Un retour sur l’histoire de la dette souveraine permet de tirer des leçons utiles sur ses risques et son potentiel.
Lorsque plus de 12'000 milliards de dollars du marché obligataire mondial offrent des rendements négatifs, on perçoit l’attrait du rendement de la dette émergente.i Un – bref – retour sur l’histoire de la dette souveraine permet de tirer des leçons utiles sur ses risques et son potentiel.
Le premier fonds d’investissement (Investment Trust) a été créé en 1868. Il offrait aux investisseurs une exposition à 15 pays émergentsii ; avec un rendement de 7%.
Entre les deux guerres mondiales, les capitaux ont été attirés vers la dette des marchés émergents. Le krach boursier a entraîné une hausse des taux d’intérêt réels et la plus grande vague de défauts de paiement de l’histoire.
En 1981, Antoine van Agtmael de l’IFC, membre du Groupe Banque mondiale, a inventé l’expression «marchés émergents».
En 1983, le Mexique a fait défaut sur sa dette. A l’époque, les emprunts étaient principalement à taux variables, donc sensibles aux hausses de taux.
Le secrétaire au Trésor américain Nicholas Brady a créé un plan de restructuration de cette dette, donnant naissance aux obligations «Brady».
JP Morgan a lancé l’indice EMBI (Emerging Market Bond Index) en 1992, avec 10 pays. Aujourd’hui le JP Morgan Emerging Market Bond Global Diversified (EMBI GD) couvre 73 pays.
Dans les années 1990, l’Asie a attiré les capitaux étrangers. Une fois de plus, l’emballement a alimenté l’effondrement. Les taux de change fixes ont rendu la région vulnérable lorsque le vent a tourné en 1997, obligeant plusieurs pays à solliciter le FMI.
La dette émergente a connu une forte croissance ces deux dernières décennies. Selon la Banque des règlements internationaux, elle représente 25% de l’encours total de la dette mondiale (55'000 milliards de dollars).
Diverses mesures ont renforcé la capacité des pays émergents à assurer le service de leur dette. Les gouvernements ont solidifié les systèmes bancaires et réduit la vulnérabilité aux cycles économiques et du crédit. La dette en devise locale représente 70% de la classe d’actifs. Résultat, depuis 2000, les défauts de paiement sont tombés à 0,7% par an pour les pays du JP Morgan EMBI Global Diversified Index.
La crise financière mondiale a démontré que ces défauts n’étaient pas propres aux marchés émergents. Puis la résistance des marchés a été testée de 2014 à 2016, mais sans que les défauts de souverains n’augmentent, contrairement à l’expérience des 200 dernières années.iii
Aujourd’hui, des faiblesses structurelles demeurent encore et justifient une prime de risque.
Huit tendances pourraient remodeler les opportunités d’investissement.
- La croissance des marchés émergents continuera de surperformer celle des pays développés, stimulant le marché de la dette. Les émergents pèsent 59% de la production mondiale, contre 36% en 1989 et 64% d’ici 2024 (en parité de pouvoir d’achat, source FMI).
- Les marchés obligataires domestiques, notamment chinois, deviendront plus accessibles aux étrangers.
- Les émergents émettront une part plus importante de leur dette en devises locales. Fin 2018, JP Morgan estimait la valeur des émissions obligataires souveraines et corporates en devises locales à 17'000 milliards de dollars. Soit plus de cinq fois le volume d’émissions en devises fortes.
- Nous ne prévoyons pas de changement important de la duration moyenne des obligations sur les marchés émergents, mais des comportements divers selon la maturité des marchés.
- La prochaine crise de la dette pourrait avoir des caractéristiques chinoises. En 2017, le monde devait plus de 5 000 milliards de dollars à l’État chinois.
- L’âge moyen des populations augmentera. Les besoins des retraités stimuleront la croissance des produits d’investissement domestiques et la demande d’actifs à plus long terme.
- L’accent mis sur le risque ESG augmentera. En juin 2019, le Chili a conclu une première émission d’obligations vertes. Nous anticipons une croissance de ce marché.
- JP Morgan devrait lancer un indice agrégé, combinant la couverture de la dette en devises fortes, de la dette en devises locales et de la dette corporate. Cela démontrera la profondeur et l’étendue du marché.
Nous anticipons une croissance de la dette sur les marchés émergents, avec une part plus importante en devises locales. Les indices mondiaux saisiront de plus en plus cette croissance.
Il s’agit d’un chapitre des Quatre piliers de la dette émergente.
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