L’impact des annonces de la BCE sur le marché monétaire

Mikaël Pacot, AXA IM

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Aujourd’hui, le marché anticipe 30% de probabilité d’une nouvelle hausse d’ici le mois de décembre. Ce n’est pas notre scénario principal.

Bien qu’attendue, la hausse de taux de la BCE n’était pas totalement anticipée par le marché puisque seulement 16 points de base (bp) de hausse étaient intégrés dans les prix de marché (environ 65% prônaient une hausse vs. 35% pour un statu quo). Les anticipations de hausse se sont renforcées quelques jours avant la réunion de la BCE suite à un article évoquant une hausse des prévisions d’inflation de la BCE pour 2024. En effet, début septembre, seulement 5bp de hausse étaient anticipés. Aujourd’hui, le marché anticipe 30% de probabilité d’une nouvelle hausse d’ici le mois de décembre. Ce n’est pas notre scénario principal. La BCE devrait selon nous opter pour une pause dans l’attente de données qui montreraient une inflation encore plus haute que prévue.

La question importante pour les mois à venir sera le timing et l’intensité des baisses de taux de la BCE, le marché voit déjà une baisse de 25bp d’ici juin 2024. Bien que nous n’anticipions rien avant l’été prochain, le dernier discours de la BCE laisse envisager un maintien des taux à ce niveau pour longtemps, et les prochaines données économiques et d’inflation devraient être les seules responsables des mouvements de BCE à venir. Il est intéressant de noter que la hausse de taux n’a fait que translater les anticipations de baisse, ne modifiant ni la date ni le degré de première baisse.

Sur le marché à court terme, la forme de la courbe s’est aplatie jusqu’au 10 mois (voire jusqu’au 12 mois à 2bp près). Du côté des euribor, le 3 mois a encore fixé à son plus haut à 3,903%, tout comme le 1 an qui a atteint 4,191% aujourd’hui. L’écart entre l’Euribor 1 an et le swap €str 1 an s’est resserré autour de 25bp depuis la réunion de la BCE alors qu’il avait été de quasiment 38bp le 31/08 avec la forte baisse des anticipations de hausse sur le swap €str. En moyenne depuis la dernière réunion de la BCE, cet écart était de 29bp, le taux Euribor étant supérieur, cela correspond à la prime que doit payer globalement un émetteur bancaire pour émettre sur le 1 an. Sur la partie 3 mois, le comportement est assez identique avec un écart moyen depuis fin juillet de 2bp entre l’euribor et le swap €str. Depuis cette hausse de taux, le taux euribor traite en dessous du swap et pourrait, dans les semaines à venir, poursuivre le mouvement, la fin d’année approchant (le 3 mois passera la fin d’année dans moins d’une dizaine de jours). Les banques commencent à montrer la baisse de leurs intérêts sur les maturités inférieures à 4 mois, faisant donc mécaniquement baisser l’euribor.

Pour continuer sur le marché des instruments à court terme des Commercials Papers et plus particulièrement des NEU CP (Negotiable European Commercial Paper), nous observons toujours actuellement des niveaux élevés d’encours notamment pour le secteur bancaire avec un peu plus de 200 milliards d’euros à fin juillet, en hausse de 40% vs. juillet 2022 date de la première hausse de taux de la BCE. Sur les émetteurs d’entreprise, on assite à une baisse de 11% comparé à l’an passé du fait de la pente de la courbe inversée et de la hausse fulgurante des taux.

Sur le secteur financier, on remarque une forte hausse des maturités très courtes 1-3 jours pour le placement de trésorerie de la clientèle institutionnelle notamment. La maturité résiduelle moyenne reste assez stable au mois de juin légèrement au-dessus de 4 mois. Les banques ont cependant fortement augmenté leur maturité moyenne depuis 1 an, et davantage encore après la décision de la BCE de stopper les TLTRO fin 2022. Les banques utilisent donc davantage le marché pour se refinancer plutôt que la BCE.

Côté entreprises, on observe un comportement bien différent à savoir une baisse de l’encours et une baisse des maturités qui s’expliquent d’abord par une inversion de la courbe des taux sur la partie longue favorisant les financements des corporates sur le 5-10 ans et ensuite par une hausse des taux où un certain nombre d’émetteurs ne se couvrent pas contre les hausses de taux.

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