Fed: une baisse dès octobre?

Axel Botte, Ostrum AM

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L’accès de volatilité boursière a provoqué une pentification de la courbe des taux US qui traduit des anticipations d’un geste de la Fed.

© Keystone

L’inflexion des enquêtes conjoncturelles (ISM, PMI) a provoqué une chute brutale des marchés actions en deux séances avant une stabilisation vendredi. Le SP 500 résiste mais les cycliques industrielles affichent de fortes baisses. Les indices européens abandonnent 3% sur la semaine écoulée.

L’accès de volatilité boursière a provoqué une pentification de la courbe des taux américaine qui traduit des anticipations d’un geste de la Fed en fin de mois. Le T-note s’échange au-dessus d’1,50%. Cela maintient à 0% les taux réels à 10 ans. En Europe, le Bund bute sur -0,60% et les spreads souverains sont d’une remarquable stabilité. Le Gilt suit la tendance des marchés de taux internationaux malgré la cacophonie du Brexit.

La quasi-stabilité du crédit IG (+1pb) contraste avec le fort écartement du high yield européen (+37pb). Le marché est lourd et des risques spécifiques pèsent. L’asset swap spread se dégrade de 15pb à 239pb sur les notations BB européennes.

Le coup de semonce sur les actions profite au yen (sous 107) et à l’once d’or. Le réal brésilien reprend 2,5%.

Graphique de la semaine

 
Les primes de terme sont faibles sur les marchés obligataires. L’écart 2-10 ans vaut actuellement 19pb sur le Bund et 10pb aux Etats-Unis.
Les QE successifs ont réduit les rendements à long terme. La reprise annoncée du QE en zone euro est l’une des raisons du resserrement observé en Europe.
Aux États-Unis, la Fed semble privilégier les baisses de taux courts ce qui pourrait contribuer à redresser cette marge dans les mois à venir.
Chute des enquêtes conjoncturelles

Les enquêtes conjoncturelles américaines et, à vrai dire mondiales, continuent d’indiquer un fléchissement de la croissance. L’ISM manufacturier s’établit à 47,8 en septembre avec un affaiblissement marqué des composantes de nouvelles commandes (à l’export notamment), de production et d’emploi dans le secteur. L’indicateur des services (52,6) pointe également un ralentissement de l’activité dans les mois à venir.

L’économie américaine affichera toutefois une croissance en ligne avec son potentiel entre juillet et septembre. Le PIB a probablement progressé de 2% en rythme annualisé. La consommation des ménages reste l’élément moteur de la demande. Les dépenses d’investissement des entreprises, hors recherchedéveloppement, sont sans relief. En revanche, la construction résidentielle se redresse grâce à la baisse des taux hypothécaires et des inventaires réduits. L’emploi progresse à un rythme proche de l’augmentation moyenne de la population active soit 156k mensuels au 3t19. Le dernier chiffre du chômage (3,5%) apparaît flatteur compte tenu de l’estimation de l’emploi (+390k) issue de l’enquête effectuée auprès des ménages américains.

Une facilité de repo permanente accentuerait
encore la demande de Treasuries à court terme.

Quoi qu’il en soit, l’économie des Etats-Unis opère sans doute au-dessus de son potentiel et un ralentissement semble inévitable. Les ventes de véhicules toujours supérieures à 17mn d’unités en septembre traduisent des conditions de très accommodantes dans ce secteur. La volonté prolonger ce cycle de croissance engendre un certain nombre de fragilités financières, que la Fed osera pas remettre en cause. Le dernier discours de Jerome Powell est symptomatique d’une Fed sous des marchés financiers. Le compte-rendu du FOMC de septembre devrait nous éclairer sur les perspectives de politique monétaire à court terme. Il faudra traiter les risques de tensions sur le repo et délivrer les baisses de taux intégrées dans les cours obligataires et boursiers sous peine de provoquer une  Les mauvaises nouvelles ont été prises comme telles avant que les perspectives d’allègement ne stabilisent les actions. Et la Fed ne fait rien pour rétablir le caractère exogène de sa politique monétaire.

Fed: baisse des taux dès octobre?

Le marché obligataire a logiquement réévalué la probabilité d’une baisse des Fed Funds dès octobre. Cela se traduit immédiatement par un mouvement de pentification renforçant le consensus acheteur de Treasuries. Les fonds spéculatifs tendent à racheter leurs positions vendeuses. Le spread 2-10 ans a de 9pb la semaine passée. Les swap spreads se sont élargis sous l’effet des interventions de la Fed sur le marché du repo. Ces éléments nous conduisent à maintenir une position constructive sur les Treasuries, en particulier sur les maturités courtes. Une facilité de repo permanente accentuerait encore la demande de Treasuries à court terme.

En zone euro, les indicateurs conjoncturels et l’inflation stable autour d’1% militent pour le maintien de rendements obligataires bas. La publication des minutes de la réunion de septembre devrait lever le voile sur les dissensions au sein du conseil avant la mise en oeuvre du QE en novembre. Un relèvement des limites de détention est nécessaire mais plusieurs pays dont l’Allemagne s’y opposent. Le Bund bute sur le niveau de -0,60%. La pente 2-10 ans a peu de marges pour se resserrer davantage. La tendance au resserrement des swap spreads s’atténue. La France s’échange autour de 30pb à l’instar des agences allemandes. Les spreads périphériques sont inertes avec l’Italie autour de 140pb et les dettes ibériques proches de 70pb. L’Italie fera son retour sur le marché en USD avec une transaction multiple sur les maturités de 5, 10 et 30 ans. Il s’agit pour le Trésor italien d’étendre la base d’investisseurs étrangers, qui ne représente plus que 30% de l’encours. Le Portugal a vu sa note relevée par DBRS (BBBH), ce qui tend à conforter nos positions acheteuses. Le gouvernement socialiste, quoique toujours minoritaire après les élections de ce weekend, sera sans doute reconduit.

La saison des résultats risque de décevoir,
ce qui limite le potentiel haussier.
Correction sur le high yield européen

Le marché du crédit est en légère sous-performance. Les spreads investment grade continuent de s’ajuster (+1pb) avant des publications trimestrielles incertaines. Le marché du high yield est en revanche plus chahuté. Le spread moyen contre Bund s’est envolé de 37pb en cinq séances rejoignant le seuil de 400pb. L’indice synthétique représentatif du high yield (iTraxx XO) s’élargit de plus de 20pb à 254pb. La question essentielle est de savoir si les spreads actuels intègrent une prime de risque suffisante en cas de retournement conjoncturel. Outre des risques spécifiques identifiés, le marché semble désormais moins soutenu par la demande institutionnelle. La volatilité des actions a peut-être engendré des flux sortants sur le high yield.

Les indices actions européens ont dévissé en milieu de semaine à la suite des publications américaines. La chute des cours hebdomadaire atteint 3%. Les sectorielles sont similaires à celles des marchés du crédit: les valeurs industrielles cycliques perdent du terrain. L’énergie abandonne 5% dans le sillage de la chute des prix de l’or noir. Les banques européennes et les valeurs liées aux matières premières rechutent lourdement. Les télécommunications et les foncières limitent la casse grâce à la baisse des taux. Les flux finaux restent épars sur les actions européennes. La saison des résultats risque de décevoir, ce qui limite le potentiel haussier.

Enfin, les nouvelles anticipations de baisses des taux de la Fed atténuent la tendance haussière sur le dollar. L’euro se rapproche d’1,10$ mais, au sein du G10, c’est le yen japonais qui bénéfice davantage de la faiblesse du billet vert.

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