Pas encore de récession en vue

Marc Brütsch, Swiss Life Asset Managers

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Le resserrement du robinet monétaire et un «Brexit dur» pourraient gâcher la fête en 2019.

La reprise s’essouffle. Un atterrissage difficile n’est toutefois pas en vue si les banques centrales continuent de désaccoutumer prudemment l’économie à l’argent bon marché. Cependant, un risque de plus grande ampleur que la politique monétaire existe actuellement: la géopolitique.

Les bourses ont bien débuté l’année après les soubresauts de décembre. S’agit-il de plus qu’une simple réaction de courte durée par rapport à la fin d’année 2018?

La croissance dans les pays développés
tend vers son potentiel durable.

Le tarissement progressif de la source monétaire des banques centrales a été l’une des causes des hauts et des bas que les marchés des actions ont connus en 2018, la pire année boursière depuis l’éclatement de la crise financière il y a plus de dix ans. De 2009 à 2018, les cinq principales banques centrales des pays industrialisés ont maintenu le système financier sous perfusion en moyenne à hauteur de 95 milliards de dollars par mois. La Réserve fédérale des Etats-Unis (Fed) a déjà réduit son bilan tandis que la Banque centrale européenne (BCE) a cessé ses achats de titres depuis janvier 2019. Le «dopage» soutenu par les banques centrales est donc sur le point de s’arrêter.

Pas encore de récession en vue

Le ralentissement de la reprise globale devrait se poursuivre en 2019. Les indicateurs provisoires indiquent cependant aussi une stabilisation de la dynamique. La croissance dans les pays développés tend donc vers son potentiel durable. Elle est soutenue par une politique fiscale plus généreuse et par une légère accélération de la hausse des salaires, qui soutient la consommation. La baisse sensible des prix du pétrole depuis octobre 2018 permet en outre une amélioration du revenu disponible.

La normalisation de la politique monétaire pourrait toutefois transformer la consommation des ménages, deuxième pilier de la conjoncture, en son talon d’Achille: aux Etats-Unis, elle a déjà engendré une hausse importante des coûts du crédit pour le secteur privé. Une nouvelle hausse suite à la normalisation de la politique monétaire aux Etats-Unis conjuguée à l’arrêt des achats d’emprunts par la BCE augmenterait le risque de récession. Le franc suisse pourrait connaître une pression à la hausse.

Les foyers de crise européens ont démontré la rapidité
avec laquelle le franc pouvait s’apprécier.

Pour éviter un atterrissage difficile, il faut donc que les banques centrales dosent correctement l’arrêt de leur approvisionnement en argent facile. La Réserve fédérale américaine a donné un premier signe en ce sens en orientant les attentes en 2019 vers deux nouvelles hausses des taux d’intérêt au lieu de trois. Le besoin d’agir face à un risque de surchauffe de la conjoncture a diminué. Suite à la forte baisse du prix du pétrole depuis octobre 2018, les taux d’inflation aux Etats-Unis et dans la zone Euro sont tombés en dessous de la valeur cible de la politique monétaire. Il n’est pas certain que la BCE procède à des hausses de taux d’intérêt dès 2019. La répression financière devrait donc se poursuivre, surtout en Europe. La Suisse entame sa cinquième (et probablement pas dernière) année de taux négatifs. Les foyers de crise européens ont démontré la rapidité avec laquelle le franc pouvait s’apprécier.

Mécontentement du côté de la Tamise

Les impondérables politiques de 2018 n’ont pas disparu en cette nouvelle année. La situation s’est même aggravée en ce qui concerne le Brexit. L’accord conclu en novembre dernier entre la Grande-Bretagne et l’Union européenne a volé en éclat le 15 janvier suite à un nouvel affrontement entre partisans et opposants au Brexit au Parlement britannique. Le risque d’une sortie brutale du Royaume-Uni sans le moindre accord demeure. Un tel «Brexit dur» augmenterait la volatilité sur les marchés et pourrait provoquer un fléchissement de la croissance, tout du moins au premier semestre. Une lueur d’espoir vient toutefois de Bruxelles: selon les médias, l’UE serait disposée à reporter le Brexit à 2020.

Le mois de mars sera sans doute décisif. En effet, c’est à cette date qu’expirera la «trêve» de 90 jours décrétée début décembre dans la bataille commerciale qui oppose la Chine aux Etats-Unis. Sans progrès concret, la situation risque de connaître une nouvelle escalade et de peser sur la croissance mondiale.

Les élections européennes qui auront lieu en mai prochain feront quant à elles figure de test pour les gouvernements européens et leurs programmes politiques. Elles pourraient même s’apparenter à un référendum pour le président français Emmanuel Macron.

Il y a de bonnes chances que le bon départ en 2019
ne soit pas qu’un feu de paille.
Les évaluations de nouveau appropriées

Pour répondre à la question initiale: il y a de bonnes chances que le bon départ en 2019 ne soit pas qu’un feu de paille. Les marchés des actions ont intégré bon nombre des risques décrits. Si les entreprises atteignent les bénéfices attendus, il se pourrait que le moral des investisseurs se révèle trop pessimiste. Après la dernière correction, les actions sont évaluées correctement en comparaison historique, y compris en Suisse. Les pays émergents, où les baisses des cours ont été les plus fortes en 2018, semblent pour l’heure tout autant attrayants. En d’autres termes, on peut dresser le constat suivant: «La volatilité est là et va s’installer dans la durée». Pour y faire face, il convient d’opter pour une diversification large et de miser sur des stratégies permettant de maîtriser les risques. Ces deux approches permettent de créer un filet de sécurité pour faire face à d’éventuelles nouvelles baisses des cours et donc participer aux mouvements à la hausse tout en préservant le capital de risque.

 

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