Les répercussions des nouvelles mesures de relance sur les marchés

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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Les plans de relance s’étoffent partout. Ces efforts colossaux ne devraient pas manquer d’avoir des répercussions sensibles sur les marchés. Analyse.

Les chefs d'Etat de l'Union européenne se sont mis d'accord la semaine dernière sur un plan de relance de 750 milliards d'euros qui équivaut à 5,4% du produit intérieur brut (PIB) 2019 de l'Union européenne (UE) à 27. Aux Etats-Unis, la Maison Blanche et les sénateurs républicains sont parvenus à un «accord de principe» sur un nouveau train de mesures de relance budgétaire au cours du week-end des 25 et 26 juillet, et ce alors que le dispositif d'allocations chômage complémentaires doit arriver à échéance en fin de mois.

L'effort constant de relance budgétaire des principales puissances économiques est l'une des raisons qui donnent à penser que la reprise économique mondiale s'accélèrera dans les mois à venir. Cet effort de relance aura un certain nombre de répercussions sur les marchés qui vont dans quatre directions.

1. La relance budgétaire, l'effet de rattrapage de la demande refoulée et les taux d'intérêt réels négatifs favoriseront la hausse des actions mondiales

Dans l'enveloppe de 750 milliards d'euros du plan de relance de l'UE, la part des aides a été ramenée à 390 milliards d'euros (au lieu des 500 milliards d'euros proposés initialement) et celle des prêts a été portée à 360 milliards d'euros.

C'est la première fois que les chefs d'Etat de l'UE acceptent de s'endetter
pour financer un programme d'aides, et non de prêts.

Même si la part plus modeste des aides pourrait susciter une certaine déception, il ne s'agit toutefois pas d'une réduction drastique. Surtout, c'est la première fois que les chefs d'Etat de l'UE acceptent de s'endetter pour financer un programme d'aides, et non de prêts, à des Etats membres. Ils ont ainsi ouvert la porte à une intégration budgétaire plus poussée.

Cette décision ne manquera pas de rassurer les investisseurs quant à la pérennité de l'Union européenne et de la monnaie unique, ce qui favorisera une baisse des primes de risque dans toute l'UE. Les investisseurs devraient dès lors se positionner de manière à profiter du potentiel de hausse des actions. En Europe, il convient de privilégier notamment les actions allemandes et les valeurs industrielles de la zone euro, qui sont susceptibles de bénéficier d'une reprise économique.

2. Le regain de vigueur de l'euro conforte l'idée que le dollar se dépréciera encore

Les actions européennes ont achevé la semaine en baisse en raison de l'apparition de nouveaux foyers de Covid-19 et des tensions entre les États-Unis et la Chine. Ces facteurs ont tempéré l'optimisme suscité par les mesures de relance budgétaire, mais l'euro est ressorti comme le grand gagnant. Lundi, le taux de change EURUSD se situait au-dessus de 1,17. Il a progressé de 2,3% sur la semaine.

Plus généralement, l'indice du dollar américain (DXY) a cédé 2% dans le même temps, tombant ainsi à son plus bas niveau depuis le début de l'année. Il paraît clair que le dollar se dépréciera encore à mesure que l'optimisme grandira quant à la reprise économique après la crise du Covid-19.

La Réserve fédérale est d’ailleurs la grande banque centrale qui a le plus assoupli sa politique monétaire, si bien que le différentiel de taux d'intérêt en faveur du dollar américain s'est amenuisé. Le billet vert devrait également être pénalisé par l'incertitude politique à l'approche de la présidentielle américaine du mois de novembre.

3. La reprise fera des gagnants et des perdants

En effet, la préservation du climat et la transition vers le numérique sont au cœur du plan de relance de l'UE. 672,5 milliards d'EUR (contre les 560 milliards d'EUR prévus initialement) seront affectés à ces priorités. La Commission européenne a estimé qu'il faudrait 1500 milliards d'EUR d'investissements rien que dans les technologies vertes et numériques lors des deux prochaines années.

Le rendement réel des liquidités et des obligations
les mieux notées s'annonce négatif dans l'immédiat.

On peut espérer que ces fonds, en plus de promouvoir l'investissement public dans ces secteurs, encourageront également les investissements en provenance du secteur privé. Cette priorité donnée à une «reprise verte» conforte l'idée que le développement durable sortira renforcé de cette crise.

En Europe, il y aura aussi des gagnants dans les domaines de la mobilité intelligente, des technologies médicales et de l'automatisation / robotique, qui surferont sur la transformation numérique.

4. La monde de l'après Covid-19 sera plus endetté

La relance budgétaire se traduit par une augmentation de la dette partout dans le monde. La semaine dernière, l'Office for National Statistics britannique a indiqué que le ratio dette publique/PIB du pays avait atteint 99,6% à la fin du deuxième trimestre, en hausse de 19 points de pourcentage.

Il faut remonter à 1961 pour retrouver un ratio aussi élevé. Selon l'Institute of International Finance, le ratio dette/PIB au niveau mondial a atteint un sommet historique à 331% à la fin du deuxième trimestre, contre 320% au T4 2019. Les banques centrales continueront donc certainement d'orchestrer une répression financière et toléreront une inflation en peu plus élevée (dans une fourchette de 2 à 5%) pour alléger le fardeau de la dette.

Par conséquent, le rendement réel des liquidités et des obligations les mieux notées s'annonce négatif dans l'immédiat. Les investisseurs devront donc redoubler d'efforts pour obtenir un revenu en s'intéressant aux catégories d'obligations plus rémunératrices et aux actions versant des dividendes.

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