Actions au porteur: la Suisse pourrait être sur une liste noire de l’UE

AWP

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Pour le Parlement européen, la liste des Etats à haut risque établie par le Gafi pour le domaine du blanchiment d’argent n’est pas assez stricte.

La commission européenne devrait publier encore en janvier une liste d’Etats tiers dont les règles en matière de blanchiment d’argent ne satisfont pas à ses exigences. La Suisse pourrait y figurer notamment à cause de ses actions au porteur.

Jusqu’à présent, l’UE reprenait la liste des Etats à haut risque établie par le «Groupe d’action financière» (Gafi) pour le domaine du blanchiment d’argent. Celle-ci traitait surtout de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

Mais la liste du Gafi est relativement courte. Sur la dernière, publiée en octobre 2018, seuls onze Etats y figurent parmi lesquels le Botswana, le Yémen ou le Pakistan. La Serbie est l’unique Etat européen mentionné.

Pour le Parlement européen, cette liste n’est pas assez stricte. Il veut une liste propre. Et la commission a été chargée de cette tâche.

Registre obligatoire

Il n’est pas encore connu si la Suisse sera répertoriée sur la nouvelle liste. Mais elle est depuis longtemps critiquée pour ses actions au porteur par l’UE et par le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales.

Alors que les bénéficiaires des actions nominatives sont connus, ce n’était auparavant pas le cas pour les actions au porteur: les actionnaires restaient anonymes, ce qui favorisait la fraude fiscale.

Sur la base des critiques du Forum mondial, la Suisse a effectué des adaptations en 2015 et a augmenté la transparence: les acheteurs d’actions au porteur d’une société qui n’est pas cotée en bourse doivent annoncer leur acquisition au préalable et s’identifier. La société est obligée de tenir un registre.

Nouvelle critique

Dans le dernier rapport du Forum mondial en 2016, la Suisse a obtenu la note globale de «largement conforme», écrivait le Conseil fédéral dans son message. Toutefois, le Forum mondial soulevait quelques critiques. Il reproche notamment au droit suisse de ne demander une identification des détenteurs d’actions au porteur que lorsqu’ils veulent faire valoir leurs droits envers l’entreprise.

Afin que la Suisse ne glisse pas dans les évaluations du Forum mondial, le Conseil fédéral a réagi. Il a adopté en novembre dernier un projet de loi qui tient compte des critiques.

Concrètement, le gouvernement propose la suppression des actions au porteur pour les sociétés non cotées en bourse. Une alternative serait de transformer les actions au porteur en titres intermédiés. Ces derniers sont déposés auprès de banques qui connaissent l’identité des propriétaires.

Frais supplémentaires

L’avenir dira si les efforts de la Suisse pourront convaincre la commission européenne. Mais, si elle apparaissait sur la liste noire, elle ne risque pas de sanctions. Toutefois, cela aurait des conséquences négatives.

Les instituts financiers des Etats européens seraient tenus de réaliser une «Due Diligence» auprès des clients suisses. Les banques de l’UE devraient ainsi contrôler de manière plus stricte leurs relations avec la Suisse ou clarifier de manière plus approfondie le contexte des transactions.

Ces clarifications supplémentaires causent des coûts de compliance plus élevés et les clients suisses pourraient ne plus être aussi intéressants pour certains instituts financiers. Pour les clients, les relations d’affaires avec les instituts européens pourraient devenir plus compliquées et plus chères.

En janvier déjà

Il est probable que la commission publie sa liste en janvier. Si cela est le cas, les pays de l’UE devront encore avaliser la proposition de Bruxelles. La procédure est écrite. Si les pays membres ne déposent pas d’opposition dans un délai imparti, la nouvelle liste est automatiquement mise en vigueur.

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