Pas d’indigestion pour la dette américaine

David Norris, TwentyFour Asset Management

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Le marché obligataire a démarré l’année en fanfare: la multiplicité des émissions vient satisfaire une demande record.

La dette d’entreprise à haut rendement est repartie avec le même enthousiasme que l’année passée. En décembre 2019, les émissions sur ce segment avaient atteint 19,6 milliards de dollars, portant le volume total d’émissions pour l’année à environ 270 milliards de dollars, une augmentation impressionnante de 67% par rapport à 2018. Dès la première semaine de janvier 2020, les émissions de dette d’entreprise à haut rendement se sont élevées à 7,6 milliards de dollars. La majorité d’entre elles provenait du secteur de l’énergie, les émetteurs ayant en effet profité de la hausse des prix du brut WTI qui a résulté du regain des tensions au Moyen-Orient.

Les émissions de dette d’entreprises de qualité «investissable» ont quant à elles totalisé environ 19 milliards de dollars en décembre 2019. Pour l’ensemble de l’année, leur volume s’est établi à 1100 milliards de dollars, en baisse de 3% par rapport à l’année précédente. Mais dès la première semaine de 2020, les émetteurs ont rattrapé le temps perdu en plaçant sur le marché des titres pour un montant impressionnant de 68,8 milliards de dollars.

Ruée sur les fonds obligataires

Ce bon début d’année montre qu’en dépit des tensions géopolitiques récentes, il existe une énorme demande latente. Selon les calculs effectués par Refinitiv Lipper, les investisseurs ont versé quelque 8,19 milliards de dollars dans les fonds américains d’obligations de qualité « investissable » durant la première semaine de janvier. Ces afflux ont donc largement dépassé le précédent record hebdomadaire qui s’était établi à 6,9 milliards. Les fonds américains d’obligation à haut rendement ont également enregistré des achats de parts importants : ils se sont élevés à 1,12 milliard de dollars sur la même période.

L’une des principales stratégies à mettre en place pour protéger
les performances cette année sera de gérer efficacement la volatilité.

Comme cela a été le cas sur le marché obligataire européen, la majorité des transactions ont été bien reçues et généralement sursouscrites. Les prix se sont donc resserrés, une situation bénéfique pour les débiteurs qui cherchent à tirer parti des écarts de rendement historiquement faibles observés sur le marché américain (à l’exception de la dette notée CCC pour laquelle les spreads ont relativement peu évolué).

De nombreuses sources de liquidité

On peut se demander de quelles sources proviennent ces abondantes liquidités. L’une d’entre elles pourrait être les coupons que les investisseurs doivent réinvestir en janvier. Selon les recherches effectuées par Barclays, leur montant pourrait avoisiner 5,9 milliards de dollars pour le haut rendement et 16,5 milliards de dollars pour les titres de qualité «investissable».

Une deuxième source de liquidités qui expliquerait l’attrait massif pour le segment de qualité «investissable» pourrait venir du désir des investisseurs de se maintenir dans la partie supérieure de la structure du capital des entreprises. Etant donné la faiblesse des rendements en ce début 2020, l’une des principales stratégies à mettre en place pour protéger les performances cette année sera de gérer efficacement la volatilité. Et pour ce faire, l’une des options possibles consiste à privilégier les débiteurs de qualité (les autres outils à disposition sont l’équilibrage et la diversification des portefeuilles ou encore la réduction de la duration). Ajoutons que l’afflux des capitaux vers le segment des titres de qualité «investissable» peut aussi s’expliquer par le fait que de nombreux investisseurs sont revenus vers la qualité à la suite du regain de tension observé au Moyen-Orient.

En résumé, on peut constater que les émetteurs américains ont refusé de se laisser devancer par leurs homologues européens cette année. Et bien que le niveau élevé de l’offre de papier suscite inévitablement des inquiétudes et fasse craindre une indigestion sur le marché de la dette aux Etats-Unis, la demande est elle aussi importante et il convient de la satisfaire.

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