Immobilier indirect: tant qu’il y a du rendement

Philippe Gabella, BCV

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Frénésie de la titrisation immobilière et hausse des taux, ce cocktail favorise la volatilité des fonds immobiliers suisses.

 

Alors que le marché de l’immobilier direct se tasse depuis quelques années, le marché de l’immobilier indirect continue de progresser. Qu’en sera-t-il dans un environnement de hausse des taux?

L’indice phare des fonds immobiliers en Suisse, SXI Real Estate Fund Index, a progressé de 15,1% ces cinq dernières années en termes de prix (+2,9% annualisé) et de 32,7% si l’on inclut les dividendes (+5,8% annualisé). Le marché des fonds et des sociétés immobilières cotées continue de croître de manière substantielle en termes de taille également avec une augmentation de la capitalisation boursière de plus de CHF 5 milliards l’année dernière. En incluant leur endettement, la valeur totale du secteur  avoisine CHF 78 milliards d’immeubles répartis dans 45 véhicules d’investissement (fonds et sociétés). Rien qu’en 2017, pas moins de quatre nouveaux fonds sont entrés dans l’indice SIX Real Estate Fund, un record. L’année 2018 s’annonce de la même veine, avec pas moins de dix véhicules immobiliers qui ont d’ores et déjà annoncé une augmentation de capital et deux fonds qui ont prévu leur cotation à la bourse suisse.

«Les dividendes provenant
des loyers demeurent solides.»
Des dividendes recherchés

Pourquoi cet engouement pour l’immobilier indirect? Plusieurs facteurs expliquent cette situation. Le plus important est à chercher du côté des marchés financiers. Les classes d’actifs de rendement traditionnelles, telles que les obligations, offrent des taux extrêmement bas, voire négatifs pour les émetteurs de meilleure qualité. Les investisseurs se tournent donc vers l’immobilier de rendement qui offre encore des rendements positifs. Dans le contexte macroéconomique actuel, les prix immobiliers ne sont certes plus orientés à la hausse, mais les dividendes provenant des loyers demeurent solides. Dans un marché où la compétition est forte pour l’acquisition d’immeubles de rendement – où donc la marge de manœuvre en cas d’erreur ne pardonne pas –, le recours à des gérants professionnels augmente tant de la part des investisseurs privés qu’institutionnels. De plus, les portefeuilles immobiliers offrent une diversification bienvenue dans le cadre d’une stratégie de rendement.

Le corollaire de cet engouement est l’augmentation de la volatilité, notamment pour les fonds immobiliers. Les investisseurs obtiennent ainsi actuellement un rendement du dividende attractif, légèrement inférieur à 3% par an, mais les fluctuations de cours sont plus importantes qu’auparavant. Le comportement de l’indice des fonds immobiliers durant l’année 2017 en est une parfaite illustration: il a d’abord augmenté de plus de 8% jusqu’à l’été avant de passer en territoire négatif courant novembre pour finalement terminer l’année 2017 à +6,6%.

«Les fonds immobiliers offrent
un coussin de rendement non négligeable.»
Comparaison avec le Confédération à 10 ans

Avec la tendance à la hausse des taux, les investisseurs devraient logiquement perdre de leur appétit pour l’immobilier côté. Cependant, le rendement du dividende que délivre actuellement l’immobilier indirect est largement supérieur à celui, par exemple, du rendement de l’obligation de la Confédération à 10 ans. Historiquement, l’indice des fonds immobiliers affiche un peu plus de 1% de rendement supplémentaire à cette obligation, alors qu’actuellement ce rendement supplémentaire est largement supérieur à plus de 2,5%. En d’autres termes, les fonds immobiliers offrent un coussin de rendement non négligeable. Pour retrouver un niveau proche de la moyenne historique, le rendement de l’obligation Confédération à 10 ans devrait repasser en dessus de 1,5% de rendement. Or, il évolue actuellement autour de 0,1%. Sans mouvement haussier substantiel, l’immobilier indirect demeure donc attractif, mais requiert une certaine tolérance au risque, comme l’illustre une performance négative (-2,1%) sur les deux premiers mois de l’année.

Pour 2018, notre scénario central prévoit une légère hausse de taux, mais pas une hausse suffisante pour provoquer un tsunami sur les fonds immobiliers. Nous prévoyons une performance de l’indice des fonds en dessous des résultats de ces dernières années, mais toujours en territoire légèrement positif aux alentours de 2% à 3%.