Une fiscalité en équilibre fragile

Nicolette de Joncaire

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La hausse de l’imposition des dividendes et de l’impôt sur la fortune accroîtrait le risque de migrations fiscales. Avec Xavier Oberson à la Fondation Genève Place financière.

Droit de timbre, impôt anticipé, la place financière genevoise a subi deux échecs en votation cette année. Et à l’agenda se profilent d’autres menaces à l’attractivité fiscale de Genève, s’inquiétaient hier Yves Mirabaud, Edouard Cuendet et Xavier Oberson au cours de la présentation des résultats de l’enquête conjoncturelle de la Fondation Genève Place Financière.

La place financière va plutôt bien

Le nombre de banques diminue (87 en 2022 contre 92 en 2020) mais les emplois bancaires restent stables (17'361 en 2022 contre 17'366 en 2020) et ceux de la place financière genevoise continuent de croitre (37'943 en augmentation régulière sur les 10 dernières années). Les indicateurs sont au vert : banques et gérants de fortune sont majoritairement bénéficiaires malgré une baisse des actifs sous gestion largement imputable aux tensions sur les marchés financiers. Tant au sein des banques comptant plus de 200 employés que parmi les acteurs de plus petite taille, le bénéfice net au premier semestre 2022 est nettement supérieur à celui observé un an plus tôt. L’apport net de fonds résulte prioritairement d’une clientèle internationale, les résidents suisses n’en représentant que moins de la moitié. Dans la majeure partie des cas, l’impact des sanctions prises contre la Russie reste faible, la clientèle russe ne semblant pas présenter une part de marché particulièrement importante des avoirs sous gestion. Les prévisions pour 2023 varient en fonction de la typologie des établissements ; alors que les banques employant plus de 200 personnes semblent pessimistes et envisagent une année difficile, les établissements plus modestes et les gérants de fortune prévoient des résultats stables.

Mais l’attractivité fiscale de Genève se détériore

Présenté par Xavier Oberson, Les perspectives de la fiscalité à Genève s’assombrissent : « Genève se caractérise par une imposition élevée sur le revenu et l’une des plus importantes de Suisse sur la fortune ». Si plus d’un tiers des contribuables ne paie pas d’impôt sur le revenu, 2,9% des plus fortunés contribuent à 78,5% de l’impôt sur la fortune.

Plusieurs projets sont en examen qui diminueraient encore l’attractivité de la place.

La base imposable des deux piliers de l’OCDE, au taux de 15%, reste encore à définir plus précisément mais détériorera à nouveau une taxation qui était globalement devenue plus favorable à grâce à la troisième réforme de la fiscalité des entreprises (RFFA) et ce malgré la suppression des régimes spéciaux. Pour les multinationales, le projet OCDE prévoit une hausse générale du taux d’imposition à 15%.

L’initiative «Contre le virus des inégalités» vise à imposer les dividendes sur la base de 100% pour les actionnaires détenant plus de 10% de participation dans une entreprise alors que cette base est actuellement de 70%. Dans les autres cantons (Bâle-Ville excepté), cette imposition partielle des dividendes se fait sur une base située entre 50% et 70%. La nouvelle base serait donc dissuasive à Genève vis-à-vis des autres cantons.

Quant à l’initiative «Pour une contribution temporaire de solidarité sur les grandes fortunes», elle passerait le taux maximal d’imposition sur la fortune à 1,5% (tout en augmentant le seuil d’exonération de l’impôt) et rendrait le calcul du bouclier fiscal plus sévère. Cette hausse entraine un risque réel de délocalisation vers des cieux plus cléments en Europe (Grande-Bretagne, Italie, Portugal etc.) ou aux Etats-Unis.

Les votations sur ces points restent à venir mais les revers des votations sur le droit de timbre et l’impôt anticipé n’augurent pas de résultats favorables pour la clientèle des banques privées..