Des taux bas… pour longtemps

Salima Barragan

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L’environnement actuel va perdurer au moins dix ans estime Mondher Bettaieb de Vontobel AM.

Digitalisation, smartphone, e-commerce ; la 4e révolution industrielle a bouleversé les modes de consommation. Mais pas seulement. Elle a également insufflé une nouvelle dynamique déflationniste. Les banques centrales qui l’ont bien compris pourraient maintenir les taux bas encore très longtemps. Le point avec Mondher Bettaieb, responsable d’obligations d’entreprises chez Vontobel AM.

Smartphone & Co

Une nouvelle ère de consommation a débuté en 2007 avec l’arrivée sur le marché des smartphones.

«Le processus d’affaires des smartphones contraint le pricing power des entreprises» explique Mondher Bettaieb qui pointe clairement l’essor de la digitalisation comme responsable d’une tendance déflationniste durable. Et comme corolaire, les taux d’intérêts ne sont pas près de remonter.

La nouvelle norme de transmission 5G
va accentuer le phénomène désinflationniste.

Si les banques centrales ont intégré les implications économiques de la digitalisation, les gouvernements n’ont pas encore compris que l’austérité n’est plus de rigueur: «Alors que Mario Draghi s’est battu pour maintenir le niveau de consommation actuel, il a également fait part à plusieurs reprises de la nécessité pour les gouvernements de déployer des politiques de relance», relève Mondher Bettaieb.

Pour le spécialiste, la nouvelle norme de transmission 5G va accentuer le phénomène dé  flationniste: «Imaginons qu’une société comme Siemens actionne ses usines à distance avec une fonction de réseau». Ce scénario relève encore de la fiction mais les technologies disruptives entraînent invariablement des suppressions d’emploi dans certains secteurs économiques. «D’où la nécessité de plan de dépenses de capitaux pour créer des nouveaux emplois» estime Mondher Bettaieb qui prévoit notamment des suppressions de postes dans l’industrie automobile allemande.

Investir sur un horizon de 3 à 5 ans

Les flux d’information quotidiens influencent les valorisations des obligations à court terme: «En 2018, les obligations ont cédé environ 2% mais depuis le début de l’année elles affichent une performance de 9%. Or beaucoup d’investisseurs sont restés en marge des marchés de peur de perdre à nouveau» constate Mondher Bettaieb. En cause: l’heuristique de disponibilité. Selon ce mode de raisonnement étudié en psychologie, les investisseurs solliciteraient uniquement les derniers évènements en mémoire. Ce processus explique aussi en partie les mouvements de panique lors de nouvelles négatives.

Dans un monde de taux d’intérêt bas voir négatif, les obligations
de notation de crédit BB et BBB offrent un portage intéressant.

Mais ces sauts d’humeur des marchés n’ont qu’un impact marginal sur les investisseurs à long-terme et Mondher Bettaieb se fie davantage aux fondamentaux des sociétés dans lesquelles il investit: «Lors d’un mouvement massif de vente, je conserverai par exemple mon exposition à Intesa Sanpaolo que je qualifie de meilleure banque en Europe car je suis convaincu de sa bonne gestion et sur la qualité de son bilan».

Etoiles montantes des obligations d’entreprise

Dans un monde de taux d’intérêt bas voir négatif, les obligations de notation de crédit BB et BBB offrent un portage intéressant (2,5% et 1% respectivement) par rapport aux obligations d’Etat de très haute qualité. Le gestionnaire favorise tout particulièrement les obligations passées du rang BB à BBB (rising stars) comme la société finlandaise Stora Enso qui produit de la pulpe et du papier, Leonardo une société construisant des hélicoptères et Fiat qui grâce à l’arrivée d’un nouveau CEO est remonté dans les cieux Investment Grade.