Le contact direct avec la clientèle reste essentiel pour la BCF

Yves Hulmann

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A la tête de la Banque Cantonale de Fribourg depuis 2021, Daniel Wenger estime que conserver un réseau de succursales reste important malgré l’essor des offres en ligne.

Avec un résultat opérationnel qui a franchi pour la première fois le seuil des 200 millions de francs pour s’établir à 224,3 millions de francs (+29,1% sur un an) et un bénéfice net qui a atteint 161,5 millions de francs (+14,4% sur un an), la Banque Cantonale de Fribourg (BCF) avait toutes les raisons de se montrer satisfaite mercredi de l’exercice 20231. L’établissement a notamment tiré parti de la remontée des taux d’intérêt qui a permis à la banque cantonale de voir son résultat net des opérations d’intérêts bondir de près de 27% à 322,4 millions de francs. Comment la troisième plus grande banque cantonale de Suisse romande entend-elle répondre à l’évolution des besoins de la clientèle à l’avenir? Entretien avec Daniel Wenger, président de la direction générale de la Banque Cantonale de Fribourg depuis 2021, à l’occasion de la présentation de ses résultats annuels.

La Banque Cantonale de Fribourg (BCF) a gagné 13’000 nouveaux clients en 2023. Est-ce peu ou beaucoup? Les difficultés de Credit Suisse l’an dernier expliquent-elles aussi cette hausse?

Non, il ne s’agit pas d’un effet Credit Suisse. 13’000 nouveaux clients, c’est un bon nombre. Cela correspond à l’ordre de grandeur observé lors des années précédentes. Ces nouveaux clients sont parfois des personnes qui ont quitté d’autres banques pour venir à la BCF. Parfois, il s’agit de gens qui sont venus s’installer dans le canton de Fribourg qui n’avaient pas de relation bancaire chez nous auparavant. Le fait que l’on garde une proximité avec notre clientèle, que l’on maintienne des guichets dans de nombreuses localités sont aussi des aspects qui comptent toujours pour beaucoup de clientes et de clients. La BCF continue également d’évoluer dans un environnement démographique favorable porté par le fait que beaucoup de gens s’installent dans le canton de Fribourg.

Pensez-vous que cette croissance va continuer ou va-t-on assister à un ralentissement de celle-ci?

Je pense que le nombre d’habitants va certainement continuer à croître dans le canton de Fribourg. C’est un canton qui compte beaucoup de PME qui offrent des places de travail. La proximité avec les cantons de Berne et Vaud permet aussi à de nombreux pendulaires de travailler à Berne ou à Lausanne, par exemple.

Lors de la présentation de ses résultats de 2023, la BCF a mentionné l’inauguration de deux succursales dans le nord du canton, à Kerzers et à Morat. Est-il encore important de disposer de succursales physiques à l’heure du tout numérique?

J’en reste convaincu. Le contact personnel demeure important pour un établissement comme le nôtre. Cela ne signifie bien sûr pas que nous ne devons pas investir pour continuer de développer et améliorer notre service de banque mobile ou d’e-banking. Néanmoins, je suis convaincu qu’il faut garder le contact direct avec la clientèle et conserver un réseau de succursales.

Pour expliquer la hausse du nombre de clients, vous avez aussi indiqué le fait que la BCF propose une offre de services bancaires de base qui demeure gratuite. Est-ce pour prévenir la concurrence d’offres à faibles coûts des banques sur smartphone ou d’établissements bancaires tels que la ZKB qui propose désormais aussi une offre de base gratuite dans l’ensemble du pays?

La ZKB a fait beaucoup de publicité pour sa nouvelle offre en décembre. De notre côté, nous n’avons jamais spécialement communiqué au sujet de notre offre de prestations de bas gratuite car celle-ci existe depuis longtemps à la BCF.

Quels services peuvent être offerts gratuitement et lesquels resteront payants à l’avenir?

La BCF ne propose pas de carte de crédit gratuite par exemple. Ce service reste payant. L’offre de base, incluant un compte bancaire, est gratuite car la BCF est prête à supporter les coûts qui y sont liés. C’est aussi le cas parce que nous sommes une banque qui appartient au canton de Fribourg et parce que nous avons une responsabilité envers la population.

En ce qui concerne les résultats de l’activité bancaire, le résultat net d’intérêts a augmenté de près de 27% sur un an pour s’établir à 322,4 millions de francs. Une telle hausse reflète-t-elle une situation exceptionnelle liée à la hausse des taux d’intérêts depuis 2022 ou est-il possible de la répéter à l’avenir?

«Nous ne faisons pas de compromis au niveau des risques du portefeuille de crédit.» 

La grande majorité de notre portefeuille de crédit est constitué d’hypothèques à taux fixe. Dès lors que les taux d’intérêt hypothécaires ont commencé à augmenter, cela a eu logiquement un impact favorable sur nos revenus d’intérêt. Une fois que la période des intérêts négatifs a été terminée en 2022, les marges d’intérêt se sont à nouveau normalisées. Maintenant, l’impact vers le haut est limité bien sûr par les autres offres de la concurrence dans un secteur qui reste très compétitif.

Le portefeuille de crédit de la BCF est concentré à hauteur de 79% dans le canton de Fribourg, une part de 21% provenant d’autres cantons. La BCF a-t-elle une volonté de se diversifier dans les régions avoisinantes d’autres cantons?

Non, ce n’est pas un objectif. Les clients que nous finançons dans d’autres cantons résident souvent dans des communes limitrophes de Fribourg dont le territoire est très morcelé avec les cantons limitrophes. Nous n’allons pas les chercher volontairement mais s’ils s’adressent à la BCF, alors nous les accueillons bien sûr volontiers.

Dans le domaine hypothécaire, comment observez-vous l’évolution des offres de financement entièrement en ligne proposées par des banques ou différentes plateformes dédiées?

«Il faut être conscient des limites des offres en ligne dans le domaine hypothécaire.»

Avec FRiBenk, nous proposons nous-même aussi une offre dans ce domaine. Toutefois, il faut être conscient des limites des offres en ligne dans le domaine hypothécaire. On constate souvent que lorsque qu’un couple de personnes encore jeunes souhaite acquérir pour la première fois un logement, les offres en ligne ne sont pas le canal de financement privilégié. Les clients sont généralement contents de pouvoir en parler avec une conseillère ou un conseiller. En revanche, lorsqu’il s’agit de renouveler une hypothèque déjà existante ou de modifier la structure de financement d’une hypothèque, alors oui, beaucoup de clients sont prêts à le faire directement en ligne.

La BCF affichait en 2023 un ratio coût / revenu de 36,6%, très bas comparé au reste du secteur. Sera-t-il possible de maintenir un tel ratio sur la durée?

Ce ratio s’inscrit dans l’historique de notre banque qui a toujours été très disciplinée en matière de gestion des coûts. Nous préférons externaliser ce qui peut être fait à moindres frais par d’autres prestataires, par exemple dans le domaine de projets informatiques. Dans une banque, il faut toujours être conscient que l’on ne peut en grande partie maîtriser que les coûts. Les revenus, eux, peuvent être influencés par toutes sortes d’autres facteurs.

En 2021, vous insistiez sur la politique prudente de la banque en matière d’octroi de crédits hypothécaires. Compte tenu de la hausse des taux, pouvez-vous être à nouveau plus souple sur ce plan?

Non, notre approche est restée la même. Nous ne faisons pas de compromis au niveau des risques du portefeuille de crédit.

 

1Lien: https://www.allnews.ch/content/corporate/bc-de-fribourg-excellents-r%C3%A9sultats-et-versement-extraordinaire-au-canton

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