La banque canadienne TD Bank a accepté de plaider coupable d’infraction à la législation des Etats-Unis sur le blanchiment et de verser environ 3 milliards de dollars de pénalités aux autorités américaines, ont annoncé ces dernières mercredi.
L’établissement de crédit, dont la filiale américaine est la dixième banque des Etats-Unis par la taille des actifs, était notamment accusé d’avoir permis à des criminels d’avoir blanchi plusieurs centaines de millions de dollars.
TD Bank est la banque la plus importante de l’histoire du pays à plaider coupable de blanchiment, selon le ministère américain de la Justice, qui accuse l’entreprise d’avoir manqué à ses obligations de contrôle des transactions de 2014 à 2023.
Le groupe a pris l’engagement de restructurer en profondeur ses procédures de conformité et accepté une période de mise à l’épreuve de cinq ans.
L’accord prévoit également de plafonner la taille de ses actifs américains au niveau qu’ils avaient atteint fin septembre, soit 434 milliards de dollars.
Cette disposition empêche, de fait, TD Bank de poursuivre sa croissance aux Etats-Unis, où elle compte plus de 1.100 succursales et environ 10 millions de clients.
Parmi les clients soupçonnés d’activités illégales figuraient des narcotrafiquants, a expliqué, lors d’un point de presse, le ministre américain de la Justice, Merrick Garland.
Il s’agissait de producteurs chinois de drogues de synthèse, notamment le puissant opiacé fentanyl, associés à des trafiquants mexicains, qui acheminaient la marchandise vers les Etats-Unis.
Plusieurs employés de la banque ont été mis en cause par les autorités américaines pour avoir facilité, voire contribué au blanchiment d’argent de la drogue, pour certains en échange de bons cadeaux de plusieurs dizaines de milliers de dollars au total.
Deux d’entre eux ont déjà été inculpés, a précisé le ministre, précisant que l’enquête n’était pas encore achevée.
Selon lui, «des cadres dirigeants, y compris la personne qui est devenue le responsable anti-blanchiment, savaient que le cadre de surveillance présentait de sérieux problèmes, mais la banque n’a pas cherché à y remédier».
«Un chapitre difficile»
Merrick Garland a cité l’exemple d’un intermédiaire de narcotrafiquants qui, après être passé par plusieurs institutions financières, avait choisi de ne travailler qu’avec TD Bank, qui avait «le règlement et les procédures les plus permissives» en matière de blanchiment.
Le ministère a identifié trois organisations soupçonnées d’activités illégales qui ont, au total, fait transiter quelque 670 millions de dollars via leurs comptes chez TD Bank.
«Nous montrons clairement ce que nous attendons des institutions financières et ce que sont les conséquences en cas de non-respect des règles de conformité», a déclaré l’adjointe de Merrick Garland, Lisa Monaco.
«En matière de contrôle, il y a deux voies possibles: investissez (dans des mécanismes de détection et d’alerte) ou vous en assumerez les conséquences», a-t-elle poursuivi.
Informé de l’enquête et ayant accepté de collaborer avec le ministère de la Justice, TD Bank avait déjà provisionné 4,2 milliards de dollars canadiens, soit environ 3 milliards de dollars américains, en vue du versement de ces pénalités, selon ses comptes trimestriels publiés fin août.
«Nous assumons la responsabilité d’avoir manqué aux obligations du programme anti-blanchiment américain et effectuons les investissements, les changements et les améliorations nécessaires pour nous y conformer», a commenté, dans un communiqué, le directeur général, Bharat Masrani.
«C’est un chapitre difficile de l’histoire de notre banque», a reconnu le dirigeant. «Ces manquements sont intervenus sous mon mandat et je m’en excuse auprès de toutes les personnes concernées.»
A l’échelle du groupe entier, TD Bank est la seconde banque canadienne par la taille des actifs, derrière la Royal Bank of Canada (RBC).
Même si les poursuites étaient connues ainsi que le montant probable des pénalités, les investisseurs ont mal réagi à l’annonce de mercredi.
Vers 19H10 GMT, le titre de la banque chutait de 5,30% à la Bourse de New York.