Les banques ont fait leur part du travail - les marchés vont-ils maintenant faire le leur?

Dillon Lancaster, TwentyFour Asset Management

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Les marchés devraient se normaliser ainsi que les spreads devraient s’aligner avec ceux observés dans d'autres produits de spreads.

Les obligations bancaires sont dans cette classe d'actifs celles qui ont le mieux performé au cours des derniers mois, après leur fort rebond suite à la crise bancaire américaine et la dépréciation de Crédit Suisse à la mi-mars. Depuis début avril, l'indice COCO a enregistré une performance supérieure à 7%, alors que les obligations européennes et américaines à haut rendement sont autour de 3%. Comme nous l'avions prédit, les fondamentaux des banques sont restés solides, et même si une reprise s'est amorcée, la dette bancaire offre toujours aux investisseurs une prime très attrayante par rapport aux obligations non-financières.

Alors que la majorité des banques européennes ont déjà publié leurs résultats pour le premier semestre, la tendance se poursuit : une marge nette d'intérêt (MNI) et des bénéfices qui dépassent le consensus, tandis que la qualité des actifs continue d'être extrêmement résistante. Ainsi d’Unicredit, la deuxième banque italienne, dont les résultats du premier semestre ont été largement considérés comme très solides – avec une MNI, à 210 points de base, en augmentation d'environ 60% par rapport à l'année précédente, et des bénéfices de 25% supérieurs à ce que le marché attendait. Dans le même temps, les prêts non performants de la banque, à 2,6%, continuent leur baisse par rapport au trimestre précédent et le coût du risque, à 0,05%, reste à des niveaux historiquement bas. Le ratio CET1 a atteint un niveau record de 16,64%, ce qui se traduit par un écart considérable de 689 points de base par rapport au montant maximum distribuable (MDA). Pour rappel, le MDA est le niveau de capital en dessous duquel les restrictions obligatoires sur les dividendes, les coupons AT1 et la rémunération variable des employés entrent en vigueur.

Après les événements de mars la remontée ne pouvait être que progressive, et les marchés devraient finir par se normaliser et les spreads s’aligner avec ceux observés dans d'autres produits de spreads.

Les vastes réformes entreprises dans le secteur bancaire depuis la crise financière mondiale ont renforcé les banques qui sont devenues plus favorables aux détenteurs d'obligations – et dans le contexte actuel de taux d'intérêt plus élevés, leurs résultats s'améliorent aussi. Les récents stress tests ont démontré les progrès réalisés par les banques européennes. Dans le scénario extrême de stress test de la BCE, qui envisage une chute du PIB de 6% et une baisse des prix de l'immobilier de plus de 20%, le niveau de capital d'UniCredit chute de 349 points de base, un niveau encore largement supérieur au seuil du MDA. Autre exemple d'un émetteur parfois mal aimé des marchés, le capital de Sabadell chuterait de 374 points de base dans le scénario extrême, bien mieux que la chute de 548 points de base observée lors du dernier stress test il y a deux ans.

Et pourtant ces banques se négocient encore à des niveaux inférieurs à ceux atteints avant le mois de mars. La dette AT1 d'Unicredit est au prix de 82,50, soit un rendement de 11,4% en livres sterling pour une option d'achat en 2027, et la dette de Sabadell au prix de 79, soit un rendement de 14,2% en livres sterling pour une option d'achat en 2027. Pour les investisseurs qui s'inquiètent du potentiel de non-appels d'obligations dans le secteur, soulignons qu'en juillet BBVA et Barclays ont appelé des obligations AT1 en circulation, imitant Unicredit et Lloyds qui ont appelé leurs AT1 il y a quelques semaines, preuve que les banques européennes maintiennent leurs capacités d’appels d'obligations.

Les banques ont ainsi fait leur part du travail en prouvant leur solidité. Après les événements de mars la remontée ne pouvait être que progressive, et les marchés devraient finir par se normaliser et les spreads s’aligner avec ceux observés dans d'autres produits de spreads. Les financières d'Europe de l’ouest ayant de loin le ratio hausse/baisse le plus élevé au monde – le ratio Moody's s’établit jusqu’ici cette année à 4,08 –, nous pensons que ce n'est qu'une question de temps avant que la solidité des fondamentaux ne ramène les niveaux de spreads à des niveaux plus raisonnables.

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