Baselworld: le nouveau CEO programme la renaissance

Anna Aznaour

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Face aux départs de certains exposants et aux critiques acerbes, Michel Loris-Melikoff prépare la seconde vie de la foire centenaire.

Survivra, survivra pas? L’interrogation brûle toutes les lèvres et aiguise les appétits des concurrents. Il faut dire que la célèbre foire suisse de la joaillerie et de l’horlogerie de luxe est en pleine tourmente depuis bientôt trois ans. «Trop chère et pas assez rentable», lancent les marques qui la quittent, pendant que les critiques sur sa mauvaise gestion font rage dans la presse. Michel Loris-Melikoff, le nouveau CEO, fraîchement arrivé aux commandes d’un navire qui semble vaciller, n’est pourtant pas inquiet. Il a un plan. Plusieurs même pour éviter le destin du Titanic à la belle centenaire qui continue à faire des envieux loin à la ronde.

En juillet dernier, Swatch Group communiquait son départ de Baselworld. Que vous reproche Nick Hayek, son patron?

Le principal reproche de monsieur Hayek était que les exposants n’étaient pas suffisamment informés des changements qui s’annonçaient sur Baselworld. Par ailleurs, il estimait ne plus avoir besoin de cette foire comme plateforme de vente, dans la mesure où son groupe a d’autres canaux de distribution. Toutefois, ce n’est pas le premier départ de Swatch Group, et nous espérons voir, à nouveau, revenir cet exposant de taille après les métamorphoses de la manifestation que nous sommes en train de mettre en place. Il est à noter qu’à peu près toutes les foires enregistrent entre 5 et 15% de défections chaque année, remplacées par des nouveaux venus. Tout ceci est parfaitement normal. 

«L’écrasante majorité de nos exposants
considère Baselworld comme étant LA foire de référence.»
Est-ce que le Salon international de la haute horlogerie (SIHH) pourrait concurrencer Baselworld?

Non, clairement pas. Le SIHH a un segment bien défini qui couvre surtout le secteur de l’horlogerie. Tandis que Baselworld a un positionnement beaucoup plus large, et ce, non seulement dans l’horlogerie, mais également dans la joaillerie et les pierres précieuses. D’ailleurs, l’écrasante majorité de nos exposants considère Baselworld comme étant LA foire de référence, qui actuellement n’a pas d’équivalent. Par ailleurs, ce qui nous rend optimistes ce sont nos taux d’inscriptions pour 2019, qui n’ont absolument pas diminué après l’annonce de retrait du groupe Swatch, et se maintiennent au même niveau que l’année passée à cette même période. 

Comment expliquez-vous le désamour qui frappe actuellement les foires?

Il est certainement dû au format de ces événements, qui doivent s’adapter très vite aux changements technologiques et surtout aux nouvelles attentes des gens, qui évoluent tout aussi rapidement. Pour ma part, je ne crois absolument pas à l’idée que la digitalisation va remplacer un jour un salon comme le nôtre, ancré lui, dans le réel. D’abord parce que les gens ont besoin de se rencontrer en trois dimensions, et aussi de resauter sur place. Ensuite, nous travaillons avec des produits luxueux que les consommateurs ont besoin de voir dans la vie réelle, de toucher et d’essayer, avant de les acquérir. Sauf avis contraire, personne n’achète un bijou de 500'000 francs sur Internet après l’avoir vu en photo, ni une montre de luxe d’ailleurs. 

Quelles sont les nouvelles attentes des visiteurs d’après vous?

Elles tournent autour des animations et des promotions. Nos grands-parents allaient aux foires pour acheter moins cher. Tandis qu’aujourd’hui, les commerces font des promotions toute l’année. Alors les gens viennent faire un tour aux foires pour repérer ce qui les intéresse et ensuite le commander sur Internet une fois chez eux. D’où l’importance des animations. Prenons l’exemple des centres commerciaux. Ils sont les premiers à avoir compris le potentiel marketing de ces divertissements dont le but est de capter l’attention des visiteurs, de les amuser et, ce faisant, de les mettre dans une bonne disposition d’esprit. Le tout afin qu’ils restent plus longtemps sur place et, ainsi, consomment davantage. Dans les grandes foires qui marchent, c’est exactement pareil. 

«Nous devons travailler aussi bien avec les traiteurs
qu’avec les hôtels afin de réguler les coûts.»
Comment comptez-vous contrer la critique de vos exposants concernant la cherté de Baselworld? 

Il est clair que les prix doivent être revus. Un exposant considère tous ses frais de participation, dont son stand, son hébergement et sa nourriture sur place font partie. A ce titre, nous devons travailler aussi bien avec les traiteurs qu’avec les hôtels afin de réguler les coûts. Il n’est, en effet, pas acceptable que les hôtels doublent le prix de leurs chambres pour cette période de foire juste parce qu’elles sont très demandées. Tous les clients comparent les prix et prennent leur décision de participation en fonction. Concernant le coût des stands, nous sommes en train de réfléchir à des gestes à l’intention des petits exposants. 

Parmi vos ambitions, il y a celle de redonner un second souffle digital à Baselworld. De quelle manière? 

Nous allons utiliser le chatbox pour propulser Baselworld 2019 à la place de première plateforme mondiale de marketing et de communication dans notre secteur. Cette technologie d’intelligence artificielle a déjà fait partie de notre édition 2018, mais sera davantage développée pour l’année prochaine. Entre autres, une journée entière dédiée à la presse sera l’une des grandes nouveautés de Baselworld 2019. Pour conclure, je dirai que notre stratégie de renaissance s’inscrit dans la durée, et ses effets les plus marquants sont planifiés pour l’édition 2020.

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