La santé se réinvente

Salima Barragan

2 minutes de lecture

La télémédecine entrera dans les mœurs, estime Wesley Lebeau de CPR AM.

Consultations médicales virtuelles, plateformes de diagnostiques, vaccins à base de cellules cultivées; crise sanitaire oblige, la santé se met au goût du jour pour relever les défis du confinement, produire des tests en quantité et trouver un vaccin contre le COVID-19. Compté auparavant en mois - voire en années – son essor s’est accéléré en quelques semaines. Le point avec Wesley Lebeau, spécialiste des tendances disruptives chez CPR Asset Management.

L’immunothérapie, qui traite habituellement le cancer, pourrait permettre de trouver un vaccin contre le COVID-19. Par quel procédé?

Les traitements par immunothérapie n’utilisent pas des échantillons du virus lui-même, comme les vaccins habituels, mais s’appuient sur l’ARN messager créé à partir de cellules cultivées en laboratoire. Cette technique permet de stimuler la fabrication de protéines similaires au virus afin que l’organisme développe ses propres anticorps. Les processus de découverte en biologie vivante sont simples, mais il est difficile de produire des cultures à très grande échelle. Ce défi explique les rachats récents de petits laboratoires par des grands groupes.

La télémédecine permet aux patients d’avoir accès
à un médecin généraliste à partir de leur smartphone.
Dans quelle phase clinique ces recherches se situent-elles?

Il existe 70 projets; cependant les tests cliniques des leaders sont dans la phase une. C’est-à-dire que le vaccin est prêt à être testé sur une population de volontaires. L’entreprise Moderna, basée à Washington, a bénéficié de 400 millions de dollars de subvention de la part du gouvernement américain pour développer son vaccin. Son Chief Executive Officer est un ancien de Bio Mérieux. BioNtech, une société allemande cotée au Nasdaq, dont la fondation Belinda et Bill Gates est l’actionnaire de référence, a signé un partenariat avec Pfizer pour développer un vaccin. Des procédures d’urgence pourraient permettre à ces vaccins d’être rapidement acceptés.

Depuis peu, les tests de diagnostic connaissent un essor sans précédent…

Actuellement, 41 immuno-diagnostiques sont en attente d’un accord réglementaire. Le groupe américain Abbott a obtenu très récemment l’accord de la FDA pour un test du COVID-19 réalisable en seulement 5 minutes. La semaine passée, les tests de diagnostic de Roche ont été approuvé. Sa plateforme permettra d’effectuer 15'000 tests fiables par jour.

La demande en télémédecine a explosé depuis le début de la crise. Les consultations virtuelles rentreront-elles dans les mœurs?

La télémédecine permet aux patients d’avoir accès à un médecin généraliste à partir de leur smartphone. Cette branche récente est déjà bien développée sur le marché américain car il souffre d’un système de santé défaillant. Les entreprises souscrivent aux abonnements des plateformes leaders telles que Teladoc qui offre un accès à un médecin en moins de 10 minutes. Il s’agit d’un modèle d’affaires basé sur le résultat car le médecin n’est rémunéré qu’après guérison du patient. La télémédecine surfe sur la tendance d’efficacité et de réduction des coûts du secteur de la santé. Ce système va perdurer car autant le corps médical que les patients ont pris conscience de son utilité.

Good Doctor, la plus grande plateforme chinoise, a déclaré qu’elle
avait 3 millions d’abonnés par mois à la fin de l’année dernière.
Comment la technologie peut-elle se substituer aux examens traditionnels des médecins?

De plus en plus d’équipements permettent d’optimiser les consultations. Par exemple, il est possible de faire un électrocardiogramme avec la dernière version de l’Apple Watch grâce à la fonction ESG déjà activée sur certains marchés. Ce procédé permet de diagnostiquer avec sérieux des problèmes cardiaques à distance. D’autres systèmes appliquent des algorithmes d’intelligence artificielle pour assister les médecins.

Qui sont les leaders dans le domaine?

En Chine, les patients se sont rués vers des plateformes telles que Good Doctor, Wenyisheng de Baidu et Alibaba Health Information Technology. Good Doctor, la plus grande plateforme chinoise, a déclaré qu’elle avait 3 millions d’abonnés par mois à la fin de l’année dernière. Aux Etats-Unis, Teladoc a indiqué récemment que ses visites hebdomadaires avaient bondi de 50% sur une semaine. Cette société a en outre réalisé plusieurs acquisitions en Europe.

Comment la Suisse se positionne-t-elle sur la télémédecine?

En Europe, il y a une forte poussée des gouvernements pour utiliser ces plateformes car elles réduisent les risques sanitaires mais la Suisse semble encore un peu réticente. Il est peu probable de voir des nouveaux acteurs locaux émerger. En revanche, de grandes plateformes pourraient s’implanter sur le marché helvétique.