Départ pour l’UE: impacts en matière de prévoyance

Edric Speckert, PensExpert SA

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Pour les caisses de pension et les prestataires de libre passage, le départ d’assurés vers des pays de l'UE est habituel. Certaines spécificités fiscales sont toutefois à considérer.

Les trajectoires professionnelles modernes sont souvent caractérisées par diverses interruptions. Cela peut par exemple être le cas pour une formation continue, du temps consacré à la prise en charge de proches ou encore en raison de départs définitifs à l’étranger. Tous ces scénarios ont pour conséquence que les assurés doivent quitter leur institution de prévoyance avant qu’un «cas de prévoyance» tel que la vieillesse, le décès ou l’invalidité ne survienne. La fortune de prévoyance devient alors un avoir de libre passage.

Si une personne décide de déménager dans un pays de l’UE/AELE, la caisse de pension de l’ancien employeur doit clarifier ce qui doit être fait de l’avoir de libre passage. Comme un transfert auprès de la caisse de pension d’un nouvel employeur n’est pas possible, les fonds peuvent soit être versés en espèces, soit transférés vers une, voire deux, institutions de libre passage. Cependant, il est à noter que les fonds de la part obligatoire de la LPP ne peuvent pas être versés en espèces en cas de départ définitif si les assurés deviennent soumis à l’assurance sociale d’un pays de l’UE/AELE.

Une marge de manœuvre limitée pour les caisses de pension

Il arrive que des personnes qui pensaient quitter la Suisse définitivement finissent par revenir peu de temps après leur départ car les choses ne se sont pas passées comme prévu à l’étranger. Parfois, l’avoir de prévoyance a déjà été retiré, voir même dépensé. C’est certes problématique, mais les caisses de pension n’ont qu’une marge de manœuvre limitée en matière de contrôles.

Les fonds de prévoyance suisses placés dans des caisses de pension, des fonds de libre passage et des fonds du pilier 3a bénéficient d’un traitement fiscal privilégié au sein de l’UE et dans les pays de l’AELE.

En effet, si une personne demande le versement en espèces de sa prestation de libre passage dans le cadre d’un départ, la caisse de pension est uniquement en mesure d’exiger des documents tels que l’attestation de départ de la commune de domicile suisse, l’attestation de domicile de la commune à l’étranger et une copie du formulaire de demande de clarification à l’assujettissement aux assurances sociales. La caisse de pension ne peut généralement pas procéder à des investigations supplémentaires, sauf dans les cas suspectés d’abus.

Lorsque les assurés vivent déjà à l’étranger au moment du versement, la caisse de pension doit en outre prélever un impôt à la source selon les barèmes en vigueur au siège de celle-ci. Il est à souligner que plusieurs États de l’UE imposent des taxes élevées sur les retraits d’avoirs de prévoyance suisses. Il peut donc être avantageux pour les assurés que le versement prenne place avant le déménagement effectif. Cela permet d’éviter le prélèvement de l’impôt à la source, mais le capital versé doit être imposé dans la commune de départ en Suisse.

Un traitement fiscal privilégié pour les fonds de libre passage dans l’UE

A la place d’un versement en espèces, les fonds LPP peuvent être transférés dans des fondations de libre passage. Cette procédure est même parfois obligatoire, par exemple parce que des rachats ont été effectués dans la caisse de pension il y a moins de trois ans et que le délai de blocage est ainsi encore en vigueur. Lors d’un départ définitif vers l’UE/AELE, les prestataires de solutions de libre passage et les assurés doivent tenir compte de certains éléments importants sur le plan fiscal.

En principe, les fonds de prévoyance suisses placés dans des caisses de pension, des fonds de libre passage et des fonds du pilier 3a bénéficient également d’un traitement fiscal privilégié au sein de l’UE et dans les pays de l’AELE. La Suisse procède de la même manière avec les avoirs de prévoyance étrangers. Les systèmes sont certes différents, mais néanmoins coordonnés. Tant que les fonds sont déposés dans des comptes de libre passage, il n’y a généralement pas d’imposition sur la fortune et les revenus, et la plupart du temps, il n’y a pas non plus d’obligation de déclaration. Les prestataires de prévoyance ne sont donc pas tenus de respecter des obligations de déclaration plus strictes lorsque les assurés résident dans un autre pays de l’UE.

Il arrive toutefois que des États de l'UE tentent de mettre la main sur les avoirs de libre passage. L’Espagne, par exemple, argumente en partie que laisser les fonds en libre passage à la place de les obtenir par un versement en espèces relevait d’une décision purement individuelle. Pour des besoins fiscaux, les autorités partent alors de l’idée hypothétique qu'un versement a eu lieu. C'est alors à l'assuré, et non au prestataire de libre passage, de clarifier ces éléments et d'autres informations fiscales dans son nouveau pays de résidence.

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