Quel sera l’impact du Brexit sur les ABS?

Elena Rinaldi, TwentyFour Asset Management

2 minutes de lecture

Le marché britannique des ABS offre actuellement des revenus intéressants mais la question du Brexit préoccupe les investisseurs.

 

Cette année a été faste pour les obligations en livres sterling, en particulier sur le marché des ABS. Avec la fin du programme de financement à long terme, le «Term Funding Scheme», de la Banque d'Angleterre et le retour sur le marché des émetteurs bancaires traditionnels, le volume d'émissions a atteint 25 milliards d'euros répartis sur 38 opérations.

Si l’offre a été abondante, comment la demande a-t-elle évolué et, en particulier, quel sera l'impact du Brexit sur les cours et la volatilité des ABS et dans quelle mesure ce marché pourrait être affecté par les sorties de capitaux d’investisseurs européens? Il n'est pas facile de répondre à cette interrogation mais l’analyse de la demande des investisseurs cette année donne un certain nombre d’indications intéressantes.

Toutes les tranches ont vu les rendements s’écarter d’environ 20 points de base
et un certain nombre de transactions n’ont pu que difficilement aboutir.

En premier lieu, le niveau des souscriptions a été élevé dans tous les secteurs, qu’il s’agisse des créances hypothécaires résidentielles titrisées de première qualité, les RMBS britanniques de première qualité, des titres adossés à des crédits automobiles ou encore des crédits hypothécaires commerciaux titrisés (CMBS). Les tranches «mezzanine», généralement de taille beaucoup plus petite que les tranches «senior» notées AAA, ont été sursouscrites plus de deux ou trois fois, voire davantage, ce qui reflète l'appétit d’un certain nombre d’investisseurs pour la partie de la structure du capital qui offre un rapport risque/rendement plus intéressant. Pour les tranches «senior», qui constituent généralement environ 85% du volume de chaque opération, les demandes de souscriptions ont représenté en moyenne entre 1,2 à 2 fois les montants émis.  

Cela n’a pas empêché le marché de connaître un certain ralentissement durant la période estivale. Toutes les tranches ont vu les rendements s’écarter d’environ 20 points de base et un certain nombre de transactions n’ont pu que difficilement aboutir. Le contexte géopolitique défavorable explique en partie cette évolution qui reste néanmoins essentiellement due à la conjonction d’une abondance de nouvelles émissions et d’un marché estival peu actif. Du fait des vacances, les émetteurs ont dû se disputer l'attention d’un cercle réduit d’investisseurs, et cette concurrence accrue s'est traduite par des écarts de rendement plus intéressants.

Les baisses de cours ne devraient pas être provoquées
par des sorties de capitaux européens.

La demande existe, mais d'où vient-elle? Les statistiques indiquent que les opérations réalisées au Royaume-Uni sont souscrites à hauteur de 90 à 95% par des investisseurs britanniques. Certains émetteurs britanniques ont également proposé des emprunts comportant uniquement des tranches libellées en dollars ce qui a évidemment intéressé des acheteurs provenant principalement des États-Unis. Par conséquent, compte tenu de cette structure de la demande, la sortie éventuelle des investisseurs européens aurait un impact limité. Nous avons cependant relevé que la demande européenne a été plus élevée (15-25%) que d'habitude pour trois opérations au Royaume-Uni. Elle provenait de grandes institutions européennes qui viennent  généralement sur le marché avec de gros ordres lorsque les prix sont intéressants. Et il semblerait que leur décision d'investir sur le marché britannique des ABS ne soit pas liée à une analyse crédit mais une recherche de valeur relative. De fait, ces opérations ont été conclues lors d’une période de volatilité accrue et donc à de meilleures conditions que celles d'autres émissions. C'est une stratégie que nous apprécions dans la mesure où ces investisseurs représentent une sorte un filet de sécurité contre la volatilité: en entrant sur le marché lorsque les rendements commencent à s'écarter, ils contribuent à leur stabilisation.

Il paraît toutefois important de rappeler que les ABS sont des titres négociés sur le marché. Par conséquent, si les négociations concernant le Brexit devaient échouer et se traduire par un repli général des investisseurs en direction des valeurs sûres, le marché des ABS connaîtrait probablement une hausse de la volatilité et les rendements s’écarteraient. Cela dit, étant donné la structure actuelle de la demande pour les transactions au Royaume-Uni, les baisses de cours ne devraient pas être provoquées par des sorties de capitaux européens. Pour l’heure, comme les fondamentaux restent solides, nous sommes satisfaits du niveau de revenus qu'offre actuellement le marché britannique des ABS.