La consolidation de la branche des fintech est inévitable

Massimo Ferrari, Assetmax

2 minutes de lecture

Une union des forces et l'introduction de standards technologiques sont nécessaires pour atteindre la rentabilité et faire face au défi de la numérisation.

Le marché mondial des fintech a connu un essor fulgurant ces dernières années. Systèmes de paiements, prêts entre particulier, échanges de devises, assurances habitants… l'expansion de nouveaux modèles disruptifs vient grapiller sur le terrain longtemps réservé aux banques et aux assureurs traditionnels. Descendant des premiers services de courtage en ligne apparus dans les années 1990, ce marché arrive aujourd'hui à maturité. Mais alors, pourquoi tant de jeunes acteurs peinent-ils encore à trouver le modèle leur permettant d'allier rentabilité, service client et développement technologique?

Surmonter les freins au développement

Tout d'abord, tandis que les fintech continuent encore à se livrer à une guerre des prix contreproductive qui freine à leur croissance, il est très probable qu'elles sous-estiment le temps nécessaire à certains clients pour prendre la décision de démarrer une collaboration. Est-ce que la plateforme me conviendra? Comment la personnaliser? Quelles sont les fonctionnalités, les coûts, etc.? Autant de questions qui nécessitent du temps. Et des conseils avisés.  

Chaque plateforme est confrontée à la complexité des interfaces
de données et au problème de la qualité des données.

La deuxième raison est technologique: il n’existe pas de processus standardisé dans ce secteur. Chaque gestionnaire de fortune est unique en ce qui concerne la philosophie de placement, les modèles de conseil, les honoraires ou encore la production de rapports. Cette spécificité provient de la nature de l'activité de gérant et constitue sa valeur ajoutée. Ainsi, une plateforme pour les gérants de fortunes indépendants (GFIs) doit pouvoir être configurée de façon personnalisée afin de couvrir tous les différents besoins. Elle doit de plus impérativement offrir une grande possibilité de sophistication. De nombreuses compétences spécifiques sont nécessaires pour développer ce type de plateforme. C’est notamment le cas pour la programmation de fonctionnalités complexes pour la gestion de portefeuille. Certaines jeunes entreprises doivent encore prouver qu’elles en sont capables.

Troisièmement, l'obstacle dû au manque de standardisation des interfaces est bien souvent sous-estimé par certains acteurs. Exemple typique: la connexion aux banques pour télécharger des données de positions et de transactions, pour transmettre des transactions ou échanger des informations client diffère d’une banque à l’autre. Chaque plateforme est confrontée à la complexité des interfaces de données et au problème de la qualité des données. Un défi qui coûte cher. En réalité, il serait plus judicieux pour chaque entreprise de se concentrer sur ses caractéristiques uniques au lieu de programmer exactement la même interface que tous les autres concurrents.

Régulation et pression sur les prix

A ces aspects liés à la nature même du marché, il faut bien sûr rappeler que le contexte concurrentiel des marchés financiers et la structure organisationnelle des entreprises, en particulier les fintech, a été fortement bouleversé par les directives européennes MiFID et MiFID II, lesquelles ont engendré une forte pression sur les prix. Afin de réduire leurs coûts, de nombreux gérants de fortune indépendants ont alors investi dans une plateforme IT, permettant de booster l'attractivité des fintech. En Suisse, les mesures européennes ce sont traduites par la loi fédérale sur les services financiers (LSFin), dont l'influence sur le développement des affaires, le paysage des GFI et leur rentabilité se fera sentir en 2019. Toutefois, son influence sur les prix sera probablement moindre qu'en 2017.

L'avenir est-il vraiment dans le tout numérique?

Et maintenant? Tout le monde parle de numérisation – mais la qualité des données reste un défi de taille. Le travail manuel ne peut pas être rationalisé dans ce domaine, empêchant une digitalisation à 100% des processus.

Preuve que ce marché est en phase de stabilisation, les prix escomptés
de nombreux acteurs sont aujourd’hui plus réalistes.

La raison principale en est l’absence de standardisation des interfaces de données. A l'ère du «plug & play», les GFI attendent d’une «Multi Custody Plattform» – une plateforme IT qui permette la connexion à plusieurs banques dépositaires ainsi que la consolidation des fortunes – qu'elle soit non seulement sophistique, mais aussi simple d'une utilisation.

Aujourd'hui, la qualité des données des banques dépositaires est très variable. Elle ne peut souvent pas être corrigée automatiquement, ce qui rend une intervention manuelle incontournable pour la correction et le traitement des données.

La question se pose donc: pourquoi investir dans une plateforme alors qu'une intervention «humaine» reste encore indispensable? Car l'automatisation touche de plus en plus de processus, tels que la vérification des restrictions et la validation des données client. De plus, une plateforme propose certaines fonctionnalités que la plupart des banques ne peuvent pas mettre à disposition sur leurs portails, comme le calcul de la contribution de performance ou la personnalisation de rapports.

Vers une union des forces?

Il y a quelques années, de nombreuses Fintechs ont été créées avec l’objectif de vendre une solution aux GFI à tout prix. Certaines de ces entreprises n’existent plus. Et les acteurs d'aujourd’hui ont pu se mettre aux normes légales. Preuve que ce marché est en phase de stabilisation, les prix escomptés de nombreux acteurs sont aujourd’hui plus réalistes.

Les défis de ce marché sont encore nombreux. Ce secteur a l'avantage d'être constitué d'acteurs liés par une forte ressemblance culturelle, technologique et de clientèle. Au lieu de perdre du temps à s'affronter sur tous les aspects, pourquoi ne pas faire valoir nos complémentarités et créer une véritable union des forces afin de les relever ensemble?

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