Italie: après les belles paroles ... de vilains actes?

Michel Girardin, Université de Genève

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Ce week-end, l'Italie a affiché son ras-le-bol des partis gouvernementaux, incapables de sortir le pays d'une ornière où faible croissance rime avec crédits en souffrance. Sans parler de la dette publique, toujours plus colossale.

Depuis bientôt 30 ans, l'Italie vit avec une dette publique qui dépasse largement son produit intérieur brut. Et les finances publiques ne vont guère s'améliorer si les nouveaux élus tiennent leurs promesses électorales.

Les promesses électorales du premier parti d'Italie - le très populiste Mouvement des 5 étoiles -  vont coûter plus de 100 milliards d'euros. La coalition victorieuse de la droite veut introduire un taux d'imposition unique sur les revenus des ménages. La «flat tax» pour relancer la croissance? «Attend et espère, car l'heure s'approche...» chantaient les fascistes de Mussolini, une extrême droite d'ailleurs bien présente dans la coalition qui va prendre les commandes politiques. Tous les économistes dignes de ce nom savent que l'équité de l'impôt, c'est sa progressivité. Un taux unique favorise les hauts revenus et pénalise la classe moyenne, celle par qui passe la croissance du pays. C'est un non-sens économique d'autant plus criant de vérité que l'octogénaire compte récupérer le manque à gagner pour les finances de l'Etat avec une guerre contre l'évasion fiscale: parole, parole, parole...

Le refrain du tube de Dalida, Mario Draghi - Président de la Banque Centrale Européenne - le connait tout aussi bien. Lui, qui dans son fameux discours de juillet 2012 a sauvé un Euro qui partait à la casse. Avec 3 mots: «whatever it takes». La BCE allait faire tout ce qui était nécessaire pour préserver l'euro. De quoi casser les reins à tous les Hedge Funds qui vendaient allègrement la devise européenne à découvert. Super Mario a bien rajouté «... dans le cadre de notre mandat», les marchés n'en ont eu guère: seule comptait la détermination du grand Argentier.

Depuis le discours de Draghi, le rendement des obligations italiennes s'est écroulé, de quelques 6% à 2% aujourd'hui, engendrant un fantastique rally obligataire. Tout ça avec un discours bien creux: qu'aurait pu faire la BCE s'il avait vraiment fallu sauver l'euro? Le racheter à tour de bras? Mettre les taux d'intérêt à 12%? Confrontée à une situation similaire en 1992, la Banque d'Angleterre avait bien dû jeter l'éponge face aux attaques de George Soros.

Les nouveaux élus de la péninsule devront s'attaquer aux problèmes économiques de l'Italie. Et l'écart avec les promesses électorales risque d'être marqué. Avec une dette publique qui approche 140% du PIB - un record que seule la Grèce dépasse - il faudra bien couper dans les excès de l'Etat et passer aux actes: que la communauté financière juge aujourd'hui que les obligations italiennes sont moins risquées que les obligations américaines, simplement parce qu'un président de Banque centrale lance de belles promesses, voilà qui est un peu fort ... de mozzarella.

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