Préserver la biodiversité: comment les investisseurs peuvent-ils agir?

Carmine de Franco, Ossiam

4 minutes de lecture

Face à l’immensité de l’enjeu, toutes les parties prenantes qui dépendent de la biodiversité et qui ont un impact sur elle par leurs activités doivent relever le défi.

Pour les investisseurs, 2020 a été une année particulière. Les évènements qui se sont produits sur les marchés et dans les économies du monde entier ont profondément ébranlé des croyances ancrées depuis longtemps. Alors que nous commençons, espérons-le, à sortir de la crise du COVID-19, nous sommes confrontés à d'énormes défis, notamment la relance des économies, la lutte contre les inégalités et la protection de notre environnement. Sur ce dernier point, les investisseurs ont un rôle important à jouer.

La biodiversité, telle que définie par le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE), est «La variabilité des organismes vivants de toute origine y compris, entre autres, les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie; cela comprend la diversité au sein des espèces et entre espèces ainsi que celle des écosystèmes». Notre subsistance en dépend: porter atteinte à la biodiversité a des conséquences pour l'humanité. La biodiversité doit être protégée pour garantir des conditions de vie sûres et saines sur Terre.

L'état actuel du déclin de la biodiversité est alarmant. Selon une estimation, 15% des espèces risquent de disparaître dans les prochaines décennies si rien n'est fait pour inverser la tendance. Malheureusement, les conséquences de la destruction sont considérées par un trop grand nombre d’individus comme lointaines et inoffensives.

Il s'agit d'un problème sérieux qui menace l'humanité à différents niveaux: la sécurité alimentaire, l'accès à l'eau et la santé générale de nos économies, tout en augmentant le risque de catastrophes naturelles. Par exemple, selon le Forum économique mondial (World Economic Forum), 75% de la production agricole dépend de la biodiversité, tandis qu'entre 15% et 45% du PIB mondial repose sur des écosystèmes fonctionnels, dont la biodiversité est une manifestation concrète.

Il est donc essentiel que toutes les parties prenantes qui dépendent de la biodiversité et qui ont un impact sur elle par leurs activités relèvent le défi. Cela inclut les entreprises, en particulier dans les secteurs où les enjeux sont importants et l’impact significatif, comme l'agriculture et l'alimentation. Selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (UN Food and Agriculture Organization), la croissance démographique, l'évolution des modes de consommation et les régimes riches en viande qui accompagnent la prospérité, notamment dans les pays en développement, entraîneront une multiplication par deux de la demande alimentaire, ce qui exercera une pression insoutenable sur la biodiversité.

En termes de chiffres, le secteur est responsable de 26% des émissions mondiales de GES; il utilise 50% des terres cultivables mondiales et 70% de l'eau douce mondiale; 78% de la pollution de l'eau est liée à ce secteur et, enfin, 94% du cheptel animal sur Terre est destiné à la consommation humaine. S'il s'agissait d'un pays, l'élevage se classerait au troisième rang des émissions de gaz à effet de serre, après la Chine et les États-Unis. Le défi pour le secteur agricole et alimentaire est de satisfaire la demande mondiale croissante, tout en adoptant une trajectoire durable.

Les entreprises du monde entier qui prennent au sérieux leur engagement en faveur de la durabilité réagissent déjà. Les investisseurs peuvent jouer un rôle de premier plan en s'engageant auprès des entreprises et en les poussant à améliorer leurs pratiques. Ils peuvent fixer aux entreprises des objectifs ambitieux et tangibles grâce auxquels ils encouragent une culture de sensibilisation à la biodiversité et des investissements basés sur l'impact de l’entreprise. Mais la mise en œuvre de politiques qui minimisent l'impact sur la biodiversité nécessite des méthodologies solides pour mesurer leur efficacité, sur lesquelles les investisseurs peuvent se baser.

La complexité de la biodiversité explique pourquoi, jusqu'à présent, les investisseurs ont intégré cet enjeu en examinant des données qualitatives telles que l'engagement des PDG des entreprises dans leur manière d'investir, ce qui n'est tout simplement pas suffisant. Ils ont également examiné les notations ESG liées à la biodiversité, telles que les procédures et politiques des entreprises, ou à travers le prisme des objectifs de développement durable, en ciblant des ODD spécifiques (ODD 13 - Changement climatique; ODD 14 - Vie sous l'eau; ou ODD 15 - Vie sur terre). Mais la manière la plus efficace de mesurer l'impact sur la biodiversité passe par des mesures physiques, de la même manière que les tonnes de CO2 sont le moyen standard de mesurer l'impact sur le climat.

Sur la base des travaux du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat et de la Convention sur la diversité biologique, l'impact de toute activité sur la biodiversité peut être mesuré en termes d’abondance des espèces ou MSA (Mean Species Abundance en anglais). Cet indicateur mesure l'état de la biodiversité dans un espace délimité par rapport à son état naturel non perturbé. Les activités humaines exercent généralement des pressions négatives sur la biodiversité. Par exemple, une activité qui a un impact négatif de 1 km² MSA équivaut à la destruction complète de 1 km² de forêt vierge et de la biodiversité qui lui est associée. Le MSA est une mesure physique qui dépend à la fois des données et d'une modélisation sophistiquée de la relation pression-impact que toute activité a sur la biodiversité. Elle offre des réponses quantifiables à des questions telles que la quantité de biodiversité détruite pour produire 1 kg de viande bovine.

Pour les secteurs clés tels que l'agriculture et l'industrie alimentaire, des recherches approfondies ont été menées pour concevoir des modèles sophistiqués et rassembler toutes les données pertinentes qui constituent le MSA. Le MSA s'articule autour de quatre piliers, représentant les canaux par lesquels il a le plus d'impact sur la biodiversité: l'utilisation des sols, le changement climatique, les émissions d'oxydes d'azote liées aux engrais et l'écotoxicité de l'eau douce. Il est désormais possible de mesurer l'impact des entreprises sur la biodiversité. À terme, les investisseurs pourront utiliser le MSA pour réduire l'empreinte de leurs portefeuilles sur la biodiversité. Cela devrait également favoriser les investissements dans les entreprises qui gèrent mieux leur impact sur la biodiversité.

Il ne peut y avoir de compromis si nous voulons opérer les changements radicaux nécessaires dans l'économie mondiale. Si le secteur agricole et alimentaire n'est pas considéré comme stratégique pour toutes les parties prenantes, y compris le secteur financier, il n'y aura pas d'économie et de société durables.

 

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Texte achevé de rédiger le 20/01/2021.

 

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