Mieux vaut réparer son toit tant que le soleil brille

Philippe G. Müller, UBS

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Les actions mondiales ont fait un comeback impressionnant après avoir dévissé de plus de 16% en monnaies locales à la fin 2018.

© Keystone

Un vigoureux rebond a permis à l'indice MSCI All Country World de revenir à 5% de son sommet historique, atteint en septembre. La belle performance concomitante des marchés obligataires permet également aux portefeuilles équilibrés à long terme, avec une bonne diversification géographique et en classes d'actifs, d’approcher de leur sommet.

Néanmoins, les risques n'ont pas disparu. Les marchés reflètent déjà une bonne partie des bonnes nouvelles, Ils intègrent la plus grande patience des banquiers centraux en matière de resserrement monétaire et une issue favorable au différend commercial entre les États-Unis et la Chine. En cas de déception sur ces fronts ou de ralentissement économique plus marqué en zone euro, une rechute des marchés est possible.

Certes, dans l'immédiat, une récession ou un nouveau ralentissement paraît peu probable. Le chômage est historiquement bas dans la plupart des pays développés, ce qui soutient la consommation.

Les investisseurs prudents feraient bien de profiter du rebond des marchés
pour préparer leurs portefeuilles au prochain accès de volatilité.

La courbe des rendements aux Etats-Unis ne s'est pas inversée, que ce soit dans sa phase de maturité 3 mois/10 ans ou 2 ans/10 ans. En outre, l'engouement des investisseurs institutionnels pour les obligations à long terme, ainsi que les faibles primes d'inflation, entretiennent la faiblesse des taux longs. Ce qui pourrait suggérer qu'une inversion de la courbe des rendements ne serait, cette fois-ci, pas nécessairement un signal fiable de récession.

Néanmoins, les investisseurs prudents feraient bien de profiter du rebond des marchés pour préparer leurs portefeuilles au prochain accès de volatilité desdits marchés. Plusieurs enseignements peuvent être tirés des récentes turbulences.

Ne pas se défaire de ses obligations de grande qualité

Même lorsque le rendement des emprunts d'Etat est faible, les obligations de tout premier ordre ont tendance à bien se comporter quand les marchés d'actions enregistrent une correction.

La diversification à l'échelle mondiale
améliore le rendement corrigé des risques.

Le dernier trimestre 2018 n'y a pas fait exception, avec une performance de près de 4% pour l'indice Bloomberg Barclays en USD (obligations avec une note équivalente ou supérieure à Aa et une durée résiduelle comprise entre 5 et 7 ans). Cela a en partie compensé le repli de 16% des actions mondiales sur la même période. En 2019, les obligations de tout premier ordre ont poursuivi, jusqu’ici, sur leur bonne lancée, avec une performance de 1,1%.

Ne pas négliger les marchés émergents

Dans un premier temps, les obligations souveraines libellées en USD ont souffert lors de la correction intervenue en octobre 2018. Néanmoins, elles ont rebondi avec une longueur d'avance sur les actions. Depuis son point bas de la fin novembre, l'indice JP Morgan EMBI a rapporté 7% à ce jour.

Actions: la préférence nationale est une erreur

En général, la diversification à l'échelle mondiale améliore le rendement corrigé des risques. Depuis début 2018, cela est notamment le cas pour les investisseurs basés en Suisse et dans la zone euro.

Alors que l'Euro Stoxx 50 a cédé 5% et que le Swiss Market Index a grappillé 1%, les actions américaines ont rapporté 4,6%. De même, il y a de longues périodes pendant lesquelles une préférence pour les actions américaines aurait été préjudiciable aux investisseurs américains. Notamment entre 2002 et 2007 lorsque l'indice S&P 500 a rapporté 43%, contre 129% pour les actions des autres marchés développés.

La philosophie d'investissement a prouvé sa pertinence
lors de la récente période de volatilité.
Il vaut mieux se couvrir à un stade avancé du cycle

De nombreuses stratégies peuvent atténuer l'exposition d’un portefeuille à une baisse des marchés si elles viennent en remplacement d’une allocation en actions. Il est également possible d’envisager de recourir à une stratégie d'allocation systématique aux hedge funds ou à des obligations structurées qui acceptent un potentiel d'appréciation limité, en échange d'une protection à la baisse explicite.

Le rebond des marchés est l'occasion pour les investisseurs de réparer leur toit tant que le soleil brille. La philosophie d'investissement, qui repose sur une approche à long terme disciplinée et sur une diversification géographique et en termes de classes d'actifs, a prouvé sa pertinence lors de la récente période de volatilité.

En outre, même si les obligations de tout premier ordre ne semblent guère attrayantes d'un point de vue tactique, leur présence dans une allocation stratégique peut accélérer le redressement des portefeuilles après les accès d'aversion au risque.

Depuis 1945, un portefeuille composé de 60% d'actions et de 40% d'obligations n'a eu besoin, en moyenne, que de 16 mois pour regagner le terrain perdu depuis le sommet précédent, contre 26 mois pour un portefeuille exclusivement composé d'actions.

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