Un plan de relance surévalué au Japon

Marc Brütsch, Swiss Life Asset Managers

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Les achats anticipés avant la hausse de la taxe étaient plus massifs qu’attendu, prélude d’une chute d’autant plus dure au quatrième trimestre.

Les chiffres finaux du PIB japonais sont souvent sensiblement réévalués par rapport à la première estimation. Ainsi, pour le troisième trimestre 2019, les chiffres définitifs annonçaient, au lieu de 0,1%, une croissance de 0,4% pour les trois mois avant le relèvement de la taxe sur la consommation, en octobre. Ce n’est pas forcément positif: on peut en déduire que les achats anticipés avant la hausse de la taxe étaient en fait plus massifs qu’attendu, prélude d’une chute d’autant plus dure au quatrième trimestre. Au moins le gouvernement semble-t-il le savoir puisqu’il a validé le 5 décembre un plan de relance budgétaire très attendu de 26'000 milliards de yens (4,6% du PIB) pour amortir l’effet de la taxe. Comme toujours, ce montant est grossièrement surévalué puisqu’il inclut l’investissement privé que les mesures prises sont censées encourager. L’effort budgétaire seul avoisine 9400 milliards de yens (1,7% du PIB) et tourne autour de projets d’infrastructures généralement étalés sur une longue période, ce qui complique l’estimation de l’effet de ce plan sur la croissance future. Compte tenu en outre de multiplicateurs budgétaires très faibles au Japon, de l’impact décevant des plans de relance budgétaire antérieurs et du fait que nous avions déjà anticipé quelques mesures dans ce sens, nous maintenons nos prévisions de croissance du PIB pour 2020, déjà supérieures au consensus.

Les bénéfices des entreprises industrielles ont plongé avec l’érosion des prix
à la production, mauvais signe pour les capacités d’investissement et d’embauche.
L’année (des prix) du cochon en Chine

Les indices des directeurs d’achats (PMI) du secteur manufacturier se sont fortement améliorés en novembre, avec une nouvelle hausse à 53,2 de l’indice privé, celui du Bureau national des statistiques dépassant la barre des 50 points qui sépare expansion et contraction. Les statistiques dénotent toutefois une pression à la baisse toujours marquée sur ce secteur: les bénéfices des entreprises industrielles ont plongé avec l’érosion des prix à la production, mauvais signe pour les capacités d’investissement et d’embauche. En outre, les exportations ont reculé de 1,1% en glissement annuel. L’analyse géographique montre que cette baisse provient avant tout des exportations vers les Etats-Unis, en chute de 23%, preuve de l’effet délétère des droits de douane imposés sur un total de 360 milliards de dollars de produits chinois. Il devient donc de plus en plus urgent pour la Chine de trouver un accord avec les Etats-Unis pour vider cette querelle à l’origine d’un ralentissement mondial des échanges et de l’investissement. Rien ne dit toutefois que les négociations seront plus simples: l’effet négatif sur les exportations devrait inciter la Chine à insister sur la suppression d’une large part des droits de douane existants. Malgré la pression sur l’économie chinoise, la politique de Pékin restera sans doute modérément accommodante vu les risques financiers liés au très lourd fardeau de la dette.

L’inflation est montée à 4,5% en novembre, son plus-haut depuis janvier 2012, effet du doublement des prix du porc (2,4% du panier de l’IPC chinois) qui pourraient encore croître à l’heure où la fièvre porcine africaine a décimé plus de la moitié du cheptel national. L’inflation devrait donc encore s’accélérer ces prochains mois. En revanche, les prix à la production, reflet des bénéfices des entreprises, se sont contractés de 1,4%, ce qui dénote une demande toujours atone.

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