Pourquoi l’accord du Vendredi saint reste important

Christopher Smart, Barings

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Le maintien de la paix en Irlande du Nord a également d'importantes répercussions sur l'économie et les investissements.

© Keystone

Les investisseurs devraient jeter un second regard sur l'Europe, malgré les craintes d'inflation et de récession. En effet, le continent affiche d'un taux de chômage historiquement bas, d'un système bancaire qui a largement résisté aux récentes secousses en provenance de Suisse, et de mesures de l'activité économique qui sont solidement en expansion et continuent d'augmenter.

Alors qu'ils ne semblent avoir qu'un rapport lointain avec la fin du conflit civil en Irlande, l'accord de 1998 renforce les arguments en faveur de l'investissement. À l'occasion du 25e anniversaire de l'accord qui a mis fin à l'un des chapitres les plus tragiques de l'histoire de l'Europe, cette petite île a joué un rôle indéniable dans la cohésion de l'Europe. En effet, la crainte d'une rupture de cette paix précieuse a contribué à clarifier les liens permanents du Royaume-Uni avec l'Union européenne et à renforcer l'un des projets politiques les plus importants de notre époque.

La cohésion politique croissante des 27 membres restants de l'UE témoigne de sa force économique actuelle et montre pourquoi les investisseurs devraient y prêter attention. Signé le 10 avril 1998, l'accord du Vendredi saint a mis fin à des décennies de conflits civils douloureux et de stagnation économique. La paix qui s'en est suivie a toutefois été perturbée par le Brexit, lorsque l'Union européenne a insisté pour que les marchandises traversant sa frontière entre le nord et le sud soient inspectées. Des menaces d'abrogation de l'accord de séparation plus large ont été proférées, mais Londres a fini par comprendre que les risques de diviser à nouveau l'Irlande et de rompre totalement avec Bruxelles étaient trop élevés.

La pandémie a poussé les dirigeants européens à une coopération beaucoup plus étroite.

De plus, l'accord de Windsor conclu le mois dernier est un compromis raisonnable. Pour éviter de nouvelles barrières qui diviseraient à nouveau l'Irlande du Nord de la République d'Irlande, Londres a effectivement concédé qu'elle restait inaltérablement ancrée dans l'Europe. Bruxelles a fait ses propres concessions sur la manière de mettre en œuvre les inspections, mais elle a défendu avec succès sa frontière et l'autorité ultime de la Cour européenne de justice pour trancher les différends.

Grâce à cet accord, le Royaume-Uni peut désormais renforcer la coopération européenne en matière de réglementation des services financiers et de marchés de l'énergie. L'Europe peut véritablement s'atteler à une intégration plus poussée, à une croissance plus forte et à un poids politique plus important.

Politiquement, l'Europe n'a jamais été aussi forte. En fin de compte, le départ de la deuxième économie de l'Union européenne a renforcé la coopération entre les différentes capitales du continent. Les anciennes discussions sur le «Grexit» et l'«Italexit» se sont évaporées. Une demi-douzaine de pays font officiellement la queue pour rejoindre l'Union.

Parallèlement, le calcul de Moscou selon lequel la perte éventuelle du gaz russe affaiblirait le soutien européen à l'Ukraine s'est retourné contre lui. Construite entièrement sur la base du droit international, l'Union européenne a réagi fermement à l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Une action résolue (et un hiver exceptionnellement chaud) a permis de garantir un approvisionnement en gaz alternatif suffisant et de poser les jalons d'une diversification énergétique longtemps différée.

Par ailleurs, une coopération plus étroite s'est développée à mesure que l'Europe a acquis une dimension politique dans son approche de la Chine, qu'elle considérait auparavant comme une opportunité purement économique. Pour un investisseur, cette cohésion politique se traduit par un investissement beaucoup plus cohérent.

La pandémie a poussé les dirigeants européens à une coopération beaucoup plus étroite. La décision d'autoriser des déficits budgétaires plus importants a permis d'amortir l'effondrement de la demande dû aux fermetures d'entreprises. L'aide à la pandémie, qui a permis d'indemniser partiellement les entreprises qui ont maintenu leurs travailleurs en activité, a aidé l'Europe à éviter la hausse massive du chômage et les transferts inflationnistes qui en ont découlé et qui ont affecté la reprise aux États-Unis.

Ensuite, l'engagement de stimuler les investissements pour la reprise et de favoriser la transition climatique a conduit à la création d'un projet européen Next Gen, d'une valeur de 800 milliards d'euros, qui sera effectivement financé par des obligations émises conjointement. Une approche plus souple des limites de la dette et du déficit inscrites dans le traité de Maastricht laisse également entrevoir des institutions enfin plus engagées en faveur de la croissance et de l'application stricte des règles.

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