Après l’accalmie dans le secteur bancaire, l’inflation revient sur le devant de la scène

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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La réaction rapide des responsables politiques a éloigné le spectre d’une crise bancaire systémique aux Etats-Unis et dans la zone euro.

Compte tenu de la défiance persistante quant à la rentabilité des banques, l’indice US KBW Bank accuse toujours un repli de 21% par rapport à son dernier sommet avant l’effondrement de la Silicon Valley Bank (SVB). Mais il s’est stabilisé, tandis que le marché dans son ensemble a récupéré la totalité du terrain perdu. L’indice S&P 500 est même en hausse de 2,9% par rapport à son niveau à la veille de la chute de la SVB.

Stabilisation en vue

Il y a dix jours, la publication des données hebdomadaires relatives au bilan de la Réserve fédérale américaine (Fed) a également laissé entrevoir une stabilisation. Les emprunts auprès du guichet d’escompte de la Fed sont tombés à 80 milliards de dollars, contre 110 milliards de dollars la semaine précédente. En revanche, les emprunts dans le cadre du Bank Term Funding Program ont grimpé de 54 à 64 milliards de dollars.

L’inflation reste trop élevée pour permettre un assouplissement monétaire dans l’immédiat.

Les marchés n’ont pas tardé à spéculer sur des baisses de taux directeurs dans le sillage de la chute de la SVB. Néanmoins, la stabilisation du système financier devrait permettre aux banques centrales de se focaliser à nouveau sur les fondamentaux macroéconomiques. En effet, l’inflation reste trop élevée pour permettre un assouplissement monétaire dans l’immédiat. Explication en trois points.

1. La lutte contre l’inflation reste prioritaire pour la Fed

«Le secteur des services n’a pas encore ralenti et (…) les salaires augmentent toujours à un rythme incompatible avec notre objectif d’une inflation à 2%», a récemment déclaré le président de la Fed de Minneapolis, Neel Kashkari.

Son homologue de la Fed de Richmond, Tom Barkin, a souligné que la Fed discutait d’un relèvement des taux directeurs de 50 points de base (pb) il y a quelques semaines encore. «Si l’inflation persiste, nous pouvons y réagir en relevant encore les taux», a-t-il ajouté.

2. Il est peu probable que les chiffres de l’inflation sous-jacente amènent la Fed à changer d’avis

L’indice «core PCE», le baromètre de l’inflation préféré de la Fed, est ressorti en hausse de 4,6% sur un an en février, contre 4,7% en janvier. En glissement mensuel, l’inflation sous-jacente a ralenti à 0,3%, contre 0,6% en janvier.

Ces chiffres n’ont pas empêché la présidente de la Fed de Boston, Susan Collins, de se montrer sceptique quant à la retombée de la pression inflationniste, qui n’est pas assez marquée à ses yeux pour justifier une inflexion de la politique monétaire.

3. Dans la zone euro, l’inflation persiste à un niveau élevé

Grâce à la baisse des prix de l’énergie, le taux d’inflation globale est tombé à 6,9% sur un an en mars, contre 8,5% en février. Il s’agit de la plus forte décrue en glissement mensuel depuis qu’Eurostat a créé cette série statistique en 1991. Néanmoins, l’inflation sous-jacente des prix à la consommation est remontée à 5,7% sur un an en mars, contre 5,6% en février.

Même s’il est peut-être trop tôt pour tabler sur une baisse des taux directeurs, la probabilité d’une fin plus précoce du cycle de resserrement monétaire a certainement augmenté.

Ces chiffres devraient maintenir la pression sur la Banque centrale européenne, qui devrait relever ses taux d’intérêt de 25 pb en mai ainsi qu’en juin. Sa présidente, Christine Lagarde, a déclaré que le Conseil des gouverneurs attend «une baisse durable des mesures de l’inflation sous-jacente pour être certains que la trajectoire de l’inflation converge vers notre objectif à moyen terme».

Dans l’ensemble, les banques centrales sont réticentes à l’idée de cesser de relever leurs taux étant donné la persistance d’une inflation marquée. Mais elles doivent aussi réfléchir à la façon de lutter contre l’inflation sans compromettre la croissance et la stabilité financière.

Privilégier les obligations

Dans ce contexte, il est recommandé de privilégier les obligations de qualité plutôt que les actions. Certes, ces dernières doivent rester une composante majeure des portefeuilles à long terme, mais les actions mondiales devraient générer des rendements limités et rester très volatiles pendant une bonne partie de l’année.

D’un point de vue tactique, même s’il est peut-être trop tôt pour tabler sur une baisse des taux directeurs, la probabilité d’une fin plus précoce du cycle de resserrement monétaire a certainement augmenté. Par conséquent, il est sans doute temps d’accroître l’exposition aux obligations, que la Recherche d’UBS a récemment relevées à Most Preferred.

Les obligations de qualité semblent intéressantes étant donné le niveau convenable des rendements et la possibilité de réaliser des plus-values en cas de ralentissement économique plus marqué. Les investisseurs qui ont des liquidités excédentaires feraient bien de s’assurer le niveau de rendement que cette classe d’actifs offre actuellement.

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