Éclairage sur les stratégies d’actions à haut dividende

Salima Barragan

2 minutes de lecture

Stratégies d’actions à haut dividende et hausses de taux d’intérêts ne sont pas contradictoires. Décryptage avec Roberto Magnatantini, de SYZ.

Selon Roberto Magnatantini, Head Global Equities et Senior Portfolio Manager chez SYZ Asset Management, les investisseurs tendent à ne s’intéresser à ces stratégies que lorsque les taux d’intérêts sont faibles, craignant que des hausses de taux ne sonnent leur glas. Pourtant, les entreprises distribuant des dividendes jouissent d’une forte discipline de gestion quel que soit l’environnement de taux. Aussi, l’arrivée des grands noms de la technologie à leur bataillon a changé la donne de ce marché autrefois limité aux «bond proxies». Éclairage.

Contrairement aux idées reçues, toutes les actions à haut dividende n’évoluent pas uniformément lors des hausses des taux d’intérêt, car elles ne se bornent plus aux actions des secteurs de la télécommunication et des fournisseurs d’énergie. Appelées les «bonds proxies», (parce qu’elles se substituent aux rendements des obligations), elles offrent des flux de dividendes autour de 4,5%, soit plus élevés que la moyenne, mais souffrent également du fardeau de leurs dettes lorsque les taux augmentent.

«Lorsque les taux d’intérêt montent, c’est symptomatique
d’une reprise économique et bénéficiaire pour les valeurs industrielles.»

Or, un grand nombre de valeurs bancaires ou industrielles, qui versent également des dividendes attrayants, ont une faible sensibilité aux hausses de taux. Les banques, parce qu’elles tirent parti des taux élevés pour accroître leurs profits, et les sociétés industrielles, dont les affaires sont cycliques, parce qu’elles profitent des environnements économiques en accélération. «Lorsque les taux d’intérêt montent, c’est symptomatique d’une reprise économique et bénéficiaire pour les valeurs industrielles», explique Roberto Magnatantini. 

Un fait encore plus frappant, les titres issus de la consommation, de la santé et de la technologie ont remplacé les principaux vecteurs de source de rendement. «Les telcos et les utilities ne représentent plus que 10% du total des dividendes payés globalement (ie. à l’échelle mondiale)», précise Roberto Magnatantini. D’ailleurs, lorsque l’on parle en termes de dividendes payés en dollar, les société technologiques en distribuent tout autant que ces deux «bonds proxies». 

«Les sociétés technologiques dites de croissance
génèrent tellement de liquidité, qu’elles ne savent plus quoi en faire.»

Comment expliquer ces rétributions soudaines de la part de sociétés technologiques dites de croissance, à l’instar d’Apple qui a commencé à payer des dividendes de 1%? «Elles génèrent tellement de liquidité, qu’elles ne savent plus quoi en faire. Des centaines de milliards dorment dans leur bilan ou à l’étranger», répond Roberto Magnatantini. «Apple peut payer encore plus et on s’attend à ce qu’elle augmente son dividende, tout comme Microsoft dont le potentiel de croissance du dividende est élevé», poursuit-il. Bien que dividend yield dans ce secteur reste encore timide (entre 1 et 2,5%), les pressions croissantes des actionnaires institutionnels, disposés à encaisser d’avantages de coupons, devrait élever ce ratio. Le spécialiste s’attend d’ores et déjà à des rendements futurs jusqu’à 3%.

Pour les sociétés, la décision de verser un dividende est une contrainte qui les force à maintenir une discipline de gestion stricte. Dans les cas de repli des bénéfices, les dividendes sont généralement réduits d’une amplitude moindre. «Dans les crises, les dividendes baissent mais de peu, car pour une société, couper ses dividendes est stigmatisant», souligne Roberto Magnatantini qui estime que cette discipline évite du mauvaises allocations du cash-flow.

«Nestlé, qui a bien performé récemment, a rattrapé son retard.»

Dans son fonds d’actions à haut dividende, Roberto Magnatantini combine des valeurs technologiques avec des «dividend players» tels que Unilever, Johnson et Johnson et Nestlé. «Nestlé, qui a bien performé récemment, a rattrapé son retard», souligne-t-il. Le gérant sélectionne aussi des titres plus originaux comme Nagacorp, un opérateur cambodgien de casinos. Fidèle à la philosophie contrarian de SYZ AM, son fonds détient des titres à contre-courant comme Ibedrola, suspectée de risques réglementaires qui se sont avérés infondés ou Ferroviale, qui a souffert du Brexit, mais dont les joyaux sont des concessions situées aux États-Unis et au Canada. En Suisse, il aime l’action de Georg Fischer, historiquement un équipementier automobile en pleine mutation stratégique, dont le free cash-flow important et la croissance du dividende est en accélération: «Très cyclique par le passé, cette société se réoriente vers des métiers moins cycliques comme les systèmes de transports de fluides, générant des meilleures marges et cash-flow. Ceci devrait permettre un accroissement progressif des dividendes.»

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