Marchés obligataires stables dans la confusion

Eric Vanraes, Banque Eric Sturdza

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Chronique des taux de la banque Eric Sturdza.

Une semaine pour rien?

Cette semaine, à 2 points de base près, les taux 10 ans US et allemand n’ont pas varié, s’affichant à respectivement 1,69% et -0,57%. Mais si nous devions retenir un niveau majeur de marché atteint la semaine dernière, ce serait sans aucun doute 99. Il s’agit du dollar index (DXY) et le renforcement du billet vert «contre le reste du monde» est tout sauf anodin. La Fed va devoir intégrer ce paramètre essentiel dans sa politique monétaire. Il s’agit donc d’un événement important puisque la prochaine baisse de taux de la Fed, qui ne semblait pas évidente aux yeux de Jerome Powell, pourrait être finalement mise en œuvre pour (notamment) stopper l’appréciation du dollar. 

Semaine particulièrement animée par les perturbations
sur le marché monétaire US et la cacophonie au sein des banques centrales.

Si les marchés obligataires ont semblé faire du sur place au cours de la semaine, de nombreux sujets ont fait la une de l’actualité mais ont, bizarrement, semé la confusion. Nous voyons au moins six thèmes qui ont occupé le devant de la scène, sans que l’on puisse dire s’ils ont été favorables ou défavorables à l’appréciation des marchés. Le premier d’entre eux concerne les perturbations sur le marché monétaire US, suivi par la cacophonie au sein des banques centrales et la publication de statistiques économiques US contrastées. Ensuite, nous avons eu droit à la suite de la bataille commerciale sino-américaine, au Brexit et enfin à la conversation Trump-Zelensky synonyme de potentiel impeachment! Nous allons revenir sur les deux premiers sujets pour tenter de savoir s’ils risquent potentiellement de faire pencher la balance du côté de la détente des taux ou d’une correction au cours du quatrième trimestre.

Perturbations monétaires et QE4 inévitable

Le SOFR est retombé à 1,82% vendredi, le repo overnight (avec titres du Trésor US en collatéral) s’affichant à 1,80% au même moment. Toutefois, ce dernier est brutalement remonté hier pour repasser au-dessus de 2,6% en début d’après-midi. Sur le très court terme, nous n’avons pas d’inquiétudes puisque la Fed de New York va utiliser tous les moyens en sa possession pour gérer la situation. Sur le moyen terme, c’est plus problématique. Les récentes adjudications d’obligations du Trésor sur le marché primaire (il faut bien financer le déficit en plein dérapage) ont été largement responsables de cette sortie de route. 

Le nouveau QE sera le principal facteur militant pour des taux plus bas
dans un environnement d’aplatissement de la courbe US.

La Fed va devoir augmenter de nouveau la taille de son bilan, donc mettre en place un QE4. Ce nouvel assouplissement quantitatif sera vraisemblablement le principal facteur militant pour des taux plus bas dans un environnement d’aplatissement de la courbe US. Aussi, nous abordons le quatrième trimestre avec la conviction que le 10 ans US reverra probablement le niveau de 1,43% atteint le 3 septembre pour, éventuellement, se diriger vers les 1,32% de juillet 2016. 

Les banques centrales à l’épreuve de la cacophonie

Du côté de la Fed, les voix sont discordantes mais, à part deux membres favorables au statuquo, tous souhaitaient un assouplissement. La prochaine baisse devrait donner lieu à des échanges animés mais nous devrions avoir droit à un dernier assouplissement de 25bp avant la fin d’année. La BCE nous inquiète plus: que faut-il conclure de la démission brutale de Sabine Lautenschläger? Que l’Allemagne montre son vif désaccord avec les mesures récemment annoncées! 

La mise en place de la nouvelle équipe à la BCE
pourrait être bouleversée par l’Allemagne.

Dans le même temps, Mario Draghi estime dans la presse que la BCE a encore des munitions, qu’elle peut rester ultra-accommodante aussi longtemps que la politique monétaire ne produit pas d’effets. Ses propos sont corroborés par Philip Lane qui affirme que la BCE aurait pu faire plus et qu’elle en fera plus si nécessaire. La mise en place de la nouvelle équipe (avec l’Italien Panetta à la place du Français Coeuré) pourrait être bouleversée par le choix de l’Allemagne pour remplacer Madame Lautenschläger. Pendant ce temps, Mario Draghi milite pour une relance budgétaire de grande ampleur à l’échelle européenne prenant le relais de la politique monétaire de la BCE. Dans ce contexte, les élections internes au SPD le 26 octobre seront sans doute aussi importantes - sinon plus - que la nomination du représentant de l’Allemagne à la BCE.

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