Mitiger les impacts négatifs sur la nature

Nicolette de Joncaire

3 minutes de lecture

«Le principe applicable aux fonds de biodiversité est similaire à celui des fonds environnementaux. Sauf que nous n’en sommes qu'au tout début», explique Isabelle de Gavoty de Mirova.

 

Axés sur une tendance de marché jugée porteuse, les fonds thématiques de Mirova se déclinent sur l’environnement en Europe (depuis 2007), la transition climatique au niveau mondial (depuis 2016), les femmes leaders et la diversité (depuis 2019) et très récemment la biodiversité. A la tête de l’équipe Thematic Equities de la société de gestion, Isabelle de Gavoty entend s’attaquer à d’autres terrains, autour de l’action sociale principalement, avec des stratégies ciblées sur l’éducation, la santé ou encore les besoins élémentaires. A noter, tous les fonds de Mirova sont «vert foncé» c’est-à-dire classés à l’article 9 de la SFDR. Quelques questions en marge du Thought Leadership Summit 2024 de Natixis IM. 

Comment sélectionnez-vous les entreprises? Dans votre fonds Europe Environnement par exemple. 

Ce fonds est dédié aux sociétés cotées européennes qui répondent le mieux aux enjeux environnementaux.  Il adopte une approche thématique originale basée sur les tendances de long terme pour identifier les opportunités d'investissement sur toute la chaîne de valeur et sur l'ensemble des secteurs d'activité et sélectionne des sociétés capables de créer de la valeur à long terme grâce à une analyse financière approfondie pour s'assurer de la qualité du positionnement stratégique, du management et de la solidité financière.

Nous mesurons l’impact positif d’une société par un modèle qui nous est propre et nous permet de classer les entreprises en trois catégories: à faible impact (seuls 10 à 20% du chiffre d’affaires a un impact positif), à impact modéré (l’impact concerne entre 20 et 50% du chiffre d’affaires), à impact élevé (plus de 50% du chiffre d’affaires).

Les solutions vertes ne représentent encore souvent qu'une partie de l'offre des entreprises engagées dans la transition. Afin de soutenir ce développement, Mirova peut choisir d'investir dans ces sociétés dès lors qu'elles respectent les standards minimums exigeants que nous nous fixons et publions sur notre site internet. Ainsi les entreprises de mobilité décarbonée sont éligibles bien que leur offre puisse encore intégrer des véhicules thermiques, et les producteurs d'énergie dont le mix est fortement décarboné (moins de 300gCO2/kWh) sont investissables dès lors que leur exposition aux énergies fossiles est très résiduelle, avec un objectif à court terme de transition complète.

Le principe sous-jacent des fonds environnementaux (ou de transition climatique) est de sélectionner des entreprises dont les produits et services mitigent l’impact négatif du changement climatique. 

L’univers de référence est assez vaste. Comment le traitez-vous?

En le répartissant par secteur et en confiant chaque secteur à l’un de nos dix analystes qui se divisent en spécialistes de l’énergie, de la construction, des équipementiers, de la technologie (semi-conducteurs, logiciels) ou de la consommation.  Nous sommes particulièrement attentifs aux questions d’énergies renouvelables, de maintenance des équipements (EIM), d’utilisation durable des sols, de circularité et de packaging. Dans chaque domaine, nous étudions les moteurs de croissance sur le long terme – organiques et externes-, la génération de cash, la capacité d’investissement, la rémunération des actionnaires et d’autres paramètres qui nous permettent de dériver ce que nous considérons comme la fair value de l’entreprise. 

La gouvernance est-elle l’un des points auxquels vous êtes particulièrement attentifs?

C’est un point-clé. Etant nous-même dans ce cas, nous cherchons à nous assurer que les intérêts des actionnaires minoritaires soient préservés et que l’entreprise privilégie de manière équilibrée croissance et dividende. Il est bien sûr essentiel que le conseil d’administration fasse preuve d’une réelle indépendance. 

Il est beaucoup question de relocalisation, de bouleversement des chaines d’approvisionnement. Est-ce un vrai sujet?

Oui, c’est une lame de fond qui porte l’emploi aux Etats-Unis et, dans une moindre mesure, en Europe. Les Etats-Unis font également preuve de hausses de productivité notables. 

Quelques mots de votre stratégie Women leaders & Diversity?

Elle investit principalement dans des actions mondiales qui contribuent à la réalisation des objectifs de développement durable de l'ONU en mettant fortement l'accent sur les 5e et 10e objectifs: diversité des genres et autonomisation des femmes et réduction des inégalités. Nous y adoptons une approche fondamentale qui prend en compte à la fois l’analyse financière et les critères ESG définis par notre équipe de recherche en investissement responsable. 

Basée sur la conviction, c’est une gestion sans contrainte de capitalisation boursière et d'allocation sectorielle qui sélectionne les entreprises sur une analyse financière approfondie, la qualité des équipes de direction et la solidité financière en visant une surperformance sur le long terme. 

La biodiversité est un sujet encore peu couvert, surtout par les fonds d’actions cotés. Comment vous-y prenez-vous?

Le principe sous-jacent des fonds environnementaux (ou de transition climatique) est de sélectionner des entreprises dont les produits et services mitigent l’impact négatif du changement climatique. Le principe est le même pour la biodiversité sauf que nous n’en sommes qu’au tout début, là où en était l’investissement dans la transition il y a dix ans. Par ailleurs nous considérons également les sociétés pour qui la biodiversité est un enjeu et qui ont des bonnes pratiques en la matière. Alors qu’en matière de climat, les règles et les outils de mesure se sont perfectionnés et les données quantifiables multipliées, il n’existe encore que peu d’instruments de travail pour investir en faveur de la biodiversité. Pour mieux contribuer à l’avancement de ces instruments, Mirova a activement participé à la construction du cadre de la TNFD1. Nous avons également dès 2020 participé à une initiative collective visant à développer un outil permettant aux investisseurs de mesurer l'impact de leurs investissements en matière de biodiversité, pour lequel ont été sélectionnés Iceberg Data Lab et I Care & Consult.

Les investisseurs expriment-ils un sens de leurs responsabilités en matière de biodiversité?

Oui mais nous n’en sommes qu’aux débuts. Les investisseurs essaient de comprendre la matière et peinent encore à identifier les bons actifs. 

 

1 Taskforce on Nature-related Financial Disclosure : un consortium de participants des secteurs public et privé qui aident les investisseurs à évaluer l’impact des entreprises et à réorienter les investissements vers les plus vertueuses en matière de protection de la nature. 

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