Un portefeuille aux revenus durables face à des statistiques US floues

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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Il semble opportun d’engranger les rendements des obligations de qualité, avec de possibles plus-values en cas de baisse des rendements obligataires mais aussi pour se diversifier contre les risques.

©Keystone

 

Les arguments en faveur d’une bonne tenue de la croissance aux Etats-Unis restent convaincants. L’indice ISM manufacturier – une enquête de conjoncture phare auprès des industriels américains – est ressorti à 50,3 points en mars, contre 47,8 en février alors que le marché tablait sur un simple frémissement à 48,3 points. C’est la première fois depuis septembre 2022 que cet indice repasse au-dessus du seuil des 50 points qui sépare la contraction de l’expansion.

Des attentes revues à la baisse

Ce regain de confiance dans le secteur manufacturier a amené les investisseurs à revoir à la baisse leurs attentes concernant la baisse des taux d’intérêt de la Réserve fédérale cette année. Le rendement des bons du Trésor américain à dix ans a augmenté de 11 points de base pour atteindre 4,32%. Par ailleurs, le dollar s’est apprécié par rapport aux devises des principaux partenaires commerciaux des Etats-Unis. Il est à son plus haut niveau depuis novembre 2023.

Les différentes composantes de l’indice ISM sont, pour la plupart, ressorties à un bon niveau, notamment celles de la production (54,6 contre 48,4 en février) et des nouvelles commandes (51,4 contre 49,2) qui indiquent toutes deux une expansion. La composante des prix payés a atteint son niveau le plus élevé depuis juillet 2022. Ce pic douche quelque peu l’espoir d’une baisse des prix des biens qui entretiendrait la décrue de l’inflation globale (du moins en ce qui concerne les prix de détail) dans les mois à venir.

Mais optimisme de mise

Compte tenu de l’augmentation assez substantielle de la composante de la production et des déclarations globalement empreintes d’optimisme des répondants à l’enquête, on peut s’attendre à un certain redressement de la production manufacturière américaine dans les mois à venir.

Toutefois, d’un point de vue économique, il convient de relativiser l’importance d’un PMI légèrement supérieur à 50 et non plus légèrement inférieur à 50. D’autres indicateurs économiques phares comme l’indice ISM pour le secteur des services et les chiffres de l’emploi publiés en fin de semaine permettront d’évaluer la santé globale de la principale économie au monde.

Quoiqu’à relativiser

Il est toujours probable que la croissance de l’économie américaine fléchira pour atteindre un rythme plus durable dans un contexte de prix et de taux d’intérêt élevés, et que l’inflation retombera au fil des mois. La semaine dernière, l’indice des dépenses personnelles de consommation (PCE) a mis en évidence une atténuation de la pression sur les prix.

L’inflation sous-jacente, mesurée par «l’indice core PCE» qui exclut les prix de l’alimentation et de l’énergie, est tombée à 0,3% sur un mois en février, contre 0,5% en janvier. Le président de la Réserve fédérale, Jerome Powell, a estimé que les chiffres étaient «conformes à ce que nous aimerions voir».

Dans l’attente de la Fed

Il semble que la Fed trouvera suffisamment de signes probants de ralentissement de l’inflation et de détente du marché du travail pour commencer à baisser ses taux vers le milieu de l’année. La Banque centrale européenne devrait baisser ses taux à peu près au même moment, emboîtant ainsi le pas de la Banque nationale suisse qui les a baissés le mois dernier.

La baisse des taux d’intérêt signifie que le rendement des liquidités est amené à diminuer progressivement, ce qui crée un risque pour les investisseurs qui ne gèrent pas leurs liquidités de manière proactive.

Trois stratégies à envisager

Outre les dépôts à terme conjugués à un portefeuille d’obligations à échéances échelonnées et à certaines stratégies sur produits structurés, les investisseurs axés sur le revenu peuvent tirer un rendement durable de leurs portefeuilles de plusieurs façons:

1. Acheter des obligations de qualité

Compte tenu de la solide croissance économique et de l’inflation marquée, les rendements obligataires sont restés élevés ces derniers mois mais le rendement des bons du Trésor américain à dix ans devrait retomber à 3,5% d’ici la fin de l’année.

Par conséquent, le moment semble bien choisi pour engranger les rendements des obligations de qualité, avec de possibles plus-values à la clé en cas de baisse des rendements obligataires, mais aussi pour diversifier les portefeuilles contre les risques.

On peut également s’intéresser aux obligations durables ainsi qu’aux stratégies obligataires à gestion active, qui permettent d’investir dans tous les segments du marché obligataire sous la houlette de professionnels qui contrôlent la prise de risque.

2. Améliorer le rendement grâce aux devises

Pour les investisseurs qui ont la volonté et la capacité d’utiliser des options de change, il est possible de dégager des revenus en yen japonais et en dollar australien. Le yen s’est déprécié malgré la décision de la Banque du Japon de rompre avec sa politique de taux d’intérêt négatifs et de contrôle de la courbe des taux car le dollar américain reste fort.

Néanmoins, le rebond du taux de change USDJPY devrait se heurter à un certain nombre d’obstacles, notamment le regain d’inquiétude des responsables, le positionnement vendeur très marqué sur le yen et la possibilité d’une nouvelle hausse des taux de la Banque du Japon d’ici quelques mois. Les investisseurs peuvent donc envisager de vendre le risque de poursuite de la hausse de la paire USDJPY en échange d’une prime.

Par ailleurs, le dollar australien reste attrayant car il est fort probable que la Reserve Bank of Australia sera l’une des dernières grandes banques centrales à baisser ses taux d’intérêt.

3. Vendre le risque de baisse du prix du Brent

Le marché du pétrole devrait rester déficitaire grâce à la bonne tenue de la demande de pétrole et à la diminution de l’offre des pays de l’Opep+. Ce contexte se prête bien à la vente du risque de baisse du cours du baril de pétrole brut Brent. Les investisseurs qui mettent davantage l’accent sur l’appréciation de leur capital et sont davantage disposés à prendre des risques peuvent aussi s’exposer à des contrats à terme sur le baril de Brent à échéance plus lointaine. 

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