Le point sur les marchés des dettes subordonnées - juillet 2023

La Française AM

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Le fait marquant du mois fut la réouverture du marché primaire des AT1, trois mois après la dépréciation totale des titres de Credit Suisse, grâce à un redressement progressif des valorisations depuis lors.

1/ Environnement de marché

Le mois de juillet a été très positif pour les marchés de dettes subordonnées, et plus particulièrement pour les AT1 CoCos, qui ont vu leurs indices s’apprécier de +3,4% pour l’iBoxx EUR et de 3,1% pour l’indice en USD. Les autres segments ne sont pas en reste, avec une progression de +1,6% pour les dettes Tier 2 bancaires, de +1,4% pour les dettes Corporate Hybrids non-financières et de +1,2% pour les dettes subordonnées d’assurance. Tous ces gisements ont surperformé l’indice iBoxx EUR High Yield, qui a obtenu une performance de +1,0% sur le mois. Cette performance signale une meilleure résilience face à un environnement de taux toujours très volatil, et ce dans un environnement macroéconomique en demi-teinte, mais porté par une saison de résultats positive sur le secteur bancaire.

 Nous sommes tentés d’expliquer la surperformance relative des AT1 par les facteurs suivants: (i) leur décote en prix (et surcote en rendement) par rapport aux obligations du segment High Yield, (ii) la réouverture du marché primaire et plusieurs annonces de calls de titres en circulation, qui ont provoqué un rallye de titres à échéances courtes traitant en dessous du pair et un rattrapage général des prix sur les courbes des émetteurs. Abanca, la banque non-cotée espagnole a par exemple refinancé son titre AT1 €7,5% callable en octobre de 250 millions d'euros (avec un reset spread de 733bp) par un titre d’un montant équivalent portant un coupon de 10,625% (soit un reset spread de 764bp) callable dans 5 ans et demi. L’émetteur a en parallèle lancé une offre de rachat sur le titre callable prochainement au pair afin d’éviter de payer une double charge en intérêts. Cela a provoqué un rallye d’environ 2 points sur le titre existant afin de le rapprocher de sa valeur de remboursement.

Cette tendance à émettre un nouveau titre tout en effectuant une offre de rachat sur le titre callable prochainement s’est largement généralisée pour les émetteurs de second rang ces derniers temps, que ce soit sur les AT1, les Tier 2 bancaires ou les Corporate Hybrids, et devrait se poursuivre selon nous afin de diminuer les incertitudes autour des exercices de calls. Les grandes banques européennes, qui opèrent généralement avec des coussins de dettes AT1 en excès, peuvent quant à elles se permettre d’éviter cela, puisqu’elles peuvent obtenir l’autorisation de rembourser leurs titres sans les refinancer immédiatement au préalable. Les banques BBVA, CaixaBank et Barclays ont annoncé à ce titre le remboursement à venir en septembre de leurs AT1 respectives, ce qui a conforté le marché dans cette dynamique. Santander fait exception pour le moment, avec son AT1 €5,25% callable le 29 septembre, et qui traite vers 98.5% (prix indicatif en fin de mois), signe que les marchés sont circonspects quant à la volonté de Santander de refinancer ce titre, étant donné leur historique de non-call sur la classe d’actifs.

La saison de résultats du T2 2023 a été très satisfaisante pour les banques européennes, avec des résultats nets d’intérêts en croissance grâce aux taux plus élevés et des rémunérations des dépôts qui ne sont pas réévaluées aussi rapidement, des ratios de créances douteuses stables, voire en baisse (bien que les prêts sous surveillance, dits «Stage 2», demeurent à des niveaux plus élevés que la normale, notamment pour les banques irlandaises), et des ratios de solvabilité plutôt stables ou en légère croissance dans leur ensemble. Bien que les marchés de crédit soient peu sensibles à la dynamique de rentabilité des banques européennes sur leurs marges nettes d’intérêts, nous signalons que plusieurs éléments pourraient affecter celles-ci durant les trimestres à venir: (i) la nécessité de mieux rémunérer les dépôts, (ii) des pressions politiques sur les taux accordés sur les prêts ou sur leurs modalités de refinancement et (iii) la décision prise le 27 juillet par la BCE d’abaisser à 0% la rémunération des réserves minimums des banques auprès d’elle, ce qui aura un impact brut négatif de 6,2 milliards d'euros pour l’ensemble du secteur, ce qui reste facilement absorbable. Un dernier satisfecit sur la santé du secteur a été obtenu par les résultats des stress tests bancaires conduits par l’Autorité Bancaire Européenne (EBA), qui, dans leur ensemble, démontre de la meilleure résilience du secteur à de gros chocs macroéconomiques, et ce particulièrement pour les banques dites de «pays périphériques», dont la santé bilancielle continue de s’améliorer très nettement. Ces stress-tests n’ont néanmoins peu de valeur en soi et sont sujets à des biais importants, notamment dans le traitement des résultats banque par banque.

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