Privilégier une approche thématique en 2020

Vincent Jarcsek, Exane Derivatives

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L’inventaire des grandes tendances de l’année passée suggère d’aborder 2020 avec une stratégie d’allocation thématique.

La forte présence du président américain tout d’abord, qui dépasse largement la sphère médiatique, twitter notamment, et impose un style très viril à l’ensemble de l’écosystème politico-économico-financier outre-atlantique. La croissance des marchés américains, qui a guidé celle des marchés mondiaux, est incontestablement liée aux intérêts de l’occupant de la maison blanche, lui-même un grand financier. Sa communication sur Twitter a ajouté de la volatilité sur les marchés tout en soutenant leur tendance haussière, une combinaison qui plaît beaucoup aux milieux financiers, y compris aux investisseurs institutionnels, leur offrant non seulement des niveaux de rendement élevés mais aussi des opportunités d’arbitrage.

La guerre commerciale ensuite, entre les Etats-Unis et le reste du monde, Chine et Europe en tête. Même si des signes laissent envisager que le bout du tunnel n’est pas loin, il est probable que de nouveaux avatars de cette guerre apparaissent dans le contexte électoral de 2020, tant il est vrai qu’elle sert le président américain dans sa conquête d’un deuxième mandat. S’ajoutent à cela des tensions géopolitiques, notamment au Moyen-Orient: sans solution à brève échéance, elles ne devraient toutefois pas avoir d’influence majeure sur les marchés, de plus en plus indifférents aux soubresauts locaux, même lorsqu’ils concernent le pétrole.

La stratégie à adopter pour 2020 doit répondre à la double
contrainte apportée par les marchés en cette fin 2019.

Enfin et surtout, la question lancinante de la fin du long cycle de croissance économique débuté en 2009 est actuellement sur toutes les lèvres, sans que la réponse ne soit plus certaine qu’en décembre 2018. Les économistes avancent à tâtons, résultat d’une situation inédite dans laquelle les théories passées du cycle ne s’appliquent plus. Et pour cause! Les banques centrales ont eu recours à des outils qu’elles n’avaient jamais utilisés avec une intensité et une durée telles que le manque de recul ne permet pas de savoir où s’établira l’équilibre. Si personne n’a l’expérience d’une décennie continue de politique de taux d’intérêts négatifs, il est en revanche clair que ses effets commencent juste à se transmettre aux investisseurs individuels. Alors que les banques doivent renoncer à faire tampon entre la politique des banques centrales et leurs clients, sous réserve de voir disparaître leurs marges déjà fortement mises à mal, les épargnants des pays développés sont confrontés au défi de préserver leur patrimoine financier. Un défi pour une population toujours plus nombreuse et qui vit de plus en plus longtemps: celui d’assurer une croissance à un chiffre de leur patrimoine, comparable à celle de l’immobilier, pour financer leur retraite. Un défi qui a trouvé ces dernières années une réponse dans la gestion passive, plus attractive dans le contexte de numérisation où la génération Y n’est pas prête à payer les 200 à 300bps d’une gestion active. Résultat, tout retournement du cycle entrainant une vente accrue de ces stratégies créerait un encombrement massif sur les marchés, avec un fort risque de liquidité à la clé. Un scénario plausible, qu’il est maintenant essentiel d’anticiper dans toute stratégie d’allocation d’actifs pour 2020.

Des thèmes qui donnent du sens à la finance

La stratégie à adopter pour 2020 doit répondre à la double contrainte apportée par les marchés en cette fin 2019. En premier lieu les valorisations très élevées, aussi bien sur le segment obligataire -qui connaît une pénurie de titres, activisme des banques centrales oblige -, que sur les marchés actions, en hausse de quelque 25% depuis le début de l’année, ou même sur l’or, pourtant actif refuge par excellence. Même si une correction est possible dans les semaines qui viennent (comme à Noël 2018), le sentiment des investisseurs reste très favorable. En témoigne le succès de l’introduction en Bourse d’Aramco, qui en levant 29,4 milliards de dollars devient la plus grosse introduction en Bourse de l'histoire. D’autre part, aucun signe d’infléchissement des politiques des banques centrales n’est perceptible, que ce soit pour des raisons tactiques, la Fed ayant freiné la remontée des taux pour prolonger le cycle jusqu’aux élections de 2020, ou par manque d’une alternative structurelle aux taux négatifs.

Un enjeu majeur de l’allocation d’actifs en 2020 tient à la nécessité
d’investir dans une croissance organique et durable.

Alors qu’une certaine prudence s’impose sur la gestion passive et que l’absence de visibilité sur le retournement du cycle rend plus que jamais nécessaire une diversification du portefeuille, des produits structurés autour de thèmes que les investisseurs comprennent et auxquels ils adhèrent, présentent le triple avantage d’une possible garantie en capital ou d’une garantie de rendement, et d’un accès à de multiples stratégies au travers d’un produit unique.

Parmi les thèmes les plus porteurs figurent tous ceux qui concourent à créer du positive impact, notamment:

  • La viabilisation des centres urbains, qui recouvre des domaines aussi variés que l’industrie automobile, les transports, le logement, la surélévation, les équipements, les services publics.
  • L’enseignement en ligne et le home office – la mode des citoyens du monde, avec tous ses effets d’émissions de CO2, cèdant la place à la localité, favorisée par la digitalisation.
  • La gestion de la dépendance, de la santé mentale, du grand âge (soit quelque 30% de la population) qui promet le développement des soins à domicile ainsi que du soin de la personne (esthétique compris).
  • La gestion des maladies chronique et des risques pandémiques (pharmaceutique).
  • La transition vers un modèle à -2°C, qui passe par des investissements soit dans toutes entreprises qui respectent l’objectif, soit dans de nouvelles idées industrielles qui contribueraient à sauver la planète, par exemple sur la séquestration du CO2.
  • L’industrie du loisir, très prometteuse à l’heure où la productivité augmente, donc le temps oisif (gaming en tête).

Un enjeu majeur de l’allocation d’actifs en 2020 tient à la nécessité d’investir dans une croissance organique et durable, qui associe la plus basse volatilité possible avec la meilleure garantie du capital retraite.