Le mensonge de la finance

Présélection prix Turgot 2018

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Nicolas Bouleau, Editions de l’Atelier.

Nicolas Bouleau est mathématicien et philosophe des sciences, essayiste dans les domaines de la connaissance et de l'environnement. Directeur de recherche au CNRS, directeur de la chaire Energie et prospérité. Il était membre de la commission Stern-Stiglitz qui a remis son rapport sur le prix du carbone en 2017. Il a reçu plusieurs distinctions prestigieuses dans les domaines de l’industrie, des sciences et de l’économie financière.

L'avis du Club de présélection du prix Turgot
Fabienne Audigier

Dans cet ouvrage brillant et iconoclaste l’auteur nous rappelle à quel point notre système économique libéral est structuré par les marchés financiers et à quel point cela nous induit en erreur. La logique de marché est devenue une référence pour toutes nos décisions collectives, or cette logique est largement biaisée, en particulier par la volatilité. Indissociable de la spéculation, cette volatilité est un révélateur d’inquiétude qui entretient des mouvements aléatoires et donc un flou total sur les vraies tendances. En effet, dans ce fonctionnement, les opinions et relations entre intervenants comptent davantage que les caractéristiques intrinsèques du bien échangé.

Nicolas Bouleau explique également comment le système d’assurance basé sur les produits dérivés introduit un aléa moral et donc un biais supplémentaire dans la rationalité entrepreneuriale. Ces effets combinés brouillent le signal-prix et créent une myopie générale. Ainsi, contrairement à l’idée généralement reçue, le prix d’une ressource n’augmente pas en fonction de sa rareté, et les marchés ne restituent pas la réalité des ressources disponibles ni la dégradation de la planète. L’auteur rappelle de douloureux constats: la crise du productivisme agricole avec la baisse des rendements, l’empoisonnement des sols, la raréfaction de l’eau douce, la baisse des ressources halieutiques, la déforestation, l’érosion de la biodiversité et les multiples pollution qui condamnent notre environnement.

En conclusion l’efficience des marchés financiers est une supercherie révélée par les successions de crises, les inégalités, le court-termisme dramatique, et la contradiction entre une croissance continue et des ressources limitées. Les indications des marchés ne peuvent donc constituer une référence pour nos décisions collectives. L’enjeu est de sortir de la «culture du déchet» telle que décrite par le Pape dans son encyclique «laudate si»; à défaut, le système actuel ne peut conduire qu’à l’effondrement. Outre l’adaptation de nos institutions, la solution est de créer d’autres indicateurs s’appuyant sur une démarche scientifique, et non financière, pour mesurer les tendances déterminante de notre environnement et de notre survie à long terme.