A l’abri des mauvaises surprises

Salima Barragan

2 minutes de lecture

Pierre Debru de WisdomTree: «la fuite vers la qualité a commencé».

Après la correction des grandes sociétés technologiques et la débâcle d’une poignée de banques (y compris un établissement bien de chez nous), qui sont les prochains sur la liste? Selon WisdomTree, la tension est visible chez les investisseurs qui tendent à se réfugier dans les actions de qualités à l’abri des tumultes. De plus, la décorrélation entre les performances des obligations et des actions qui permet de contenir les aléas boursiers devrait recommencer à fonctionner…une fois que la Fed aura géré l’inflation. Entretien avec Pierre Debru, responsable de la gestion quantitative et des solutions multi asset.

Depuis 10 semaines, les actions de croissance dominent les titres «value». La tendance sera-t-elle durable?

Il est trop tôt pour l’affirmer, car nous sortons de 8 ans de domination des titres de croissance sur la valeur. Ces derniers sont en déséquilibre: leur retour à la moyenne n’a pas eu lieu. La valeur a donc encore de beaux jours devant elle.

De même, la rotation vers la valeur de l’année dernière était guidée par les cycles de taux des banques centrales. Les sociétés de croissance doivent dorénavant dépenser davantage pour emprunter ce qui va freiner leur développement. Les taux d’intérêt grossissent les facteurs d’actualisation de leur croissance future, érodant ainsi leurs valorisations actuelles.

Notre scénario table sur une récession qui constitue un contexte propice pour les actions de qualité résilientes aux aléas boursiers.
Quels scénarios envisagez-vous pour les mois à venir?

Les données économiques se dégradent, en raison du délai des effets des politiques restrictives sur l’économie, avant la pause ou le pivot des banques centrales. La probabilité de récession aux USA reste très forte et les banques devront redoubler d’attention, ce qui devrait en théorie soutenir les actions de valeurs. Mais en réalité, la réponse n’est pas binaire: lorsque les marchés sont tiraillés, l’on observe une fuite dans la qualité vers des entreprises rentables, jouissant de liquidités abondantes et rétribuant généreusement leurs actionnaires.

Quelles stratégies factorielles privilégiez-vous dans un environnement de taux d’intérêt et d’inflation?

Durant l’exercice 2022, caractérisé par une augmentation du coût de la vie et des taux, les facteurs de haut dividende et de valeur ont bien marché. Mais 2023 sera une année différente, car l’on ne s’attend plus à 4 ou 5 hausses de taux d’intérêt. De plus, notre scénario table sur une récession qui constitue un contexte propice pour les actions de qualité résilientes aux aléas boursiers. Les investisseurs l’ont déjà bien compris: la fuite vers la qualité a commencé.

Le portefeuille traditionnel balancé de type 60/40 est-il de retour après des complications en 2022, lorsque les actions et les obligations affichaient toutes des pertes?

Ce modèle était handicapé par les taux nuls. Avec des obligations qui rapportent entre 3 à 5%, la partie obligataire offre enfin un retour et une diversification pour compenser la baisse des actions.  La décorrélation de ces deux classes d’actifs, qui fait la force de ce modèle, est de retour, car les banques centrales auront à nouveau de la marge de manœuvre pour baisser leur taux afin de soutenir l’économie. Ce contexte baissier pour les actions est positif pour les obligations. Mais ce phénomène ne se produira pas avant les 18 prochains mois. D’ici là, les banques centrales doivent encore gérer l’inflation…

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