui a contribué à de belles améliorations dans l’industrie de la construction. Dans la même logique d’idées, nous nous sommes intéressés au secteur de la santé qui pèse 16% du PIB. Il dépend soit de capacité des entreprises à offrir le même résultat avec davantage d’efficacité ou soit d’innover. Intuitive Surgical fabrique des robots qui permettent d’opérer à distance avec précision. Leurs machines ont raccourci la durée des interventions, ce qui en fin de compte coupe les coûts finaux de la santé. Si il est difficile d’anticiper les leaders de demain dans le segment de véhicules électriques, nous pouvons déjà identifier les entreprises qui bénéficieront de la tendance, comme Infineon, qui fabrique des puces à l’intention de cette industrie en expansion. Enfin, nous sommes également exposés au secteur financier via Zurich Assurance qui joue un rôle positif au sein de la société. Du côté obligataire, nous avons des titres de la société danoise Orsted – le plus grand développeur d’énergie éolienne côtière –,  qui mène sa transition carbone neutre avec succès.

Dans les infrastructures, une classe d’actifs à mi-chemin entre les actions et le crédit, quelle société appréciez-vous?

Pensée pour générer un rendement lié à l’inflation de 6 à 8% par an, la classe d’actifs offre de belles opportunités comme la société Aquila Renewable Energy dans l’énergie solaire et éolienne.

Quel est votre regard sur le futur de la finance durable?

Nous sommons à l’avénements de la croissance des investissements durables. Après de longues années de résistance à l’égard de ce type de placements, les experts en parlent réellement depuis cinq ans. Nous voyons actuellement sur le marché une multitude de produits de qualité variable mais j’accueille les SFDR avec enthousiasme dans leur tentative de mesurer la qualité des produits. Comme mot de la fin, il est bon de souligner que la finance durable ne fonctionnera pas tant que les Etats ne dirigent pas leur économie vers le durable.

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