Les marchés émergents prêts à offrir des rendements élevés en 2024

Carlos de Sousa, Vontobel Asset Management

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Notre scénario d’atterrissage en douceur mondial serait positif pour les obligations en monnaie forte et en monnaie locale des pays émergents.

© Keystone

 

Les émetteurs souverains et privés en monnaie forte verraient leurs rendements diminuer parallèlement aux taux du Trésor US et pourraient connaître une certaine compression des spreads en l’absence de récession. Dans le cas d’une légère récession aux USA, nous pensons que les spreads des pays émergents resteront stables, comme pour les spreads des obligations High Yield en Europe, en dépit de la contraction économique en cours, mais sans crise dans la zone euro.

Le ralentissement économique attendu sur les marchés développés est aussi susceptible d’affecter de nombreux grands marchés émergents en 2024, les effets différés de la politique monétaire restrictive continuant à se faire sentir. Dans un univers d’investissement de 80 pays, il y a des exceptions, et quelques pays, comme l’Inde, connaîtront une croissance relativement rapide. Contrairement aux marchés développés, où les réductions de taux devraient débuter vers mi-2024, de nombreuses banques centrales des pays émergents réduisent leurs taux depuis plusieurs mois. C’est particulièrement vrai en Amérique latine et en Europe de l’Est, où les hausses de taux ont commencé plus tôt et où les effets d’une politique monétaire restrictive se sont fait sentir sur l’économie et la dynamique de l’inflation. Selon nous, les banques centrales des marchés émergents poursuivront leur cycle d’assouplissement progressif tout au long de l’année 2024, ce qui devrait soutenir les obligations en monnaie locale et alléger les conditions de financement local pour les sociétés émettrices, qui peuvent également se refinancer sur leurs marchés de la dette intérieurs.

Les émetteurs «investment grade» sont généralement considérée comme le segment du marché qui bénéficie le plus de la baisse des taux sur les marchés développés.

Les banques centrales des pays émergents n’ont pas besoin de suivre la Fed

Certains pourraient craindre la réduction des taux des banques centrales des pays émergents avant la Fed, pénalisant ainsi les monnaies des pays émergents et d’altérer le sentiment à l’égard de la classe d’actifs. Cela a été le cas lors du cycle de hausse de la Fed en 2018, lorsque plusieurs banques centrales des pays émergents ont refusé de suivre la Fed. Mais les obligations en monnaie locale des pays émergents ont généré des rendements d’env. 10% depuis le début de l’année, ce qui montre que les banques centrales des pays émergents n’ont pas besoin d’évoluer au même rythme que la Fed pour que la classe d’actifs soit performante. En 2018, de nombreux pays émergents avaient une faible inflation et ne se souciaient pas de la stabilité de leur taux de change, d’où leur refus de suivre la Fed. Les pays émergents qui ont procédé à des hausses agressives en 2021 et 2022 réduisent leurs taux, mais à un rythme prudent. L’inflation dépassant toujours l’objectif fixé, les autorités savent qu’une réduction agressive entraînerait des pressions sur le marché des changes. Les banques centrales des pays émergents devraient rester prudentes, au moins jusqu’à ce que la Fed commence ses réductions, ce qui devrait continuer à soutenir les obligations en monnaie locale des pays émergents.

De nombreux émetteurs HY des pays émergents retrouveront l’accès au marché

Les émetteurs «investment grade» sont généralement considérée comme le segment du marché qui bénéficie le plus de la baisse des taux sur les marchés développés, en raison de leur corrélation plus élevée avec les bons du Trésor US. Cependant, au vu de la baisse des rendements des bons du Trésor US, de nombreux émetteurs High Yield devraient retrouver l’accès au marché dans le courant des douze prochains mois, créant ainsi un cercle vertueux puisque la crainte de défaillance ne serait plus d’actualité. Nous restons positifs à l’égard d’un groupe HY sélectionné présentant un faible risque de défaillance à court terme.

Depuis la pandémie, le cycle de défaillance des marchés émergents a des années d’avance sur celui des marchés développés, et pas de manière satisfaisante jusqu’à présent. Les défaillances surviennent en général au début d’une crise, lorsque les entreprises et les États souverains voient leurs revenus chuter de façon spectaculaire. La Covid et la guerre en Ukraine ont déclenché de graves crises dans de nombreux pays, entraînant des taux de défaillance élevés au cours des quatre dernières années. Pour les pays qui ont réussi à éviter le défaut de paiement jusqu’à présent, cela n’a aucun sens de le faire maintenant que la crise est terminée.

Des rendements prometteurs pour les marchés émergents

L’ensemble des obligations des pays émergents a subi des sorties de capitaux de 120 milliards USD ces deux dernières années, et si une partie revenait, nous pourrions voir une nouvelle compression des spreads et à des gains sur le marché des changes des pays émergents. Comme pour les marchés développés à haut rendement, le principal risque serait la matérialisation d’un ralentissement plus sévère qui pourrait entraîner un élargissement des spreads. Là encore, le coussin de portage est si élevé qu’il faudrait un choc négatif très important pour aboutir à des rendements négatifs. Dans un scénario de récession sévère où les rendements du Trésor US pourraient chuter de 200 pb, par exemple, il faudrait que les spreads souverains des pays émergents s’élargissent de plus que 300 pb et les spreads des entreprises des pays émergents de 350 pb pour que les rendements soient négatifs. Des épisodes aussi spectaculaires d’élargissement des spreads se sont produits pendant la crise financière mondiale et la pandémie de grippe aviaire, mais ils se sont avérés plutôt brefs.

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