Les divergences des marchés émergents

Ian Samson, Fidelity

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Les marchés émergents rencontrent des trajectoires très diverses en matière d’inflation.

Le fait que les marchés émergents (ME) sont plus avancés dans le cycle que leurs homologues développés est devenu un truisme post-pandémique.

Mais le tableau n’est pas uniforme parmi les ME. Le suivant met en évidence les économies qui sont «trop chaudes» (en haut à droite), celles qui sont «trop froides» et celles qui sont «juste bien», dans la zone idéale de croissance désinflationniste (en haut à gauche).


«Trop chaud»

Le Mexique a une dynamique de croissance positive, comme le montrent les prévisions positives des bénéfices par action (en ordonnée). Toutefois, le pays continue de souffrir d’une inflation tenace d’origine domestique. La mesure de l’«impulsion d’inflation» (en abscisse) est calculée en soustrayant l’inflation sous-jacente en glissement annuel du taux annualisé ajusté des variations saisonnières, une valeur positive indiquant que les tensions sur les prix augmentent.

Une inflation sous-jacente tenace a maintenu les taux d’intérêt au niveau élevé de 11,25%. De plus, bien que le plus grand partenaire commercial d’Amérique latine bénéficie des tendances à la délocalisation dans des pays proches, la perspective d’un nouveau gouvernement aux Etats-Unis et de nouvelles hausses de droits de douane pourrait encore faire monter la température.

«Trop froid»

Certains ME, dont la Chine, flirtent en revanche avec une vraie déflation, comme le montrent les faibles attentes de croissance des bénéfices. Il est vrai que le pays est entré dans un tout autre cycle en raison de son rééquilibrage vers des capacités de production accrues et de la modernisation des chaînes logistiques, ce qui a entraîné une surcapacité dans certains domaines. En parallèle, le secteur immobilier en difficulté et les réticences des consommateurs continuent à brider la demande de consommation finale.

La Thaïlande fait également face à une inflation négative des prix à la consommation et à de faibles bénéfices des entreprises, sans signe de décollage à venir. La croissance y est encore plus morose qu’en Chine, mais la Banque de Thaïlande insiste sur le fait que le problème n’est pas structurel et se montre réticente à apporter un soutien significatif.

«Juste bien»

Parmi les meilleures, on trouve les trajectoires solides à court et long terme en Inde et les rendements réels élevés offerts sur les marchés obligataires brésiliens.

L’Inde fait feu de tout bois après une décennie de réformes économiques. Ses indices des directeurs d’achat restent les plus expansionnistes parmi tous les ME. Les nouvelles commandes restent importantes et la demande semble robuste.

Les valorisations pourraient commencer à sembler tendues, ce qui signifie que c’est le bon moment pour se pencher vers les banques et d’autres secteurs faiblement valorisés du marché indien, qui bénéficieront des fondamentaux solides du pays et des perspectives de croissance à long terme.

Le Brésil a agi particulièrement rapidement pour juguler l’inflation en 2022, avant d’enregistrer une solide croissance du PIB en 2023. Le pays continue de connaître une inflation relativement contrôlée, avec de bonnes perspectives de croissance.

Toutefois, malgré les signes évidents d’une situation «idéale» au Brésil, des incertitudes politiques existent. Plus tôt cette année, les administrateurs du géant pétrolier Petrobras, tous nommés par le gouvernement, ont voté contre le paiement du dividende extraordinaire proposé. La suggestion que le président Lula était intervenu pour pousser la direction à réinvestir dans la société à la place de ce versement alimente la volatilité des actions brésiliennes depuis le mois de mars. Pourtant, les fondamentaux solides du pays sont toujours présents et les fluctuations des cours devraient désormais présenter des opportunités pour les investisseurs perspicaces dans les ME.

Cela nous rappelle que l’histoire des marchés émergents est rarement simple. Les répartir selon leurs profils de croissance et d’inflation est une partie importante de l’allocation d’actifs. Mais le vrai travail commence avec l’appréciation des singularités de chaque pays.