Moins d’offre, plus de rendement

Elena Rinaldi, TwentyFour Asset Management

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Le recul des émissions d’obligations adossées à des prêts syndiqués (CLOs) laisse augurer de la surperformance de ces titres dans les mois à venir.

©Keystone

L’importance de l’offre des obligations adossées à des prêts ou crédits syndiqués, les «collaterized loan obligations» (CLOs),  à la fin du premier trimestre a pu paraître surprenante au vu des difficultés d’arbitrage auxquelles leurs émetteurs se sont trouvés confrontés. Mais depuis sept semaines, la situation a commencé à évoluer. Au premier trimestre, l’offre a atteint un volume similaire à celui de 2018. Mais en avril, durant la période précédant Pâques, six opérations seulement ont été réalisées, si bien que le volume total des émissions depuis le début de l’année s’est élevé à 9,4 milliards d'euros. Il est donc inférieur à celui observé durant la même période l’année passée. Ceci s'explique par de multiples facteurs.

Resserrement des différentiels

En premier lieu, l’offre sur le marché primaire des prêts syndiqués s’est avérée décevante cette année: en comparaison du premier trimestre 2018, elle a enregistré un recul de 23 % (le volume des obligations a subi une contraction de 43%). Et bien que les vacances de Pâques soient terminées, selon Debtwire, aucun crédit syndiqué n’a été proposé entre fin avril et début mai. De plus, même si le marché des fusions & acquisitions va connaître un regain d’activité, il sera essentiellement alimenté par des transactions émanant de grandes capitalisations. Or, pour obtenir la diversification qui leur est nécessaire, les gérants de CLOs ont surtout besoin d’un flux constant de transactions de taille moyenne. 

En raison des niveaux d'arbitrage actuels,
seuls trois émetteurs sont venus sur le marché en 2019.

La finalisation des portefeuilles de nouveaux crédits syndiqués s’étant considérablement ralentie et le nombre d’opérations préliminaires à la sortie des CLOs, le «warehousing», s’étant réduit cette année, les différentiels de rendement des CLOs se sont resserrés. Ils sont revenus aux niveaux antérieurs à ceux observés avant la période de détente du quatrième trimestre 2018.

Offensive nipponne

Malgré le tassement de l'offre, les différentiels de rendement affichés sur le marché primaire des CLOs du millésime 2019 n’ont guère évolué. Après deux semaines caractérisées par un niveau d’activité très faible, ils ont connu un léger resserrement, mais ce dernier n’a pas affecté les tranches notées AAA. Elles ont en effet été en acquises en majeure partie par les investisseurs japonais et, en particulier, par les grands gérants. Et, selon certaines rumeurs, leur offensive pourrait encore s’intensifier, à l’instar de ce que l’on a déjà pu observer sur le marché américain des CLOs. 

«La demande reste vive pour les titres à court terme.»

Pour les nouvelles émissions, la base d’investisseurs s’est réduite: un nombre toujours plus restreint d’investisseurs, américains pour la plupart, détiennent les titres les plus risqués, les hedge funds dominant dans les tranches mezzanine et «equity». Comme nous l’avions anticipé, les émissions proposées cette année ne devraient pas être très intéressantes et il semble qu’un certain nombre d’investisseurs européens partagent aujourd’hui cette opinion.

Raréfaction de l’offre

Du point de vue de leur propre économie, les nouveaux crédits syndiqués se trouvent soumis à différentes pressions. Aussi leur émission ne paraît-elle guère justifiée dans les conditions actuelles. Il sera donc difficile de lancer des CLOs qui ne bénéficient pas de l’appui d’un investisseur arrimé aux tranches AAA. En raison des niveaux d'arbitrage actuels, seuls trois émetteurs sont venus sur le marché en 2019. Leurs opérations de réinvestissement/refinancement ont totalisé 1,2 milliard d’euros seulement, alors que, l’an dernier à la même date, leur volume atteignait déjà 6,5 milliards d’euros. De plus, une dizaine de nouveaux gérants de CLO devant arriver sur le marché, il est devenu difficile d’étoffer les portefeuilles et l’offre s’est, par conséquent, raréfiée. Ce phénomène devenant manifeste, le marché secondaire bénéficie du resserrement progressif des différentiels de rendement. 

Prêts à surperformer

Le recul des émissions devrait être favorable au marché des CLOs. Sur le marché secondaire, les différentiels de rendement ont commencé à se resserrer, après avoir accusé un retard important par rapport aux titres de crédit plus traditionnels au premier trimestre. La demande reste vive pour les titres à court terme ainsi que pour les meilleurs gérants qui détiennent des portefeuilles équilibrés et des emprunts bien documentés. Néanmoins, nous observons également une reprise de l’activité sur le segment des obligations à plus long terme, surtout sur la partie basse du capital. Ceci a contribué à resserrer les différentiels de rendement: par rapport au mois de mars, ces derniers ont connu une réduction allant de 10 à 30 points de base pour les tranches BB et B.

Les CLOs devraient donc surperformer ces prochains mois, bénéficiant à la fois de fondamentaux plutôt favorables et d’une situation technique positive. Cela pourrait contribuer à rééquilibrer la dynamique d'arbitrage sur un marché primaire qui deviendrait ainsi un endroit plus sain.

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