Poursuite de la normalisation monétaire

Alan Mudie, Société Générale Private Banking

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«Nous tablons sur une année de croissance globale, en ralentissement toutefois par rapport à 2018».

Le 6 février 2018 sonnait le glas d'un environnement protégé par des politiques monétaires accomodantes et d'une hausse exceptionnelle de la valorisation des actifs financiers. La volatilité était de retour. Le reste de l'année a été ponctué de coups de théâtre politiques qui ont nourri un climat d'incertitudes inconfortable pour les investisseurs. Guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine, douloureux divorce de l'Union européenne et de la Grande-Bretagne, bras de fer budgétaire entre l'UE et l'Italie, retour des sanctions contre l'Iran, quel sera le sort des marchés en 2019? Les réponses d'Alan Mudie, membre de l'Association des Stratégistes d'Investissement de Genève (ISAG) aux quatre questions d’Allnews.

Quel scénario pour 2019?

Nous tablons sur une année de croissance globale, en ralentissement toutefois par rapport à 2018 à cause de la poursuite de la guerre commerciale sino-américaine et de l’absence de nouvelles baisses des impôts aux États-Unis. L’inflation américaine devrait évoluer autour de l’objectif de 2%, et rester solidement ancrée au-dessus de 1% en zone euro. Ainsi, nous anticipons la poursuite de la normalisation de politique monétaire – de nouvelles hausse des taux aux États-Unis, et un premier relèvement en fin d’été par la BCE. Nous prévoyons ainsi un retournement de tendance sur le marché des changes, l’EUR/USD devant corriger une partie de la sous-évaluation importante actuelle.

Pour vous quel est l’événement à surveiller l'an prochain?

Au sein de l’Union Européenne, l’évolution de la fixation du budget italien est à surveiller, notamment la position prise par l’Ecofin quant à une procédure de déficit excessif. Nous estimons que la Commission cherchera à éviter un conflit ouvert, notamment à la veille des élections au Parlement européen, mais la prudence reste de mise. Autre situation à risque – le Moyen Orient. Quelle sera l’attitude de l’Arabie Saoudite par rapport à ses voisins (notamment le Yémen, le Qatar et l’Iran)? Quel sera le futur statut de son prince héritier? Et est-ce qu’une aggravation des tensions pourra se traduire par une envolée du baril?

La difficulté pour les investisseurs réside
dans la surévaluation des actifs obligataires.
Le Brexit est-il un sujet de préoccupation pour l'année à venir?

Les grandes lignes du futur statut du Royaume-Uni vis-à-vis de l’Union Européenne devraient se dessiner dans la première partie de l’année 2019. Ainsi, l’impact sur les marchés devrait se produire à mesure que se déroule la ratification par les parlements nationaux. Si le processus échoue, la livre sterling pourrait subir une forte pression baissière. Dans le cas contraire (dit de «soft» Brexit), le GBP devrait repasser au-dessus de 1,32 par rapport au USD. Pour l’économie britannique par contre, l’impact se fera sentir dans la durée, la perte du plein accès au Marché Unique mettant du temps à être compensée par d’éventuels futurs accords de libre-échange. Enfin, les tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine devraient rester vives.

Quelle allocation d’actifs dans ce contexte de bear market?

Dans un tel contexte, une réduction de voilure s’imposerait. La difficulté pour les investisseurs réside dans la surévaluation des actifs obligataires alors que la BCE compte interrompre ses nouveaux achats d’obligations et que la Fed poursuivra la réduction des positions détenues dans son bilan. De surcroît, les rendements réels (rendements à l’échéance moins l’inflation) sont soit très faibles (Treasuries en USD), soit négatifs (le Bund allemand ou les obligations de la Confédération), ce qui limite leur apport en termes de diversification de portefeuille. D’autres actifs sont donc à privilégier pour apporter de l’asymétrie aux portefeuilles – les points morts d’inflation, les produits structurés, les hedge funds ou encore les convertibles par exemple.

 

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