Investir dans l'or numérique

Anna Aznaour

2 minutes de lecture

Achat et vente de lingots d'or transformés en jetons numériques expliqués par Chloé Desmonet, responsable des projets DLT chez MKS.

«Laisse ton argent dans l’obscurité pour qu’il te permette de voir la lumière.» Le proverbe fait sans nul doute référence à l'élément au numéro atomique 79. Aujourd’hui, à l'ère du digital, cette valeur refuge sort pourtant de l'ombre. «Dorénavant, grâce à la tokenisation, l'acheter et le vendre en ligne sera rapide, facile et sécurisé», promettait Chloé Desmonet à la CREA Digital Day 2020. Éclairage sur les tenants et les aboutissants de cette opération par la responsable des projets Or Numérique (Digital Gold) et chaine de blocs (blockchain) chez MKS.

Comment, concrètement, se déroule votre processus de digitalisation de l’or?

Nous prenons tout d’abord le format le plus liquide d’or physique, c'est-à-dire un lingot LBMA standard du marché de 12,5 kilos (400 onces troy) et pur à 99,5%. Ensuite, après l’avoir assuré, nous le stockons dans notre coffre-fort en Suisse avant de passer à sa digitalisation. Ce dernier processus a comme objectif de transformer cette barre précieuse de plus de 10 kilos en jeton numérique (token DGLD) aussi immatériel qu’unique en son genre. Pour ce faire, nous lui attachons de manière indélébile une référence digitale avec deux clés: privée et publique. À partir de là, chaque lingot transformé en jeton peut être acheté ou vendu en ligne sur la plateforme d’échange Blockchain Exchange et sans aucune confusion possible, puisqu’il possède des identifiants qui le rendent inconfondable. 

«Les jetons sont en général détenus par le client directement,
qui peut ouvrir en ligne un portefeuille numérique pour y stocker ses avoirs.»
Et quelle garantie que cet or soit sourcé de manière responsable?

Tous les raffineurs accrédités par la London Bullion Market Association (LBMA) qui vendent des métaux précieux sur le marché international documentent et garantissent la provenance éthique de leurs produits. Cette certification, obtenue grâce aux audits annuels qui documentent l’intégralité de la chaîne d’approvisionnement selon le guide de LBMA, s’inscrit dans un cadre légal bien défini qui veille au respect des lois anti-blanchement d’argent et de lutte contre le financement du terrorisme.

De quelle manière sont stockés les jetons d’or et qui est vraiment propriétaire de l’or tokenisé?

Les jetons sont en général détenus par le client directement, qui peut ouvrir en ligne un portefeuille numérique pour y stocker ses avoirs. Cependant, pour éviter le poids administratif d’une telle gestion, certains vont préférer passer un contrat avec un gardien numérique (digital custodian) afin qu’il stocke leurs jetons. Toute la quantité d’or stockée en Suisse n’appartient qu’à ses propriétaires, c'est-à-dire les détenteurs des DGLD. Les opérateurs du coffre ainsi que l’émetteur du jeton n’ont aucun droit sur le stock sous-jacent. 

Combien de concurrents en digitalisation de l’or avez-vous sur le marché international et pourquoi avez-vous choisi la Suisse pour développer votre projet?

Nos concurrents sont environ une trentaine dans le monde et nous, avons choisi la Suisse pour son cadre régulatoire clair et solide en ce qui concerne les actifs numériques (jetons). La preuve en est le guide de «stablecoins» de la Finma, régulièrement mis à jour depuis 2018. C’est donc avec confiance envers les autorités que nous pouvons développer notre activité.

«L’achat de ces jetons d’or numérique permet
de faire l’économie de nombreux intermédiaires.»
A qui s’adresse en priorité votre produit, et quels avantages offre-t-il?

Une partie de nos clients sont les gestionnaires d’actifs et de patrimoine, les banques privées, mais également toutes les personnes qui souhaitent investir dans l’or physique. D’ailleurs, l’intérêt grandissant pour notre produit fait que, d’ici fin février, nous aurons déjà une tonne d’or transformé en jeton pour un montant d’environ 50 millions de dollars. En dehors de l’avantage d’un format simple et dématérialisé, l’achat de ces jetons d’or numérique permet de faire l’économie de nombreux intermédiaires. Il s’agit des banques, courtiers, convertisseurs, véhicules de titrisation (SPV) et gardiens qui sont indispensables lors de l’acquisition d’or physique de manière habituelle, c'est-à-dire via les Fonds négociés en bourse (ETF) où l’on peut acquérir du métal précieux en tant qu’investissement. Enfin, les jetons DGLD peuvent être vendus contre de l’or physique ou faire l’objet d’un rachat et destruction contre livraison des lingots correspondants. Le lien avec le métal physique est donc constant.

Votre prochain défi?

Démocratiser l’investissement dans l’or en jeton numérique grâce à l’intégration de DGLD au portefeuille numérique blockchain.com, qui sera opérationnelle avant l’été 2020. Ce dispositif, qui se veut beaucoup plus simple d’utilisation que ce qui existe actuellement permettra à tout un chacun d’acheter et de vendre de l’or en ligne.