Les risques géopolitiques n’empêchent pas la poursuite de la hausse

Emmanuel Garessus

2 minutes de lecture

Les risques géopolitiques augmenteront à l’avenir, mais les actifs risqués resteront bien orientés ainsi qu’il ressort de l’Amundi Investment Forum, à Paris.

©Keystone

 

La géopolitique est au centre des discussions menées lors de l’Amundi Investment Forum, qui s’est tenu jeudi et vendredi à Paris. Le monde devient multipolaire. Il se traduit par une perte d’influence marquée des Etats-Unis. C’est particulièrement évident en Asie, constate Lynn Kuok, de la Brooking Institution. Ce déclin américain s’exprime aussi au Moyen Orient, une région où l’instabilité ira croissante, avertit Vali Nas, professeur à la Johns Hopkins University.

Les tensions entre les Etats-Unis et la Chine continueront de s’aggraver, ajoute Vincent Mortier, directeur des investissements (CIO) d’Amundi. Qu’en déduire pour l’investissement si ce n’est que le rôle d’actifs dits refuge sera primordial, comme l’or, les matières premières et le respect des critères ESG?

L’analyse des risques géopolitiques conduit Monica Defend, responsable de l’Amundi Research Institute, à se pencher sur trois thèmes majeurs, la divergence économique entre les grandes régions, un recul de l’inflation à un rythme plus lent que prévu et une vulnérabilité des économies aux chocs qui pourrait se traduire par un recul d’autant plus rapide des marchés.

Des gains limités

Malgré la noirceur de cet environnement, Vincent Mortier reste positif sur les actifs risqués même si un bonne partie du potentiel est déjà escompté par les marchés, déclare-t-il. La hausse devrait se poursuivre mais une rotation devrait s’effectuer entre les secteurs jusqu’à ce que l’horizon économique s’éclaircisse. Les meilleures opportunités se trouvent maintenant dans les indices équipondérés («equally weighted»), les «small & mid caps», et le Royaume Uni, avance-t-il.

«La hausse devrait se poursuivre mais une rotation devrait s’effectuer entre les secteurs.»

Si le monde devient multi-polaire, Amundi reste constructif sur chacun des blocs. Vincent Mortier vante par exemple les actions chinoises, après le net recul du multiple des bénéfices. La Chine est le leader mondial dans quantité de technologies critiques, argumente-t-il. La préférence d’Amundi va aux A-Shares des bourses de Shanghai et de Shenzhen, où l’on trouve les perles technologiques de demain.

Keyu Jin, professeur à la London School of Economics, appuie vivement cet avis positif à l’égard de l’Empire du Milieu. La Chine se situe dans une phase de transition mais sa croissance restera entre 3 et 5% à long terme, indique-t-elle. Par ailleurs, les sanctions prises par les pays occidentaux ont pour effet indirects d’inciter les entreprises chinoises à augmenter leurs approvisionnements non plus aux Etats-Unis mais sur le marché local chinois lui-même. On sous-estime, à son goût, les mérites de l’approche à long terme du gouvernement chinois. Ce n’est pas Pékin qui utilisera des instruments keynésiens à court terme, conclut-elle.

Un autre marché émergent ressort des discussions, celui de l’Inde. Chacun s’accorde à le trouver cher, mais pour Vincent Mortier, sur 20 ans la corrélation est très significative entre l’indice et la hausse des bénéfices. Ce n’est pas Dinesh Kumar Khara, président de la State Bank of India, la première banque indienne, qui allait le contredire. Ce dernier assure que la croissance économie indienne continuera de croître des années à un rythme annuel de 8%, notamment grâce aux besoins en infrastructures.

Dans les obligations, Amaury d’Orsay, responsable du Fixed Income d’Amundi, privilégie les longues durations. Il s’attend à une pentification de la courbe de taux aux Etats-Unis et déclare apprécier les obligations émergentes.

Ne pas exagérer le risque sur la dette française

Si les craintes des marchés se sont récemment portées sur les obligations françaises, dans le sillage de la défaite du camp macronien lors des élections européennes et de la dissolution du parlement, Vincent Mortier minimise la hausse du spread entre la France (OAT) et l’Allemagne (Bund). Il juge le mouvement logique compte tenu de l’incertitude, mais une hausse du spread de 15 points n’exprime pas une situation de crise. Vincent Mortier déclare ne pas appartenir au camp de Bruno Le Maire et ne tient pas à dramatiser la situation. Le CIO du leader de la gestion d’actifs ajoute que certaines mesures du Rassemblement national seraient de toute manière difficiles à mettre en oeuvre en raison du changement constitutionnel qu’ils nécessitent et d’un accord qui devrait être obtenu non seulement au parlement mais aussi au sénat. Pour résumer, il n’y a pas de crise de confiance à l’égard de la France.

A lire aussi...