Credit Suisse remanie sa direction après les récentes affaires

AWP

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Le chef de la banque d’affaires Brian Chin et la responsable du risque et de la conformité Lara Warner vont quitter leur poste. La banque annonce une perte avant impôts de 900 millions au 1er trimestre.

La débâcle du fonds spéculatif américain Archegos va coûter cher à Credit Suisse. Le numéro deux bancaire helvétique évoque mardi une charge de 4,4 milliards de francs qui va provoquer une perte avant impôts de 900 millions au premier trimestre. Face à un impact financier de cette ampleur, le conseil d’administration a sévi, congédiant deux membres de la direction générale et privant le président Urs Rohner de sa rémunération fixe, notamment.

Le géant bancaire zurichois semble avoir pris la mesure des affaires qui l’empoisonnent depuis quelques semaines, à savoir l’écroulement d’Archegos mais également la faillite de la société d’investissement britannique Greensill. Cité dans un communiqué, le directeur général de Credit Suisse Thomas Gottstein qualifie la perte de 4,4 milliards d’«inacceptable». «Des leçons sérieuses seront tirées» des deux récentes affaires, promet-il.

En attendant, des premières têtes sont tombées dans les hautes sphères de l’établissement zurichois. Lara Warner, responsable du risque et de la conformité, ainsi que Brian Chin, en charge de la banque d’affaires, ont été priés de faire leurs cartons.

Dans un commentaire, la banque Mirabaud rappelle que ces deux dirigeants avaient été les principaux bénéficiaires de la réorganisation voulue par le nouveau patron Thomas Gottstein début 2020. Lara Warner a obtenu la haute main sur toutes les opérations de contrôle du groupe, tandis que Brian Chin a hérité d’une nouvelle banque d’affaires fusionnée.

Conséquence des affaires Archegos et Greensill, Credit Suisse a décidé de séparer les fonctions de contrôle du risque et de conformité. La première a été confiée à titre intérimaire à Joachim Oechslin, rappelé au poste de directeur du risque assumé entre 2014 et 2019. Il est actuellement secrétaire général et conseiller senior auprès de la direction générale. Le chef juridique de la banque universelle helvétique de Credit Suisse, Thomas Grotzer, a été nommé responsable de la conformité, également par intérim.

Christian Meissner a quant à lui repris la tête de la division de banque d’affaires du groupe. Il codirigeait jusqu’ici l’activité de conseil banque d’affaires auprès de la division de gestion de fortune internationale de Credit Suisse.

Actionnaires et dirigeants au régime

Le conseil d’administration de la banque aux deux voiles semble avoir pris en considération les critiques émises par des actionnaires, principalement Harris Associates, autour de la rémunération des responsables. Soumis à une forte pression, le président Urs Rohner fera l’impasse sur sa rémunération fixe de 1,5 million de francs au titre de 2020. La proposition de bonus pour les membres de la direction générale est par ailleurs retirée de l’ordre du jour de l’assemblée générale du 30 avril.

Les actionnaires seront également mis au régime, en témoigne un dividende proposé réduit à 0,10 franc par action, contre 0,2917 franc précédemment. Credit Suisse a également décidé de suspendre son programme de rachat d’actions pour 2021, doté de 1,5 milliard de francs.

La grande banque annonce par ailleurs deux enquêtes internes autour de la débâcle des fonds Greensill et du fonds spéculatif Archegos, mais confiées à des auditeurs externes. En attendant les résultats de ces investigations, le conseil d’administration propose de retirer de l’ordre du jour de l’assemblée le point sur la décharge à la direction et aux administrateurs.

La semaine dernière, Credit Suisse avait annoncé une perte «très importante et matérielle pour (ses) résultats du premier trimestre». Archegos est un fonds spéculatif américain ayant fait défaut dans lequel la grande banque était engagée. Début mars, la faillite de Greensill avait forcé le numéro deux bancaire helvétique à procéder au remboursement de quelque 10 milliards de dollars (9,4 milliards de francs) placés dans des fonds liés.

Malgré ces affaires, la capitalisation de la grande banque devrait rester plus ou moins dans les clous. Les ratios de fonds propres durs et d’endettement Tier 1 sont attendus «au moins» à respectivement 12% et 5,4% au premier trimestre. Les résultats au premier trimestre seront publiés le 22 avril.

Il aura suffi d’une nouvelle affaire pour ruiner les efforts de Credit Suisse, déplore la Banque cantonale de Zurich, par la plume de son analyste Michael Kunz. La performance opérationnelle du numéro deux bancaire s’annonce excellente entre janvier et mars, mais elle sera plombée par la charge susmentionnée. Du côté de Vontobel, on souligne que le dégât d’image causé à la grande banque est à ce jour difficile à estimer.

Malgré les tumultes, l'action Credit Suisse se maintenait, engrangeant 0,8% à 10,24 francs vers 13h40. Le SMI prenait 0,83%.

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