Il est prématuré d’acheter des euros

Sven Schubert, Vontobel Asset Management

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Les risques politiques de type «Brexit», «guerre commerciale» et «Italie» continuent de peser sur la monnaie unique européenne.

Le potentiel de reprise du cours de l’EUR/CHF devrait être limité à un niveau aux alentours de 1,17. © Keystone

L’Europe est de nouveau confrontée à des problèmes – cette fois-ci, les maîtres-mots sont «Brexit», «Italie» et morosité conjoncturelle. On peut donc penser qu’à court terme, cela jouera en faveur du dollar. Pourtant, la monnaie américaine pourrait bientôt interrompre son envol. En raison des inquiétudes en Europe, il n’est toutefois pas (encore) recommandé de prendre des positions en euros.

Au cours des derniers mois, l’actualité semble avoir été moins favorable au dollar. Ainsi, par exemple, il n’y a pas eu de nouveau signe de détérioration du différend commercial entre les États-Unis et la Chine – une escalade du conflit aurait donné de l’élan au billet vert. Par ailleurs, le président de la Réserve fédérale des États-Unis, Jerome Powell, a fait naître l’espoir qu’en 2019, la Fed pourrait relever ses taux directeurs moins rapidement que prévu. Dans l’ensemble, cela a quelque peu stabilisé le cours de change EUR/USD. Pourtant, les fondamentaux n’indiquent pas encore la fin du marché haussier du dollar. Les données conjoncturelles de l’Europe demeurent moroses, et moins bonnes que celles des États-Unis. Nous estimons toutefois qu’une reprise économique est nécessaire en Europe afin que la Banque centrale européenne (BCE) puisse respecter sa feuille de route (hausse de ses taux directeurs en 2019). Mais pour l’instant, les risques politiques de type «Brexit», «guerre commerciale» et «Italie» continuent de peser sur l’euro. En conséquence, nous estimons que le moment n’est pas encore venu de prendre des positions en euros.

Le franc suisse est moins surévalué que la Banque
nationale suisse voudrait nous le faire croire.
Diminution du soutien indirect de la Réserve fédérale au dollar

Selon notre scénario «normalisation», en 2019, le cycle de relèvement des taux devrait lentement toucher à sa fin aux États-Unis, et commencer en Europe. Dans cette perspective, la différence significative qui existe actuellement entre la politique monétaire des États-Unis et celle des autres banques centrales devrait se réduire, ce qui pourrait également entraîner une diminution progressive des différences de taux d’intérêt. Sur cette base, le dollar devrait bientôt atteindre son niveau maximum. Inversement, on peut en conclure que l’euro, le franc suisse et les devises scandinaves s’apprécieront face au dollar.

Redressement très limité de l’euro par rapport au franc suisse

Il résulte de notre scénario de normalisation le classement des monnaies suivant (de la monnaie la plus forte à la plus faible): devises scandinaves, euro, franc suisse, yen et dollar US. Dans ce contexte, l’euro ne devrait avoir qu’une très faible marge de progression par rapport au franc suisse. Cela est imputable aux perspectives de croissance économique modérée dans la zone euro en 2019, que nous estimons à 2%. En Suisse, d’importants excédents de la balance courante et une économie forte (croissance de 3% en 2018) indiquent que le franc suisse est moins surévalué que la Banque nationale suisse (BNS) voudrait nous le faire croire. Nous chiffrons la juste valeur du cours à 1,20, étant précisé que celle-ci devrait encore baisser. Un niveau de 1,20 semble possible à condition que les risques politiques «Brexit», «guerre commerciale» et «Italie» puissent être éliminés. Il semble toutefois qu’au moins un de ces risques persistera. Beaucoup dépendra également du cap adopté par les autorités monétaires suisses. Si notre évaluation est confirmée, selon laquelle la BNS tentera le premier relèvement de ses taux presque en même temps que la BCE, le potentiel de reprise du cours de l’EUR/CHF devrait être limité à un niveau aux alentours de 1,17.

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