Mondialisation à la dérive. Europe sans boussole

Présélection prix Turgot 2018

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Jean-Marc Siroen.

Jean-Marc Siroen, ENS Cachan est professeur émérite à l’université Paris-Dauphine et a écrit de nombreux ouvrages sur la mondialisation commerciale et les relations économiques internationales.

L'avis du Club de présélection du prix Turgot
Christian Chouffier

Beaucoup de nos contemporains critiquent la mondialisation et le libéralisme soi-disant excessifs de notre époque et leur font porter la responsabilité de tous le maux, où presque dont souffrent les bientôt ex puissances commerciales, Europe et Etats-Unis en tête. L’auteur, à travers une étude détaillée des mondialisations et des libéralismes dans l’histoire récente, via l’analyse des relations internationales et commerciales, remet en question ces critiques et s’interroge sur le devenir de ces relations.

Les notions de mondialisation et de libéralisme commercial ont pris de nombreux visages depuis le XIXe siècle, que ce soit par leur étendue géographique ou par leur forme. Rien qu’au XXe siècle, de la SDN à l’OMC en passant par accords de Bretton Woods les relations économiques et commerciales ont balancé entre des phases de bilatéralisme et de multilatéralismes et des périodes d’ouverture et de protectionnisme. L’ouvrage montre bien d’ailleurs que le libéralisme affiché n’était souvent que très partiel en prenant les exemples de la Grande Bretagne et des Etats Unis de même que le multilatéralisme des accords commerciaux s’est souvent associé à des accords bilatéraux.

Qu’en est-il aujourd’hui? La remise en question de l’hégémonie commerciale et stratégique des Etats-Unis par la Chine ramène ceux-ci vers leur tendance naturelle à l’isolationnisme et remet profondément en cause les accords commerciaux multilatéraux qui ont dessiné le paysage économique depuis la seconde guerre mondiale auquel nous sommes habitués. La Chine pousse ses pions, elle aussi par des accords bilatéraux, en particulier  dans le cadre des routes de la soie et l’Europe… se cherche en proie aux différents entre états et règles de décisions collégiales inadaptées.

Faut-il réellement mettre tous nos maux sociétaux sur le dos du libéralisme et du mondialisme en péril comme le font les populistes qui émergent un peu partout?  Certes les fractionnements de chaine de valeur ont fortement perturbé, et ce de manière plus rapide qu’autrefois les équilibres économiques des états industriels au bénéfice des puissances émergentes mais ils ont aussi permis une réduction massive de la pauvreté dans le monde et accru le niveau de vie de tous, même si les écarts de revenus ont augmenté. Quant à l’Europe passoire l’analyse rationnelle des accords commerciaux passés montre qu’elle en a grandement profité et qu’elle a su être bien plus protectionniste que le pensent la plupart.

En revanche la croissance rapide des activités à fort composant intellectuel, qui sont très mobiles géographiquement et fiscalement, remet en cause le financement des états par leur facilité à aller chez le moins disant fiscal. Ceci amène à des politiques fiscales de plus en plus contraignantes, en particulier dans les états providence créant ainsi le terreau du populisme.