Estampillée suisse en Suisse

Nicolette de Joncaire

2 minutes de lecture

La banque privée sait aussi convaincre les Suisses. Entretien avec Yves de Montmollin de la banque Bonhôte.

La banque Bonhôte se distingue des autres banques privées romandes. Par sa situation excentrée de l'arc lémanique et par sa clientèle à grande majorité suisse. Son directeur général, Yves de Montmollin, en dit qu'elle est la "banque privée des Suisses". Avec 10% de croissance de la masse sous gestion l'an dernier dont près de la moitié en afflux nets, son modèle parait bien se porter. L'essor de son fonds immobilier romand n'y est pas pour rien. Entretien.

Vous avez ouvert des bureaux à Lausanne en fin d'année et recrutiez récemment sur plusieurs postes clés. La banque Bonhôte va-t-elle continuer sa progression?
Oui, nous continuons de nous agrandir et nous continuerons à recruter. Notre croissance se fait pied-à-pied, depuis plus de 25 ans, sur un modèle radicalement différent de la plupart des banques privées car notre clientèle est pour 85% composée de résidents suisses. Notre savoir-faire, c'est "le Suisse en Suisse". Un modèle qui offre des marges plus réduites que celui des autres banques privées suisses mais sur lequel il y a une vraie place à prendre, avec un service de proximité très personnalisé que d'autres établissements n'offrent pas ou plus. Notre croissance sur l'arc lémanique est à l'origine de l'ouverture de nos bureaux de Lausanne où nous avons été très bien accueillis.
«Notre fonds Bonhôte-Immobilier avoisine le milliard de francs
ce qui en fait l’un des plus importants de Suisse romande.»
Une partie de votre clientèle est toutefois internationale. Pourquoi s'est-elle adressée à une banque neuchâteloise?
Pour des raisons historiques. Dans les années 1990, la promotion économique de Neuchâtel a attiré des trusts, principalement d'origine anglo-saxonne –sauf américains bien entendu – grâce à une fiscalité favorable. Les avantages fiscaux ont disparu depuis mais la banque avait développé alors une expertise pointue dans le domaine de la planification successorale qui lui a permis de conserver cette clientèle. Nous ne serions d'ailleurs pas défavorables à un développement plus orienté vers l'international pour mieux équilibrer revenus et marges.
Quel est votre produit phare?
Certainement notre fonds Bonhôte-Immobilier, lancé en 2006. Investi principalement dans le parc résidentiel romand, il avoisine le milliard de francs ce qui en fait l’un des plus importants de Suisse romande.
D'où vient ce succès?
L'un des aspects est que ce type de fonds offre aux porteurs de parts une fiscalité allégée tant sur le plan de l'impôt sur la fortune que sur le plan de l'impôt sur le revenu. Les cantons ont consenti ces avantages car il est de leur intérêt que les biens immobiliers soient propriété de fonds de placement qui tendent à mieux entretenir les immeubles que les particuliers.
«Avec un minimum de sens éthique, il est évident
que certains titres doivent être exclus de tout investissement.»
Pourquoi vous être engagé dans Bonhôte Funds Solution?
Dans le but de fédérer un groupe d'intérêt et d'expertise dans la sélection de gérants d'actifs. Le concept a été lancé avec Bordier Finlab (de la banque genevoise Bordier) avec laquelle nous sommes associés dans cette aventure avec une quinzaine d’autres investisseurs. L'objectif n'est pas uniquement de distribuer les fonds mais aussi de nous engager financièrement sur des idées intéressantes susceptibles de répondre aux besoins de clients qualifiés. Cette mise de départ permet aux gérants choisis d'atteindre une certaine masse critique qui garantit leur survie, puis leur développement. Nous constatons que cette plateforme communautaire est un extraordinaire vecteur de rencontres.
Quelle place prend chez vous la finance responsable?
Nous nous sommes tournés très tôt vers la finance durable: la banque Bonhôte fut l'un des membres fondateurs de Swiss Sustainable Finance. En tout état de cause, avec un minimum de sens éthique, il est évident que certains titres doivent être exclus de tout investissement. C'est en premier lieu dans le cadre de mandats de gestion pour le compte de fondations charitables puis pour des fondations de prévoyance que nous avons développé notre propre "radar" de valeurs ESG. Dans le but d'aligner leurs investissements sur le sens de leur mission. Aujourd'hui, la gestion se teint en vert, le goût pour des placements orientés vers un futur durable se développe au sein d'une clientèle de jeunes et de femmes. Nous offrons quelques propositions très pointues, développées avec Angela de Wolff de Conser Invest SA, mais elles ne conviennent pas à tout le monde et nous aimerions en vendre davantage. En vérité, nous constatons que le monde institutionnel reste très conservateur et que les institutions publiques demeurent frileuses. La Suisse n'est peut-être pas si à la pointe que certains l'imaginent.