L’appétit pour le risque est là

Yves Hulmann

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Christel Rendu de Lint, co-CEO de Vontobel, observe un retour de l’activité dans les produits à revenu fixe et un intérêt accru pour les obligations des marchés émergents.

A l’instar de plusieurs autres banques qui ont publié leurs résultats pour l’exercice 2024 récemment, Vontobel a vu son bénéfice net, ses actifs sous gestion ainsi que les afflux nets de fonds augmenter l’an dernier. Entre janvier et décembre, l’établissement zurichois a vu son résultat avant impôts augmenter de 32,2% pour atteindre 353,8 millions de francs, tandis que le bénéfice net s’est accru de 24% à 266,1 millions. Le ratio coûts-revenus s'est amélioré à 74,7% (-4,5 points comparé à l’an précédent), ce qui le rapproche de l’objectif visé de 72%.

La banque a également bénéficié de solides afflux d’argent frais à hauteur de 2,6 milliards en 2024, après avoir subi des sorties de fonds de 3,5 milliards un an auparavant. L’évolution a été cependant contrastée dans ses deux principaux segments d'activité: alors que des sorties de 2,1 milliards ont été enregistrées chez les clients institutionnels (après -7,6 milliards en 2023), des entrées de 4,6 milliards francs ont afflué auprès de la clientèle privée (+3,2 milliards un an plus tôt). Grâce à ces entrées et à l’évolution favorable des marchés financiers, les avoirs sous gestion ont crû de 10,8% pour s’établir à 229,1 milliards à fin 2024. Ces chiffres ont été plutôt bien accueillis par les marchés puisque l’action a clôturé la séance de vendredi à 65,2 francs, en légère baisse de 0,3%. En début de semaine, les actions de Julius Baer et d’UBS avaient, elles, terminé les séances de lundi et mardi en net recul à l’occasion de la publication de leurs résultats pour 2024.

«En résumé, nous avons confiance dans notre modèle d’affaires tout comme nous avons confiance dans les perspectives de croissance pour 2025.»

Comment l'établissement co-dirigé par Georg Schubiger et Christel Rendu de Lint aborde-t-il le nouvel exercice et quels sont ses attentes pour ses différents segments d'activité? Le point avec Christel Rendu de Lint, co-CEO et Head of Investments chez Vontobel.

Au cours de l’exercice 2024, les afflux nets de nouveaux capitaux ont été largement positifs du côté des clients privés alors qu’ils sont demeurés encore négatifs s’agissant des clients institutionnels. Anticipez-vous un retour à meilleure situation pour les activités avec la clientèle institutionnelle en 2025?

Il est vrai que nous avons connue des sorties en 2024 sur le segment institutionnel, mais la tendance était nettement meilleure qu’en 2022 et 2023. Nous abordons 2025 avec confiance. L’attentisme est derrière nous, l’appétit au risque est là. Même si ces deux segments sont différents et que les cycles qui les affectent le sont également, la clé fondamentale du succès y reste la même: l’expertise en investissement. Nous sommes bien positionnés pour servir ces segments qui sont complémentaires.

Sur la partie institutionnelle, l’idée est d’avoir un attelage qui est compétitif. Après, nous ne contrôlons pas les vents, qui n’ont pas toujours été en notre faveur ces deux dernières années, en particulier en tant que gestionnaire actif. Comme nous avons une gamme active, sans produits passifs ou fonds monétaires, cela se voit immédiatement sur les flux, ce qui ne serait pas forcément le cas chez certains de nos concurrents. Par contre, nous n’avons pas eu d’impact négatif sur nos marges qui sont restées parfaitement stables à travers tout ce cycle.

En termes de segments, nous anticipons que l’appétit au risque reviendra probablement d’abord dans le Fixed Income. Nous sommes bien positionnés pour capter ces flux. Nous avons également ajouté des équipes spécialisées pour compléter notre gamme, que ce soit dans notre offre comme les marchés privés, que ce soit en solutions d’investissement (Solutions). D’autres segments vont aussi revenir. C’est le cas des marchés émergents qui ont subi des sorties l’an dernier. Nous observons aussi des premiers signes d’intérêt pour la partie obligataire au sein des marchés émergents.

En résumé, nous avons confiance dans notre modèle d’affaires tout comme nous avons confiance dans les perspectives de croissance pour 2025.

Vous avez évoqué l’appétit pour le risque des investisseurs. Autour de la période de l’entrée en fonction de Donald Trump, il y a eu une période d’attentisme. Vos clients sont-ils désormais davantage disposés à investir actuellement?

La période d’attentisme est derrière nous. Nous le voyons par exemple dans certaines activités telles que la vente de produits structurés qui a repris.

«Dans tous les cas, il s’agit d’acquisitions réfléchies et pas simplement opportunistes.»

Les actions américaines ont moins bien performé que les actions européennes en janvier. Cela affecte-t-il le volume d’activité des transactions de vos clients?

S’agissant des actions américaines, il y a eu en quelque sorte un petit coup de grisou fin janvier avec l’arrivée de la société chinoise DeepSeek dans le domaine de l’intelligence artificielle, qui a passablement secoué certaines actions technologiques américaines. De telles situation ne sont pas forcément pour nous déplaire car cela oblige les clients à reconsidérer leur allocation d’actifs.

Comparé aux années précédentes, on est très loin de la situation qui prévalait en 2022 par exemple, lorsqu’à la fois les actions et les obligations ont fortement corrigé et que les clients préféraient garder leur avoir en cash.

Vous avez procédé à deux acquisitions l’an dernier. Avez-vous une stratégie planifiée bien réfléchie dans ce domaine ou votre approche est-elle avant tout opportuniste?

Nous avons une stratégie de croissance à la fois organique et inorganique. Nous avons deux raisons de procéder à des acquisitions: d’une part, dans un but d’économie d’échelle, à savoir celui d’augmenter nos volumes. Cela a été le cas avec IHAG Privatbank dont nous avons repris le book de clients.  

D’autre part, nous procédons aussi à des acquisitions afin d’étendre nos compétences. Cela a été le cas avec Ancala Partners. Mais dans tous les cas, il s’agit d’acquisitions réfléchies et pas simplement opportunistes.

Vontobel a placé au premier rang de l’indice Swiss Private Banking Identity Index jeudi. Qu’est-ce que cela représente pour vous?

Une reconnaissance est toujours appréciée. Cela confirme que nous avons un modèle d’affaire sain et tourné vers l’avenir. Nous avons plus de 100 ans d’histoire, mais gardons le profil bas et regardons vers l’avenir. 

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