Perspectives hebdomadaires de Raiffeisen

Raiffeisen

3 minutes de lecture

Les inquiétudes autour des taux pèsent sur le marché des actions.

Le dernier trimestre a mal commencé pour les bourses. Les foyers de risque sont connus depuis longtemps: taux plus élevés, conflit commercial et débat sur le budget italien, par ex. Les marchés des actions se sont pourtant montrés peu impressionnés. La récente hausse des taux à long terme a inversé le moral ces derniers jours. Lors de sa décision en septembre, la Fed avait déjà clairement dit que le cycle des taux haussiers ne serait pas interrompu pour l'instant: le procès-verbal sera publié mercredi prochain, portant la discussion des marchés sur la future évolution des taux. Bien que le président Trump ait qualifié la politique monétaire de «folle», la Fed semble peu découragée par son plan, compte tenu de la vigueur de l'économie, de l'évolution positive du marché de l'emploi et de la hausse de l'inflation. La propension au risque a aussi été freinée par les dernières prévisions du Fonds monétaire international (FMI). La révision à la baisse de 3,9% à 3,7% de la croissance mondiale pour l'année prochaine est certes marginale et ne change pas la situation dans son ensemble. Mais, associés aux craintes de l'impact du conflit commercial, aux vents adverses sur les marchés émergents et à la hausse des taux, tous ces facteurs n'ont pas manqué de susciter l'attention accrue des marchés.

Les actions des valeurs technologiques US notamment sont sous pression. Et pourtant, elles avaient clairement contribué à la bonne performance du marché américain jusqu'à fin septembre. Au vu des bonnes valorisations et des prévisions de croissance élevées, les discussions autour d'un éventuel ralentissement cyclique pèsent lourdement sur les valeurs technologiques. En raison de la situation de risque, nous maintenons une légère sous-pondération dans la quote-part en actions mondiales, avec un avantage relatif pour le marché des actions suisse que nous pondérons de manière neutre.

La semaine prochaine, l'indicateur avancé américain fournira un indice en plus sur l'évolution de l'économie dont la situation actuelle ne devrait être guère impactée par le conflit commercial: une légère hausse de l'indicateur est donc probable. En Suisse, le commerce extérieur pour septembre présage des données toujours bonnes. L'inflation reste sous contrôle grâce à une forte dynamique économique. La hausse des prix à la consommation a ralenti en septembre pour s'établir à 1,0%. La semaine prochaine, même les prix à la production devraient enregistrer une hausse légèrement inférieure en glissement mensuel.

Ces prochains jours, les données des entreprises devraient attirer l'attention des marchés: la saison de publication des résultats sera lancée vendredi par les banques aux USA (après la clôture de rédaction). En Suisse, Novartis et Inficon publieront notamment leurs performances sur la marche des affaires du troisième trimestre. Avec un chiffre d'affaires d'un peu moins de 13 milliards de francs, Novartis devrait à nouveau enregistrer une solide croissance en glissement annuel (12,4 milliards de francs). L'action d'Inficon a été sous forte pression ces derniers jours. Une légère baisse du chiffre d'affaires est attendue en raison du ralentissement du marché des semi-conducteurs, mais le contexte ardu devrait à présent être intégré aux cours.  

Graphique de la semaine

Marchés sous pression (indexé, 31.12.2017 = 100)

Sources: Bloomberg, Investment Office Groupe Raiffeisen
Gros plan: les taux US grimpent à un sommet pluriannuel

Les dernières semaines ont été marquées par un important mouvement des taux. Dans un certain nombre de pays, les taux ont en partie progressé de plus de 25 points de base en un mois. Aux USA, les obligations d'Etat à 10 ans (Treasuries) se négocient désormais à 3,2%, leur plus haut niveau en près de sept ans. Même en Suisse, les taux des obligations de la Confédération à 10 ans se situent (juste) au-dessus du seuil zéro, alors que notre pays est caractérisé par des taux négatifs. Le revirement des taux d'intérêt semble se faire lentement mais sûrement. Comme prévu, la Fed a procédé à une hausse de 25 points de base supplémentaires le 26 septembre. La fourchette des taux auxquels la banque d'émission prête désormais de l'argent aux banques commerciales se situe ainsi entre 2,00 et 2,25%. Le marché n'a pas été surpris par la hausse en soi (puisque largement attendue), mais plutôt par les commentaires belliqueux du président de la Fed, Jerome Powell. Lors de la conférence de presse, il a déclaré que la Fed était encore loin d'une normalisation de la politique monétaire «ultra-accommodante» et qu'il fallait donc s'attendre à de nouvelles hausses.

Concrètement, on peut supposer que les taux grimperont à nouveau en décembre et encore trois fois en 2019. Ainsi, les taux directeurs progresseraient à plus de 3%. Dans ce contexte, il n'est pas surprenant que les taux aient augmenté sur un large front.  

L'envol des taux US

Les rendements des obligations d'Etat à 10 ans dépassent largement les 3%

Sources: Bloomberg, Investment Office Groupe Raiffeisen

D'un point de vue de l'analyse technique, la progression des taux au-dessus du seuil des 3% revêt une grande importance. En effet, la bande de négoce sur plusieurs années a ainsi été franchie à la hausse. A moyen terme, les taux (US) devraient donc continuer à grimper, corroborant ainsi la position du dollar US, même si les marchés obligataires en pâtiront. La différence d'intérêt en faveur des USA augmente puisque la Banque centrale européenne (BCE) et la Banque nationale suisse (BNS) ne surprendront probablement pas avec une hausse des taux les neuf mois à venir. La hausse des taux et la vigueur relative du dollar US ont aussi impacté les marchés émergents. Depuis la décision du 26 septembre, le MSCI Emerging Market Index a perdu près de 5%. La performance négative atteint plus de 12% depuis le début de l'année. Les marchés émergents font ainsi clairement partie des perdants cette année.   

La hausse des taux et la vigueur du dollar US constituent un poison pour les marchés émergents

MSCI Emerging Markets Index vs. MSCI World Index YTD

Sources: Bloomberg, Investment Office Groupe Raiffeisen

Du côté des taux, nous nous attendons toujours à une normalisation progressive ces prochains mois. Les achats obligataires s'achevant en fin d'année, la BCE abandonnera bientôt, elle aussi, sa politique monétaire extrêmement accommodante. Cette nouvelle n'est pas forcément réjouissante pour les investisseurs. En effet, toute hausse des taux implique une réévaluation des catégories de placement à risque, car les revenus futurs doivent être actualisés à un taux d'intérêt plus élevé, ce qui réduit la valeur actuelle d'un placement. Ces derniers jours ont donné un premier aperçu de ce à quoi les investisseurs doivent s'attendre: qui dit taux plus élevés, dit plus grande volatilité sur les marchés des actions. Après une décennie marquée par des taux extrêmement bas (et parfois même négatifs) ainsi que des liquidités massives déversées par les banques centrales, cette évolution est inévitable.

A lire aussi...