La croissance est toujours là

Yves Hulmann

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Selon Paul Jackson d’Invesco, il y a un décalage entre la récente performance négative des marchés et la réalité des données économiques.

Paul Jackson, responsable de la recherche multi-actifs (Head of multi-asset research) chez Invesco, livre ses impressions à propos de la récente correction des marchés et explique pourquoi il s’attend à ce que le marché des ETF continuera de se diversifier.

Le quatrième trimestre s’achève comme celui qui aura enregistré la performance la plus négative en 2018 pour les principaux indices boursiers. Y a-t-il des chances que la tendance s’inverse ces prochains mois?

Je m’efforce de comprendre la faiblesse actuelle des marchés. Il y a un très grand contraste entre, d’un côté, les peurs liées aux tensions commerciales entre les Etats-Unis et la Chine ainsi que, de l’autre, la réalité des données économiques publiées ces dernières semaines.

Le marché réagit de manière
très émotionnelle.
Qu’en est-il de l’évolution des données économiques?

Par exemple, l’indice ISM manufacturier continue de progresser aux Etats-Unis. Les exportations des Etats-Unis vers le reste du monde, tout comme celles de la Chine vers le reste du monde, progressent toujours également. La croissance est toujours là. En observant les données réelles, je ne vois pas de raison fondamentale pouvant justifier l’ampleur de la récente correction des marchés. Le marché réagit de manière très émotionnelle.

Le ralentissement de l’économie en Chine est toutefois attesté par des chiffres récents, notamment des ventes de détail et une production plus faibles qu’attendu.

Il y a eu certains signes de faiblesse en Chine mais l’économie chinoise continue de croître à un rythme non négligeable. Il y a une réponse passablement émotionnelle des marchés, un peu comme durant les mois d’août et septembre 2015 ou encore en janvier 2016, par exemple.

La nervosité des investisseurs reste élevée – l’indice VIX peine à redescendre à ses niveaux de fin 2017. N’est-ce pas un signe qu’il faut continuer de compter avec la poursuite de turbulences sur les marchés?

La volatilité est un symptôme du sentiment qui règne sur les marchés. Historiquement, le meilleur moment pour acheter sur le marché est souvent lorsque la volatilité est élevée. Globalement, la volatilité évolue avec le cycle économique. Lorsque le cycle économique est fort, la volatilité mesurée par l’indice VIX est basse. Lorsqu’il est faible, la volatilité augmente.

La plus grande surprise a été la faiblesse
des économies de l’UE cette année.
Il n’y a donc pas de signes d’une récession à l’horizon?

Non, car avant qu’une récession ne survienne, on observe généralement une baisse du profit des entreprises ou des dépenses d’investissement. Or, ce n’est pas le cas actuellement.

Si les marchés devaient évoluer de manière latérale pendant de longs mois, cela signifierait-il la fin de la période dorée pour la gestion passive?

On ne peut pas opposer gestion active et passive de manière trop schématique. Aujourd’hui, gestion active et passive ont toutes deux un rôle à jouer dans la composition d’un portefeuille. On peut aussi observer qu’en termes de parts de marché, la part de la gestion passive en Europe reste loin derrière celle des Etats-Unis.

On a observé une diversification croissante des ETF proposés sur le marché, avec des produits dédiés à des thèmes d’investissement parfois très spécifiques. Ne va-t-on pas revenir vers des produits plus simples?

Non. On va plutôt continuer d’assister à une prolifération de différentes catégories d’ETF, aussi avec des ETF gérés activement. Il est parfaitement possible d’avoir sur le marché à la fois des ETF gérés passivement et d’autres activement. Je ne crois pas que l’industrie des ETF ait épuisé sa créativité pour proposer de nouveaux produits!

Quelles sont vos attentes pour les principales économies mondiales en 2019?

Si l’on revient brièvement à 2018, la plus grande surprise a été la faiblesse des économies de l’UE cette année. En 2019, la croissance du PIB mondial sera un peu plus faible avec un taux de croissance d’environ 3%, contre 3,5% estimé pour 2018. L’économie américaine va décélérer quelque peu. En se basant à la fois sur l’évolution des bénéfices des entreprises et des dividendes, le Japon présente à mon avis les meilleures perspectives pour l’année à venir. L’économie chinoise est, elle, dans un mouvement de décélération mais ses taux de croissance restent élevés malgré tout. Dans l’ensemble, la croissance de l’économie mondial se poursuivra – il y a donc de la place pour un rebond non négligeable des marchés.