La décennie de la finance décentralisée (DeFi)

Albert Dessaint, Blockchain Partner Suisse

2 minutes de lecture

Chronique blockchain. L’appréhension de la DeFi par les acteurs financiers traditionnels est une question de survie.

Dans ma chronique du mois d’octobre, je définissais ce qu’était la finance décentralisée - une alternative au système bancaire et financier traditionnel qui fonctionne sur la blockchain et utilise les cryptomonnaies pour réaliser diverses opérations financières. 
 
Chez Blockchain Partner, nous nous attendons à ce que cette finance «à l’ère d’Internet» accélère son développement et de par là même, son adoption, au cours de cette décennie. Devant les opportunités marché et les développements prometteurs des startups du secteur, de plus en plus d’acteurs traditionnels vont se rendre à l’évidence que la décentralisation offre des bénéfices qui ne peuvent être répliqués par une démarche centralisée. 

Un des bénéfices les plus importants de la finance décentralisée
vis-à-vis de la finance traditionnelle est d’ordre réglementaire. 

Un des bénéfices les plus importants de la finance décentralisée vis-à-vis de la finance traditionnelle est d’ordre réglementaire. J’ai pu m’en apercevoir lors de l’événement «Blockchain and the Future of Banking» organisé par la French Tech suisse romande en partenariat avec la Crypto Valley Association en novembre dernier. Une table ronde, animé par Jérôme Bailly, président du chapitre suisse romand de la Crypto Valley, réunissait un panel d’experts autour de la cryptofinance.

Au milieu des panélistes banquiers et ex-banquiers se tenait Thibault Sahaghian, CEO de Multis, start-up passée par les bancs du prestigieux incubateur Y Combinator avec une première levée de fonds en Seed de 145’000 francs suisses. Face aux autres acteurs du panel, Multis détonnait par ses ambitions d’être une crypto-banque de premier ordre alors même que ses «concurrents» ont reçu des investissements substantiels (Sygnum Bank a, par exemple, levé 60 millions de francs) et que Multis n’a pas été approuvé par la Finma, ni aucun autre régulateur d’ailleurs. 
 
Multis a choisi, à dessein, une approche à contre-courant de ses «concurrents». Son secret? S’appuyer sur la technologie des smart contracts - programmes autonomes hébergés et exécutés sur une blockchain – pour tirer parti d’un avantage compétitif.  

De fait, l’utilisation de smart contracts rend possible une auto-gestion des cryptomonnaies directement par l’utilisateur, ce qui apporte notamment des avantages intéressants en termes de réglementation: en effet, si vous n’avez pas la main sur les cryptomonnaies de vos utilisateurs, vos impératifs réglementaires fondent comme neige au soleil. En n’étant pas tiers de confiance mais en reposant sur une approche «trust by design», un acteur comme Multis n’a alors plus à se conformer aux différentes réglementations contraignantes auxquelles doivent se plier les prestataires de services d’investissement et peut directement proposer une plateforme globale accessible à tous selon les principes mêmes de la finance décentralisée. 

Les entreprises comme Multis peuvent concentrer l’ensemble
de leurs efforts sur la création de valeur pour leurs utilisateurs. 

Ainsi, les entreprises comme Multis n’ont aucunement besoin de mobiliser de ressources pour être en conformité réglementaire et peuvent donc concentrer l’ensemble de leurs efforts sur la création de valeur pour leurs utilisateurs. 
 
Bien évidemment, ce qui fait la force de la décentralisation est aussi son talon d’Achille. Que faire si l’utilisateur perd ou se fait voler ses clés? Que faire si un bug ou une faille de sécurité est découverte dans un smart contract et est exploité par une personne malveillante? Quand bien même l’industrie est à ses balbutiements, de premiers éléments de réponse existent: des solutions de récupération de clés sans tiers de confiance sont déjà disponibles, et des offres d’audit de smart contracts couplées à des assurances se développent rapidement, comme le montre la récente intégration de ChainSecurity - une société spécialisée dans l’audit de smart contracts – au sein des équipes de PWC Suisse. 

Ces dernières avancées dans l’industrie vont permettre de légitimer une pratique encore embryonnaire et favoriser son expansion au plus grand bénéfice des acteurs qui ont su être à l’écoute du marché et se concentrer sur la création de valeur pour leurs clients. 

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