Point sur les pays émergents

Salima Barragan

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«Aujourd’hui, les marchés émergents ont appris leur leçon», estime Fabiana Fedeli de Robeco.

Les perspectives de ces marchés ont été mises à rude épreuve. Depuis le début de l’année, ils affichent des performances négatives. Trois questions inquiètent les investisseurs:

  • Quels seront les effets des tours de vis supplémentaires de la Fed?
  • Quel sera l’impact d’un raffermissement du dollar US?
  • Et quelles seront les conséquences de l’escalade de la guerre commerciale avec la Chine?

Fabiana Fedeli de Robeco, responsable des actions globales et senior portfolio manager du fonds Robeco sur les marchés émergents, y répond sans détour.

La primauté des perspectives de croissance

Pour cette experte sur les pays émergents, il convient de distinguer les peurs des fondamentaux qui, eux, restent intacts depuis la belle hausse de 2017. «A moins que la guerre commerciale ait lieu, aucun de ces éléments n’est si effrayant», explique-t-elle. 

Les performances des marchés émergents ont toujours suivi les perspectives de croissance. «Ces marchés ne s’inquiètent pas des décisions de la Fed», affirme Fabiana Fedeli. Durant les hausses de taux entre 2004 et 2008, ils ont délivré de bonnes performances absolues, mais aussi relatives vis-à-vis de l’indice MSCI World. «Leur performance relative devrait donc surperformer du moment que l’on s’attend à une croissance des revenus. En revanche, si les perspectives sont mauvaises, un environnement de hausse des taux les défavoriserait», explique-t-elle.

«Depuis juillet 2016, les marges des profits ont décollé car les sociétés
ont appris à bien gérer leur coût suite à la claque de 2009.»

D’après une analyse de Robeco, nous assistons depuis 2016 à une tendance positive des surprises des revenus. Depuis l’automne 2017, il y a certes eu une légère correction mais ce n’est pas un retournement de tendance. Pour la gérante, il s’agit d’une normalisation et les changements structurels - notamment en Inde, Corée du sud et en Chine - se matérialisent. «Depuis juillet 2016, les marges des profits ont décollé car les sociétés ont appris à bien gérer leur coût suite à la claque de 2009», explique-t-elle.

 

 Source : IBES, au 30 juin 2018
GEM vs MSCI World représente le ratio de l'indice MSCI Emerging Markets par rapport à l'indice MSCI World.

 

Quant au raffermissement récent du dollar, elle estime qu’il a déjà causé la plus grande part des dégâts. De plus, historiquement sa hausse a principalement impacté les pays gourmands en financement étranger comme l’Argentine, le Brésil et la Turquie, en tête des pays les plus vulnérables aux fluctuations de la devise américaine.

Dénouement de la guerre commerciale?

Face aux tensions qui s’intensifient (les dernières sanctions couvrent 32 milliards de dollars supplémentaires d’importations chinoises), Fabiana Fedeli reste pragmatique: «C’est un point important mais la Chine a été réactive en représailles et l’impact ne représente que 0,3% PIB chinois». La Chine ne souhaite pas pour autant rentrer dans une spirale protectionniste et continue d’ouvrir non seulement ses marchés commerciaux mais aussi, de façon graduelle, les financiers. «Nous nous attendons à une rhétorique dure mais qui aboutira à des négociations», prévoit la gérante qui souligne que, bien que les peurs d’une guerre commerciale soient légitimes, les marchés ne paniquent pas pour autant.

Sélectivité dans les pays

Ces peurs impactent les PMIs car elles font vaciller le moral des entreprises. «Mais les tendances des PMI sont différentes selon les pays!» souligne Fabiana Fedeli. D’où l’importance d’une sélection attentive des pays. «Nous faisons de l’allocation par pays car nous ne considérons pas ces marchés comme une classe homogène». En moyenne, ces marchés traitent avec une décote de 25% vis-à-vis des marchés développés. «Selon mon expérience, ce n’est pas le moment d’en sortir, car si cette guerre commerciale n’a finalement pas lieu, nous allons assister à un rallye encore plus grand que sur les marchés développés. Et c’est le bêta qui fera la plus grande partie du rendement», affirme la gérante qui est principalement exposée à la Chine, à la Corée du Sud et à la Russie. «Le risque de liquidité est le plus important, alors nous avons entre 25 et 50 titres dont plus de 80% sont des participations actives. Nous nous intéressons aussi aux indicateurs de sur-achat et survente pour exclure tout risque de herd behaviour.  

Le fonds sur les marchés émergents de Robeco suit une stratégie de convictions, bottom-up. «Nous restons sur nos convictions, jusqu’à ce que le marché revienne sur les fondamentaux et nous donne raison. Et cela a toujours fonctionné», conclut-elle.