Le risque de récession aux Etats-Unis reste faible

Yves Hulmann

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Selon Marc Brütsch de Swiss Life AM, le scénario probable d’une «dégradation du mix croissance/inflation» plaide en faveur des actions.

Après la plongée des marchés durant le dernier trimestre 2018, le début de 2019 a été caractérisé par un retour au calme et un redressement graduel des indices. Simple rebond technique ou hausse plus durable? Le risque d’une récession imminente apparaît faible aux yeux de Swiss Life Asset Managers, qui présentait mercredi ses perspectives pour les marchés. Selon l’assureur, la volatilité accrue récemment observée sur les marchés résulte de deux causes fondamentales: d’une part, le changement de cap de la politique monétaire et, d’autre part, le conflit commercial entre les Etats-Unis et la Chine.

D’un point de vue fondamental, plusieurs éléments sont susceptibles de soutenir les marchés des actions, notamment une pression moins élevée sur les prix. Après un mouvement de hausse observé jusqu’à l’été dernier, l’inflation sous-jacente est à nouveau en repli depuis le quatrième trimestre. L’indice mondial mesurant l’inflation sous-jacente, incluant 38 pays représentant plus des quatre cinquièmes du PIB global, est retombé à 2,1% en décembre 2018, après avoir brièvement grimpé à 2,5% en milieu d’année. Après une forte hausse des salaires aux Etats-Unis, entraînant des craintes quant à un retour de l’inflation l’an dernier, la baisse des prix du pétrole depuis l’automne dernier a contribué à atténuer le danger lié à l’inflation.

Une croissance du PIB proche du potentiel de long terme.

Pour 2019, l’assureur anticipe un ralentissement du taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) à un niveau proche ou inférieur au potentiel de long terme pour plusieurs économies, ce qui contiendra l’inflation. En 2019, l’assureur prévoit une croissance du PIB de 1,2% pour la Suisse, de 1,3% pour la zone euro et de 2,3% aux Etats-Unis. Dans les trois cas, les prévisions de Swiss Life Asset Managers sont plus prudentes que celles du consensus qui anticipe pour cette année une croissance du PIB de 1,6% pour la Suisse et la zone euro ainsi que de 2,6% pour les Etats-Unis.

«Malgré certains signes, nous estimons que le risque de récession aux Etats-Unis est faible», estime Marc Brütsch, le chef économiste de Swiss Life Asset Managers. Certes, l’assèchement progressif des liquidités de la part de la banque centrale aux Etats-Unis l’an dernier et le différend commercial avec la Chine ont alimenté la volatilité des données économiques l’an dernier. Une nette hausse des requêtes sur Google du mot «récession» aux Etats-Unis, qui ont atteint un niveau proche de celui de janvier 2008, a aussi pu être observée. 

Néanmoins, les fondamentaux restent positifs à plusieurs égards. Le marché du travail, la politique fiscale et les prix du pétrole continuent de soutenir l’économie. Le recul des prix du brut s’est traduit beaucoup plus vite qu’en Europe par une baisse du coût de l’essence aux Etats-Unis. Depuis le troisième trimestre, les prix de l’essence ont diminué de 22%, ce qui a libéré des moyens correspondant à environ 0,4% du PIB américain qui peuvent être dépensés pour d’autres biens de consommation et services. De plus, la politique monétaire outre-Atlantique n’est pas encore devenue «excessivement agressive», juge l’assureur.

Le scénario principal reste positif pour les actions.

L’ensemble de ces éléments fait que les actions restent attrayantes en 2019. «Les marchés des actions profitent en particulier de la faible probabilité d’une récession ou d’une forte hausse de l’inflation. Suite à la correction de décembre, leur valorisation est devenue plus attrayante», juge José Antonio Blanco, responsable des investissements. En se concentrant sur le risque de récession, les experts de Swiss Life Asset Managers ont élaboré trois scénarios principaux, assortis de probabilités, et évalué leurs implications pour la politique de placement. 

Le scénario, qui se voit attribuer la probabilité d’occurrence la plus élevée (65%), est intitulé «dégradation du mix croissance/inflation». Selon celui-ci, un politique fiscale pro-cyclique parviendrait à masquer une croissance réduite, la répression financière plafonnerait le taux d’intérêt nominal et le protectionnisme ralentirait le commerce mondial. En matière de placement, un tel environnement serait «moyennement positif» pour les actions et «moyennement négatif» pour le prix des obligations d’Etat. Si l’assureur ne cite pas de titre spécifique, José Antonio Blanco, recommande de privilégier des actions d’entreprises de «qualité». A savoir, des titres de sociétés qui affichent à la fois une évaluation et des bénéfices prévisibles sur la durée.

Les actions seraient pénalisées par une «demande de sauvetage.»

Jugé moins probable, le second scénario (probabilité de 20%) décrit sous le titre de «nouvelle demande de sauvetage», envisage, lui, une restriction des crédits octroyés par les banques commerciales déclenchant une récession. Face à cette situation, les banques centrales auraient, une fois de plus, recours à des mesures non conventionnelles destinées à infléchir l’économie. Dans ce scénario, un impact positif sur les obligations d’Etat et négatif pour les actions est escompté.

Jugé un peu moins probable (15%), le scénario dit «boom/bust», qui redoute les effets d’une politique monétaire demeurée trop souple trop longtemps, aurait un impact un peu différent. Selon celui-ci, la phase d’essor serait suivie d’une récession, avec au final des «banques centrales qui viendraient gâcher la fête». Ce scénario serait positif, à court terme, pour les actions mais négatif pour les obligations d’Etat.

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